L'euthanasie - acte qui provoque la mort en quelques minutes - ne peut pas être pratiquée en soins palliatifs.

L'euthanasie - acte qui provoque la mort en quelques minutes - ne peut pas être pratiquée en soins palliatifs.

Dès leur création, les soins palliatifs ont eu pour but de soulager les malades afin qu'ils puissent être conscients, en relation avec leurs proches, le plus longtemps possible, sans hâter, ni retarder la mort. Encore aujourd'hui, cet objectif guide les soins palliatifs. Toute l'équipe est attentive à soulager les douleurs ou autres symptômes et à être présente aux émotions et aux souffrances vécues par le malade.

En soins palliatifs, l'euthanasie est vue comme un geste radical d'abandon d'une personne qui ressent une perte d'intégrité dans son corps et dans son coeur, vit une destruction de ses projets et de son avenir et souffre une perte irréversible d'espoir. Au contraire, au coeur de la crise, les soins palliatifs soutiennent l'identité et la qualité de vie. Si les soins palliatifs pratiquaient l'euthanasie, ce serait renier leur mission.  

Assurément, affronter la mort n'est pas facile et constitue probablement la crise ultime à laquelle l'homme doit faire face. Le soulagement des douleurs libère l'esprit et l'accompagnement soutient le malade afin qu'il trouve en lui un nouveau sens à sa vie. Et c'est un travail difficile, mené de concert par les intervenants et les proches, que d'aider les malades à voir ce qu'ils sont encore, toute la joie qu'ils peuvent encore vivre et donner.  

La souffrance s'estompe avec le retour du sens dans leur vie. Et ce travail de retournement ne peut être mené de front avec la perspective de l'euthanasie. Impossible de donner le temps de revivre en planifiant l'injection du lendemain. Cette démarche d'accompagnement ne fait partie d'aucun protocole d'euthanasie. Construire du sens détruit le besoin d'euthanasie.

Outre le fait de donner du confort, ces soins contribuent, peu à peu, à développer avec le malade une relation de confiance. Celui-ci s'ouvre lentement et il devient possible pour lui de se raconter, de se dire et de guérir peu à peu, de l'intérieur, ces blessures qui éteignaient le goût de vivre. C'est la relation de confiance créée entre le malade et les soignants qui fonde les soins palliatifs. Sans elle, rien n'est possible. Construire cette relation est très délicat. L'esprit du soignant doit être dégagé et ouvert à l'autre. Tout son être est tendu vers cette compréhension de la souffrance vécue par le malade et ses proches.

Cette attention est à la source du soin palliatif et est opposée à ce qui engendre l'euthanasie puisque les demandes d'euthanasie sont généralement des interrogations sur l'estime portée par autrui et des requêtes d'amour. Grâce au lien étroit qui se développe dans la relation soignant-malade, les soins palliatifs redonnent le goût de vivre. Cela pourrait expliquer pourquoi les demandes d'euthanasie sont si rares chez les malades qui bénéficient de cette qualité de présence de leurs soignants. Les malades disent plutôt merci.

Imaginez ce que deviendrait l'atmosphère en soins palliatifs si les malades ou leur famille étaient témoins de gestes d'euthanasie dans la chambre d'à côté. Ce serait la panique. Déjà certains malades et familles craignent que leur mort soit provoquée par les soins palliatifs. Il faut alors des trésors de patience pour leur expliquer la philosophie des soins palliatifs, et le fait qu'au contraire, ceux-ci vont les aider à profiter au mieux du temps qui reste.  

Introduire de force l'euthanasie dans la culture palliative, c'est tirer à bout portant sur la qualité des soins palliatifs, sur la sécurité qu'y vivent les malades actuellement, de même que sur le dévouement qui les maintient.  

Enfin, au plan organisationnel, forcer l'euthanasie comme un «soin», ce qu'elle n'est pas, diviserait les équipes en créant des conflits de valeurs importants.

Alors que le milieu palliatif actuel est soumis aux mêmes contraintes que les autres secteurs du système de santé, toute pression additionnelle risque d'entraîner un éclatement des services de soins palliatifs.