Cette semaine, Statistique Canada nous apprenait que 51% des jeunes de la génération Y (nés 1981-1990) vivaient encore chez leurs parents, comparativement à 31% de leurs homologues de la génération X (nés 1969-1978) au même âge. Chez les derniers baby-boomers (nés 1957-1966), seulement 28% vivaient chez leurs parents lorsqu'ils étaient dans la vingtaine.

Cette semaine, Statistique Canada nous apprenait que 51% des jeunes de la génération Y (nés 1981-1990) vivaient encore chez leurs parents, comparativement à 31% de leurs homologues de la génération X (nés 1969-1978) au même âge. Chez les derniers baby-boomers (nés 1957-1966), seulement 28% vivaient chez leurs parents lorsqu'ils étaient dans la vingtaine.

«Ah! Les enfants-rois! Les Tanguy!» Évitons les stéréotypes. On ne s'entend même pas sur les dates qui définissent une génération, allons-nous maintenant essayer de démontrer que les valeurs, les normes et l'éthique de travail sont davantage différentes entre deux générations qu'entre deux personnes de la même génération? Absurde.

Laissons faire la psychanalyse de petit poussin et essayons plutôt de comprendre si quelque facteur dans la basse-cour contribue à son comportement. Soyons empiriques: commençons avec l'écart économique intergénérationnel, qui s'est creusé dramatiquement en 30 ans.

Selon StatCan, les 25-34 ans étaient 12% plus pauvres en 2005 qu'en 1984, alors que les 45-54 et les 55-64 ans ont vu leur richesse accumulée augmenter de 53% et 69% respectivement durant la même période. En 1984, les 55-64 ans avaient trois fois plus de ressources à leur disposition que les 25-34, alors qu'aujourd'hui, il s'agit d'un facteur de 5,75.

Comment l'expliquer? Les Canadiens qui ont bénéficié de l'éducation à rabais durant les années 70, sont les mêmes qui ont vu les impôts et les services chuter alors qu'ils étaient jeunes, employés et en bonne forme durant 1980. Depuis les années 2000, c'est l'investissement massif en soins de santé qui apparaît. L'argent et les priorités de l'État les auront suivis toute leur vie. L'accumulation d'un avantage net, relatif à ceux qui les ont précédés et ceux qui les suivent, n'est donc pas surprenante.

Si les jeunes d'aujourd'hui quémandent à maman et papa plus qu'il y a 30 ans, c'est peut-être qu'ils n'ont pas d'alternatives: ils sont surendettés et plus souvent sans emploi. StatCan rapporte que les étudiants déboursent présentement 34,2% du coût réel de leur éducation, alors qu'en 1977 ce n'était que 13,7%. La Fédération canadienne des étudiants ajoute que les nouveaux diplômés sont trois fois plus endettés qu'ils ne l'étaient au début des années 90.

On dit que la génération Y a choisi collectivement de rester à l'école plus longtemps. Choix ou obligation? En physiothérapie, en psychologie et ailleurs, les ordres professionnels imposent plus de diplômes aux jeunes recrues qu'aux personnes déjà en poste. C'est de la discrimination codifiée en loi, un protectionnisme professionnel qui retarde l'avancement de certains alors que d'autres évitent toute mise à niveau.

Grèce. Égypte. Espagne... Les jeunes désespèrent partout. Leur taux de chômage mondial est estimé à 21%, ayant même atteint les 46,3% en Algérie! Au Canada, nous faisons beaucoup mieux à 15,1% (2009), mais c'est quasiment le double du taux national de 8,3%. Pourtant, en 1990, la même tranche d'âge au Canada avait un taux de chômage de 12,4% contre 8,1%. Le phénomène s'est donc aggravé en peu de temps. De plus, les statistiques font abstraction des nombreux étudiants qui préféreraient être sur le marché du travail, mais à défaut d'être admissible au chômage, n'ayant pas d'emploi, et se butant contre les ordres professionnels, sont conséquemment «emprisonnés» à l'école, condamnés à accumuler des dettes.

Les poussins sortiront plus tôt du nid si la basse-cour leur est accessible. Lorsque les dépenses de l'État seront élaborées à partir d'un schéma plus équitable. Lorsque les entreprises et les syndicats valoriseront la formation et l'expérience de manière plus pondérée. Lorsque les ordres professionnels n'auront pas de membres catégories A et B.

Dans le monde arabe, où le chômage extrême des jeunes ne représente qu'un grief parmi tant d'autres, la démocratisation réajustera (on espère...) le tir, la jeunesse étant majoritaire. La situation des jeunes canadiens est banale relativement à l'incroyable phénomène qu'est le printemps arabe, mais elle aborde un aspect inverse intéressant: nos institutions démocratiques auraient à légiférer dans le sens de la minorité.

Mais notre majorité sera-t-elle d'accord?