La crise du sous-financement du Service de police de la Ville de Montréal devrait nous amener à nous poser une question des plus fondamentales: la sécurité publique n'est-elle pas un service public d'une assez grande importance pour la collectivité pour être administré par l'entité gouvernementale qui en est fondé de pouvoir?

La crise du sous-financement du Service de police de la Ville de Montréal devrait nous amener à nous poser une question des plus fondamentales: la sécurité publique n'est-elle pas un service public d'une assez grande importance pour la collectivité pour être administré par l'entité gouvernementale qui en est fondé de pouvoir?

On pourrait pousser la question en se demandant si la société de droit dans laquelle nous vivons ne devrait pas garantir à tout citoyen une certaine homogénéité dans la prestation de service de sécurité publique.

Comme, d'un point de vue constitutionnel, les municipalités ne sont que des « sous-traitants » dans des champs de compétence provinciale, il est pertinent de nous poser la question, à une ère où la sécurité publique est devenue si cruciale, mais également si coûteuse:  les municipalités ont-elle la solidité morale et administrative pour gérer pareil service public?

On peut critiquer la morale de nos politiciens provinciaux et fédéraux, mais, de par leur proximité avec leurs citoyens, les politiciens municipaux sont plus enclins à subir les influences de tout un chacun. À une certaine époque au Québec, les maires de petites municipalités pouvaient compter sur leur propre corps de police et ils s'enorgueillissaient de cette puissance qui était associée à leur fonction. Les cafouillages se faisaient légion.

Sous l'influence du modèle français où la Gendarmerie nationale couvre la totalité de l'Hexagone, la Sûreté du Québec a voulu à la fin des années 90 mettre un terme à ces inégalités dans la qualité des services de sécurité publique offerts aux citoyens québécois.

Toutefois, quelque part dans l'engrenage législatif, la mesure législative qui est née de cette volonté, la Loi sur la police du Québec de 2001, s'est plutôt avérée un exercice de compromis. Les petites municipalités ne pouvaient alors plus être dotées de la puissance du badge (comme le voulait la SQ), mais les regroupements de petites municipalités (MRC), les moyennes villes et les grandes villes pouvaient toujours être dotés de «leur» force de police selon certains paramètres (comme le voulaient les puissantes municipalités).

Depuis ce temps, le plus gros des petits corps de police du Québec, le SPVM, n'a cessé de nous faire la démonstration que le législateur provincial n'aurait pas dû tenter de ménager la chèvre et le chou. On a créé des escouades de plusieurs policiers pour soi-disant s'occuper de la sécurité routière. Ce qu'il y a de bien avec la sécurité routière, pour une grande ville comme Montréal, c'est qu'il n'y a pas d'enquête à faire, pas de longues procédures judiciaires, mais de l'argent qui entre dans les coffres de la ville à la pelletée. Pourquoi consentir de réels efforts pour enquêter sur les réseaux de voleurs, de proxénétisme et le crime organisé quand on peut collecter des taxes déguisées?

Résultat : on coupe les enquêtes sur les réseaux, le crime organisé et les crimes économiques et on met de l'avant des initiatives permettant de limiter le trou que laisse le corps de police dans le budget de la ville. On va mettre jusqu'à offrir nos valeureux policiers aux plus offrants, ce que l'on appelle joliment la «commercialisation de nos services».

Que le gouvernement provincial ait le courage de terminer ce qu'il a commencé et que la Sûreté du Québec réponde «présente» lorsqu'on lui demandera d'assurer la sécurité publique sur l'ensemble du territoire québécois.