Le prix Nobel de physique 2010 a récompensé mardi les travaux de deux chercheurs d'origine russe, Andre Geim et Konstantin Novoselov, qui avec un bout de scotch et un crayon ont découvert une forme révolutionnaire du graphite, le graphène, qui doit bouleverser l'électronique.

En partant d'un élément aussi commun que le graphite des mines de crayon, MM. Geim et Novoselov ont isolé le graphène. Ce nouveau matériau permet de construire des transistors qui «surpassent nettement en rapidité» les transistors classiques au silicium, et ainsi de fabriquer des ordinateurs «plus efficaces», selon le comité Nobel de l'Académie royale suédoise des Sciences.

«Pratiquement transparent et bon conducteur», le graphène est également «compatible pour produire des écrans tactiles transparents, des panneaux lumineux et peut-être aussi des capteurs solaires», selon le comité Nobel.

Les deux scientifiques, respectivement 187e et 188e lauréats du Nobel de physique, sont nés en Union soviétique et aujourd'hui, le professeur Geim a la nationalité néerlandaise, et son ancien élève Novoselov a la double nationalité britannique et russe. Tous deux enseignent et travaillent de concert à l'Université de Manchester, au Royaume Uni.

«Sous le choc», M. Novosselov qui est à 36 ans l'un des plus jeunes lauréats, n'a pu faire immédiatement de commentaire.

En revanche, son collègue a été plus disert à la télévision publique suédoise SVT.

«Il y a deux catégories de lauréats du prix Nobel: ceux qui cessent de faire quoi que ce soit pour le restants de leurs jours, ce qui ne rend pas service à la société, et ceux qui craignent que les gens pensent qu'ils ont remporté le prix Nobel par accident et qui donc redoublent d'efforts dans leurs travaux», a commenté M. Geim, 51 ans, précisant être dans la seconde catégorie.

Alors ses plans pour le restant de la journée ? «Retourner au travail (...) Mes plans ne vont pas changer», a-t-il dit, joint par téléphone depuis l'Académie suédoise juste après l'annonce de son prix.

Dans un article publié en 2004, MM. Geim et Novoselov annoncent la découverte du graphène, un nouveau matériau bi-dimensionnel, car réduit à l'épaisseur d'un atome, composé d'un feuillet unique de graphite avec la structure d'un nid d'abeilles. Contrairement aux autres matériaux bi-dimensionnels connus jusque-là, le graphène présente des propriétés physiques particulièrement remarquables car très résistant et excellent conducteur.

L'un des aspects les plus soulignés de la découverte des lauréats, est la simplicité et l'empirisme qui y ont conduit.

«Avec du ruban adhésif normal, ils sont parvenus à recueillir une paillette de carbone de l'épaisseur d'un atome seulement», explique le comité Nobel.

«C'est un exemple fantastique d'une découverte fondamentale issue de la curiosité scientifique et qui aura des retombées pratiques, sociales et économiques majeures pour la société», s'est félicité la directrice adjointe de l'Université de Manchester, Nancy Rothwell.

Etape révolutionnaire dans la miniaturisation électronique, le graphène peut également être utilisé pour ses propriétés mécaniques: malgré son extrême finesse, il est incroyablement résistant, 200 fois plus que l'acier.

Principal écueil à l'utilisation du graphène actuellement, son prix de production, qui atteint lui aussi des sommets.