Les auteurs du rapport officiel suisse affirmant qu'une personne contaminée par le VIH et bénéficiant d'une thérapie efficace ne peut transmettre le virus et peut se passer de préservatif ont défendu dimanche à Mexico l'idée d'un «risque négligeable» et le principe de plaisir.

Au mois de janvier, le professeur Bernard Hirschel, responsable VIH-Sida des Hôpitaux universitaires de Genève et coauteur du rapport, avait fait valoir que dans un couple sérodifférent (un séronégatif, un séropositif) la personne séropositive pouvait se passer du préservatif, pour autant que son taux de virus soit indétectable depuis au moins six mois (il ne disparaît jamais) et qu'il ne souffre pas d'une autre affection sexuellement transmissible.

Juste avant l'ouverture officielle de la conférence mondiale de Mexico sur le sida, Pietro Vernazza, membre de la commission fédérale suisse du sida, a fait valoir lors d'un débat qu'il n'y avait pas de «cas établi» de transmission dans les conditions définies par le rapport, et que le risque était «négligeable». Il a souligné aussi que le sexe sans préservatif était «une question de plaisir».

M. Vernazza a cependant rappelé que le texte, tout en autorisant la relation sexuelle sans préservatif, ne recommandait pas pour autant «de ne pas l'utiliser».

Dans la salle, Rolande Hodel, présidente de l'association AidsfreeAfrica, a craint l'impact d'un tel message sur l'Afrique. «Ce message est trop large, trop vague», a-t-elle indiqué à l'AFP. «Les gens vont croire que c'est tout simplement OK de ne plus utiliser de préservatifs», en oubliant les conditions.

Nancy Padian, de l'Université de Caroline du Nord, a estimé indispensable de fournir «une information précise pour permettre un choix informé», admettant que ce rapport n'était «guère applicable dans le sud», où il risquait de faire «plus de mal que de bien».

Nikos Dedes, militant d'un groupe européen, s'est réjoui que les Suisses «lèvent la peur d'être un risque pour ses partenaires» et redonnent le droit «à l'expérience sans inhibition du plaisir sexuel».

«Cela allège le fardeau d'être séropositif, et donne aux gens qui hésiteraient à se soigner une nouvelle motivation à le faire», a-t-il lancé. «Et finis les cauchemars quand les préservatifs sont troués !».

Une étude australienne, publiée le mois dernier dans la revue britannique The Lancet, a contesté ce rapport suisse en affirmant que sans protection les risques de contamination étaient multipliés par quatre.

Dans un commentaire, le Lancet soulignait que pour les Suisses il y a «un seuil» en-dessous duquel une quantité infime de virus ne peut pas provoquer d'infection, tandis que pour les chercheurs australiens le risque ne fait que diminuer progressivement, sans qu'il y ait de seuil.