Les ondes gravitationnelles, déformations de l'espace-temps prédites par Albert Einstein, n'ont toujours pas été directement observées, mais de premiers pas importants ont été faits, selon des travaux rendus publics mercredi dans la revue scientifique Nature.

Comme un caillou jeté dans une mare fait naître des rides à sa surface, le Big Bang, la collision d'étoiles à neutrons ou de trous noirs qui fusionnent peuvent déformer la texture de l'univers, créant des ondes qui se déplacent à la vitesse de la lumière.«Les ondes gravitationnelles sont une conséquence de la théorie de la relativité générale d'Einstein qui dit que si vous avez de la masse, ça va courber l'espace, ça va déformer l'espace», explique l'astrophysicien français Benoît Mours.

«Si on accélère fortement une masse, elle va émettre des déformations de l'espace qui vont se propager dans l'univers: ce sont les ondes gravitationnelles», dit-il dans un podcast de l'Institut des sciences de l'Univers du CNRS.

Une bouffée d'ondes gravitationnelles, dues par exemple à la fusion de deux trous noirs, peut atteindre la Terre et y modifier de façon infime les longueurs. «La taille d'un être humain va changer d'un millième de milliardième de milliardième de mètre», résume M. Mours (Lapp/CNRS), associé aux travaux sur le détecteur Virgo, opérationnel depuis mai 2007 près de Pise en Italie.

D'autres observatoires d'ondes gravitationnelles, installés aux Etats-Unis (Ligo à Hanford et Livingston) et en Allemagne (GEO), fonctionnent sur le même principe. En faisant interférer des faisceaux de lumière laser parcourant des tunnels de plusieurs kilomètres se croisant à angle droit, il s'agit de détecter des différences de longueur correspondant au milliardième du diamètre d'un atome.

A Virgo, où une nouvelle campagne de mesures a commencé le 7 juillet, en même temps qu'à Ligo, «on compare en permanence la longueur des deux bras (3 km chacun) de l'interféromètre pour voir s'il y en a un qui est plus court que l'autre», précise M. Mours.

Un pas important a été franchi selon les scientifiques qui publient cette semaine les résultats de la précédente campagne de mesures effectuées du 5 novembre 2005 au 30 septembre 2007 sur les interféromètres Ligo, à la recherche d'ondes gravitationnelles datant des premières secondes après le Big Bang.

Aucune n'a été observée, mais cette non-détection à la fréquence de 100 Herz étudiée, porte en elle-même des indications sur les modèles d'univers naissants possibles.

«On ne voit rien, mais on peut quantifier ce que rien veut dire comme le niveau de bruit», explique M. Mours, interrogé par l'AFP.

Ces résultats représentent un «événement important», relève Marc Kamionkowski (Caltech, Pasadena, Etats-Unis) dans un commentaire publié dans Nature. Il prédit que «les détecteurs de la prochaine génération, Advanced Ligo (qui doit fonctionner en 2014) et Advanced Virgo, sont presque garantis de voir un signal provenant de systèmes compacts d'étoiles binaires», par exemple deux étoiles à neutrons.

Depuis cet été, Virgo est déjà capable d'observer «un volume d'univers», englobant quelque 2000 galaxies jusqu'à 65 millions d'années-lumière de distance, à la recherche d'ondes gravitationnelles dues à la collision d'étoiles à neutrons et de détecter des trous noirs fusionnant à 300 millions d'années-lumière.