Après des années difficiles, les chercheurs qui participent depuis lundi à la conférence internationale sur le vaccin anti-sida à Paris ont laissé mercredi libre cours à leurs espoirs, à la suite du succès «modeste» de l'essai de vaccin mené en Thaïlande. Ce vaccin, dont les résultats ont été détaillés mardi, offre sur un petit échantillon une baisse du risque d'infection par le virus de 31%.

«Comme nous n'avons eu aucun succès depuis plus de 20 ans, le vaccin thaï ressemble à un petit signal», a souligné devant la presse Anthony Fauci, directeur de l'Institut américain des maladies infectieuses et de l'allergie.

«La route devant nous a un peu plus de lumière», a-t-il noté. «C'est le début d'un chemin vers le vaccin».

Vu son faible effet, le candidat-vaccin n'aura pas de suite en tant que tel. Il n'offre en effet qu'une «preuve de concept», montrant une direction dans laquelle aller. Pour Jean-François Delfraissy, directeur de l'Agence française de recherche sur le sida (ANRS), il a offert «une bouffée d'oxygène».

Plusieurs travaux en recherche fondamentale ou en recherche clinique, présentés devant les participants à la conférence, ont d'ailleurs montré la vitalité du secteur. «Beaucoup de choses se passent», a noté le Pr Fauci.

En recherche fondamentale, des études portent par exemple sur les meilleurs fragments de virus à présenter aux cellules susceptibles de l'éliminer, ou sur le rôle des cellules dendritiques -une sorte de cellule immunitaire-, beaucoup plus efficaces chez les personnes infectées de longue date ne développant pas la maladie que chez les personnes en bonne santé.

«Les cellules dendritiques sont tout en haut de l'affiche», a noté le Pr Delfraissy.

D'autres portent sur la mise au point de nouveaux vecteurs du virus, ou sur des approches technologiques nouvelles.

En recherche clinique, les essais vaccinaux présentés tournent particulièrement autour du système de «prime boost», c'est-à-dire d'une association de deux vaccins différents, comme le vaccin thaï.

L'ANRS a présenté un candidat-vaccin à base de 5 lipopeptides -des molécules constituées de fragments de protéines du VIH, associées à des lipides- pouvant être utilisé dans le «prime boost». Une équipe du Karolinska Institute de Suède utilise de l'ADN dans lequel sont intégrés des gènes synthétiques du virus. Plus avancé, un essai mené par le NIH américain combine ADN et adénovirus (virus du rhume) modifié, dont les résultats devraient intervenir fin 2010.

Françoise Barré-Sinoussi, prix Nobel de médecine 2008, a relevé que «ça bouge depuis un certain temps dans la compréhension des mécanismes». «Cela va nous permettre de définir notre stratégie thérapeutique de demain», dit-elle.

Pour elle, le vaccin thaï «ouvre la voie à de nouvelles questions». «La recherche c'est un puzzle, ce n'est pas une pièce qui donne la solution mais toutes les pièces du puzzle mises ensemble».

Charlotta Nilsson, du Karolinska Institute, estime qu'à la conférence «l'humeur est fantastique». Elle se dit «optimiste»: «on fait constamment deux pas en avant et un en arrière», dit-elle, estimant qu'on apprend aussi «beaucoup des échecs».

Pour Mohammed Bakari, directeur de l'étude suédoise en Tanzanie, «de plus en plus de candidats-vaccins émergent». Pour lui, «beaucoup va se passer d'ici cinq ans».

«Il y a beaucoup d'excitation dans l'air», remarque également Seth Berkley, du groupe américain International AIDS Vaccine Initiative.