Les traitements antirétroviraux pour maîtriser le sida ont fait d'immenses progrès depuis une dizaine d'années, et des thérapies quasi sur mesure sont proposées aujourd'hui dans les pays développés, choisies parmi des dizaines de molécules et en fonction de la tolérance des patients.

«Par rapport à il y a dix ans, c'est le jour et la nuit», note Didier Jayle, clinicien et ancien président de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie, en marge de la conférence mondiale sur le sida qui se tient jusqu'au 8 août à Mexico.

Le Journal of the American Medical Association (JAMA) a publié plusieurs études à l'occasion de la conférence, dont une préconisant des traitements individualisés, entrepris le plus tôt possible. Les traitements doivent encore prendre en compte la réaction physique du patient, la simplicité de la thérapie, le nombre de pilules à prendre, le désir de grossesse...

Les chercheurs se sont intéressés aussi aux effets secondaires des traitements, tels que l'obésité abdominale, et aux risque de maladies cardio-vasculaires qu'ils font courir, notant que la prise d'hormones de croissance peut avoir un effet bénéfique.

Les Français devraient eux aussi proposer début septembre leurs recommandations, mises au point par une équipe de scientifiques, de médecins et d'associatifs dirigée par le Pr Patrick Yeni.

De fait, «un des plus gros problèmes, ce sont les lipodystrophies (anomalies de la répartition des graisses), qui marquent le corps, mais les nouveaux traitements en provoquent moins», selon le Dr Jayle.

L'arrivée des multithérapies, à partir de 1996, «plus efficaces, mieux tolérées et plus simples en termes de dosages», selon les chercheurs, et la mise au point de produits de plus en plus performants ont modifié les perspectives des malades qui y ont accès, du moins dans les pays du nord.

Ils ont à ce jour le choix entre plus de 30 antirétroviraux, et la trithérapie a accru de 13 années leur espérance de vie. Mais elle est toujours de près de 20 ans inférieure à celle du reste de la population.

«Nous sommes dans une nouvelle ère de la thérapie antirétrovirale», estime Pedro Cahn, président de la Société internationale du sida, qui organise la conférence de Mexico.

Les progrès effectués ont incité le laboratoire suisse Roche à suspendre ses recherches, ne voyant rien venir comme amélioration possible «dans les cinq à six ans à venir».

Et les traitements sont si performants qu'un rapport officiel suisse a estimé en janvier que dans un couple sérodifférent (un séronégatif, un positif), une personne contaminée bénéficiant d'une thérapie efficace pouvait se passer de préservatif pour autant que son taux de virus soit indétectable depuis six mois et qu'elle ne souffre pas d'une autre affection sexuellement transmissible.

«C'est défendable», dit le Dr Jayle, soulignant qu'il y a «un plus grand risque avec préservatif et sans traitement», car le préservatif se déchire dans 5% des cas, qu'«avec traitement et sans préservatif».

«Il ne s'agit pas de dire d'arrêter d'en mettre, mais de dire que s'il y a un accident, ce n'est pas dramatique», note-t-il.

Les traitements, qui ne guérissent pas la maladie - on est toute sa vie porteur du virus -, ne restent cependant qu'un pis-aller en attendant la mise au point - improbable à court terme - d'un vaccin. Les microbicides, sur lesquels avaient été fondés de grands espoirs, sont toujours au stade de la recherche.

Selon Zeda Rosenberg, responsable de l'International Partnership for Microbicides (IPM) un partenariat public/privé, «fabriquer des microbicides n'est pas simple».

L'IPM a «au moins six» produits à l'étude, dont deux ont, selon elle, toutes chances de n'aboutir à rien.