En lisant votre lettre ouverte à Anne Sinclair («Anne, qui serez-vous?»), je me suis demandé si vous aviez déjà entendu parler de quelque chose qui s'appelle l'amour. Vous reprochez à Anne Sinclair, la femme de Dominique Strauss-Kahn, sa compassion pour son mari, par ailleurs toujours innocent d'un point de vue judiciaire. Insinuez-vous qu'en tant que femme, elle devrait se ranger du côté de la victime présumée, comme si cette solidarité de genre devait transcender ses sentiments d'épouse?

En lisant votre lettre ouverte à Anne Sinclair («Anne, qui serez-vous?»), je me suis demandé si vous aviez déjà entendu parler de quelque chose qui s'appelle l'amour. Vous reprochez à Anne Sinclair, la femme de Dominique Strauss-Kahn, sa compassion pour son mari, par ailleurs toujours innocent d'un point de vue judiciaire. Insinuez-vous qu'en tant que femme, elle devrait se ranger du côté de la victime présumée, comme si cette solidarité de genre devait transcender ses sentiments d'épouse?

Vous vous dites blessée en tant que féministe. Voilà le grand mot. Vous pourriez aussi l'être en tant que catholique, maoïste ou n'importe quel mot en iste. L'amour a toujours contrarié les principes, les croyances, le Code de la route, la politesse, le politiquement correct et même le féminisme. Il transcende aussi le jugement, que vous avez si rapide, en demandant à une femme de désavouer un homme qu'aucun tribunal n'a encore condamné.

Au fond, ce que vous ne saisissez pas à titre de sexologue, c'est qu'une femme continue d'aimer et de défendre un homme accusé de crime sexuel envers une autre femme. C'est bien l'aspect sexuel qui vous dérange, car si DSK avait tué un homme, vous ne verriez aucun inconvénient à ce que sa femme continue de l'aimer, et vous salueriez le dévouement et l'abnégation que vous lui reprochez aujourd'hui: votre métier vous égare et l'examen du pénis ne vous dispense pas de celui du coeur humain.

Expliquez-nous comment l'amour d'Anne Sinclair pour son mari diminue celui qu'elle peut ressentir pour sa victime? En quoi l'abandon d'une épouse prouverait-il sa grandeur d'âme? Comment la haine d'un coupable, s'il l'était, serait-elle une leçon d'amour?

Non, l'amour n'est pas si court. Et l'on peut aimer un condamné, un toxicomane, un criminel, sans être complice d'aucun crime. Il arrive même que cet amour guérisse ceux que vous condamnez.

Oui, la femme de DSK, cette féministe milliardaire, maintenant aussi démunie qu'un érable en décembre, donne à tous et à toutes une très grande leçon sur la force de l'amour des femmes au-delà de la raison des hommes, qu'il leur arrive de perdre.

* L'auteur vient de publier La voie du chagrin d'amour aux éditions Michel Brûlé.