La semaine dernière, plusieurs médias se sont penchés sur le non-remboursement, au Québec, de plusieurs nouveaux médicaments contre le cancer. Dans une liste de nouveaux médicaments commercialisés au cours de la dernière année, la Colombie-Britannique en rembourse huit, l'Ontario sept et le Québec un.

La semaine dernière, plusieurs médias se sont penchés sur le non-remboursement, au Québec, de plusieurs nouveaux médicaments contre le cancer. Dans une liste de nouveaux médicaments commercialisés au cours de la dernière année, la Colombie-Britannique en rembourse huit, l'Ontario sept et le Québec un.

Le Québec remboursait près de 80% des nouveaux médicaments à la fin des années 90 et n'en rembourse qu'environ 40% depuis quelques années parce que plusieurs nouveaux médicaments commercialisés sont des compétiteurs plus chers que des médicaments déjà remboursés. Néanmoins, il est vrai que ces chiffres font frémir.

Malgré tout, le Québec est la province qui rembourse toujours le plus de médicaments, toutes catégories confondues (selon l'Institut Fraser). Pourquoi? Parce que le Québec tente, depuis 1997, d'avoir une politique qui favorise non seulement l'accès raisonnable et équitable aux médicaments mais qui, aussi, tente de promouvoir les investissements en innovation de la part de l'industrie pharmaceutique novatrice (notamment en raison de la règle des 15 ans).

Si tel est le cas, pourquoi le Québec n'a-t-il pas un plan de remboursement comparable à la Colombie-Britannique et à l'Ontario en ce qui concerne les médicaments anticancer Lorsque le temps des comparaisons arrive, il importe d'être extrêmement prudent. De façon générale, la Colombie-Britannique a un plan très restrictif de remboursement des nouveaux médicaments: beaucoup de nouveaux médicaments ne sont pas remboursés ou le sont mais à un prix moyen de référence. Ainsi, plusieurs nouveaux médicaments sont remboursés mais le consommateur doit payer la différence entre leur prix et le prix moyen de remboursement.

L'Ontario a un plan de remboursement des nouveaux médicaments assez généreux mais, néanmoins, moins que celui du Québec. Tout comme le Québec, l'Ontario choisit de rembourser des nouveaux médicaments lorsque leur prix est compensé et justifié par le bénéfice que ces nouveaux médicaments procurent aux consommateurs, par rapport aux médicaments déjà commercialisés et remboursés. Tout comme le Québec, l'Ontario a possiblement déterminé que le prix des nouveaux médicaments anticancer était trop élevé par rapport à leur «plus-value» quant à l'efficacité.

Alors pourquoi les rembourser? Il y a deux explications possibles. L'Ontario a jugé qu'il était juste et équitable de rembourser ces nouveaux médicaments malgré leur prix trop élevé. Ou bien le gouvernement et les compagnies pharmaceutiques novatrices ont conclu des ententes qui permettent aux gouvernements de recevoir un retour financier en échange d'un plus grand nombre de nouveaux médicaments remboursables à un prix inchangé (donc toujours élevé).

Ces ententes ont pour effet de provoquer une réduction invisible du prix de ces nouveaux médicaments, permettant ainsi de justifier leur prix par rapport à leur bénéfice. Les termes de ces ententes sont cependant confidentiels, donc il est difficile d'affirmer que la décision du gouvernement de l'Ontario se base bien sur celles-ci. De telles ententes confidentielles pourraient s'avérer illégales du fait que le gouvernement du Québec exige des compagnies pharmaceutiques qu'elles vendent leurs médicaments, au Québec, au prix le plus bas vendu dans toutes les provinces canadiennes.

L'objectif de la politique québécoise est double : permettre un accès raisonnable et équitable aux médicaments et promouvoir l'innovation. Le Québec est la province qui rembourse le plus de nouveaux médicaments au pays, ce qui est louable. Par contre, le non-remboursement d'un certain nombre de nouveaux médicaments, par ailleurs remboursés dans d'autres provinces, fait-elle de cette politique une politique juste et équitable?

En fait, afin que le Québec réalise son double objectif, n'y aurait-il pas lieu, pour le gouvernement du Québec, d'être stratégique et de conclure des ententes, cependant légales, avec les compagnies pharmaceutiques novatrices? Ces ententes pourraient, par exemple, prévoir un remboursement plus important de nouveaux médicaments en échange d'un investissement important, réel et renouvelable, dans le secteur de la recherche biopharmaceutique au Québec.

Un tel investissement permettrait de contribuer à la santé économique du Québec et, incidemment, à la santé de sa population.

* Elle est chercheure associée à la chaire en droit de la santé et gouvernance de l'Université de Sherbrooke ainsi qu'au groupe de recherche le CIRANO.