Le G8 est un club dominé par des cancres qui donnent des leçons de bonne conduite au reste du monde.

Le G8 est un club dominé par des cancres qui donnent des leçons de bonne conduite au reste du monde.

Hormis les gouvernements du Canada (le moins endetté du G8) et de l'Allemagne (plus faible déficit budgétaire), les membres du G8 qui étaient présents à Deauville la semaine dernière sont tous d'épouvantables gestionnaires de leurs finances publiques. Pas plus les Américains que les Français ou les Italiens ne sont capables de contenir les dépenses de l'État à un niveau inférieur à celui de l'inflation: aucun n'est en mesure de rembourser la dette publique autrement qu'en s'endettant plus encore.

Ces dettes extraordinaires ne sont pas l'héritage de la crise financière mondiale de 2008, mais de la réaction inadéquate à cette crise. Au nom du bon vieux keynésianisme qui n'a jamais marché nulle part, le gouvernement américain, suivi de près par le gouvernement français, a «relancé» par la dépense publique: la dette en résulte sans bénéfice économique mesurable.

Ces bilans dans le rouge ne sont pas que comptables : l'endettement ralentit la croissance et détruit l'emploi parce que l'argent public est moins contributeur de richesses que l'investissement privé.

Le G8 en groupe n'est donc pas légitime à sermonner ceux qui gèrent plus mal encore, comme les Grecs: ceux-ci font valoir, à bon droit, que les Français et les Allemands ont été les premiers à violer les règles de la zone euro et à prêter aux Grecs pour qu'ils agissent de même.

Les appels du G8, à l'initiative de Nicolas Sarkozy dont c'est devenu le fonds de commerce, à un nouveau système monétaire international, sont tout aussi peu légitimes: si le dollar et l'euro étaient gérés de manière stable et prévisible, le système actuel des taux de change flexible donnerait toute satisfaction.

Tout de même, le club des cancres n'a-t-il pas de bonnes intentions? Comme prêter aux pays arabes en voie de démocratisation? De bons sentiments, mais le geste est inutile si les économies arabes ne sont pas au préalable réformées, pour passer de l'actuel «capitalisme des copains» à une véritable économie d'entreprise.

Le G8 manque donc de légitimité et de crédibilité, par absence d'une doctrine économique claire et de cohérence entre les discours et la pratique.

Paradoxalement, le G20 est plus sérieux parce qu'y siègent des gouvernements comme ceux du Brésil, de l'Inde et de la Corée du Sud, qui sont à même de rappeler que le libre-échange et l'économie de marché les ont extraits de la misère de masse, en une génération.

Ce qui manque au G8, et au G20 à un moindre degré, est une autorité indépendante extérieure, comme le fut naguère le Fonds monétaire international (FMI). Dans les années 80, le FMI assortissait ses prêts de recommandations, dites «conditions», destinées à remettre les cancres sur le chemin du développement. Ces conditions ont souvent été critiquées, mais ceux qui les suivaient (Corée du Sud, Turquie et de nombreux pays africains) ont guéri de l'inflation et de la stagnation.

Le FMI était indépendant, il avait une doctrine vérifiée par l'expérience: c'était juste avant que Dominique Strauss-Kahn ne le transforme en une boutique de relations publiques avec l'ambition folle d'en faire un gouvernement mondial.

Si le G8 était une entreprise, elle devrait être déclarée en faillite, mise en redressement judiciaire et absorbée par le G20. Et le monde n'a nul besoin d'un gouvernement mondial: ce qui manque est une haute autorité économique capable de dire les faits vrais sans trembler devant les grands flambeurs de ce monde. Cette haute autorité est à inventer: ce ne sera pas le FMI. La désignation probable de Christine Lagarde à sa direction, choix politique et non technique, va affaiblir encore plus que sous DSK la légitimité scientifique de cette organisation.