La Commission spéciale sur la question de mourir dans la dignité a entrepris ses travaux. La grande participation a révélé un vif intérêt face à la question délicate de la fin de vie et de l'euthanasie. Une typologie se dessine face à cette question complexe.

La Commission spéciale sur la question de mourir dans la dignité a entrepris ses travaux. La grande participation a révélé un vif intérêt face à la question délicate de la fin de vie et de l'euthanasie. Une typologie se dessine face à cette question complexe.

Le premier groupe adhère à la position suivante: la vie au premier plan. Pour ces personnes, la vie importe davantage que l'autonomie personnelle. Il convient d'accueillir la vie sans chercher à en maîtriser les étapes. Autrement dit, la vie n'appartient pas aux personnes. Ce choix philosophique est bien représenté par la doctrine officielle de l'Église catholique romaine.

Un second groupe adopte une autre posture: l'autonomie des personnes en premier lieu. Bien enracinée dans une philosophie libérale occidentale, ce groupe considère que l'autonomie personnelle fait en sorte que la vie appartient avant tout aux individus. Ainsi, tout être humain est maître de sa vie et de sa mort. Dans cette perspective, la personne peut choisir de mettre fin à ses jours en fonction de ses valeurs et croyances personnelles.

Une troisième école procède selon un autre paradigme. La personne n'est pas considérée comme un individu isolé, mais comme un «système» qui se construit grâce à une toile relationnelle de vie. Cette approche met également l'accent sur l'accompagnement des proches de la personne. Sans s'opposer par principe à l'euthanasie ou le suicide assisté, ce point de vue attire l'attention sur les dérives potentielles que comporte une légalisation tous azimuts de l'euthanasie. J'abonde en ce sens.

Dans notre contexte néoconservateur où le critère éthique primordial relève de la logique du moindre coût financier, n'y a-t-il pas un danger de glisser vers un type d'eugénisme économique justifié par la compassion, certes réelle, face à la souffrance? Cela ne camouflerait-il pas l'inhumanité de choix socioéconomiques envers des personnes vulnérables, improductives et donc inutiles selon une rationalité capitaliste? N'y a-t-il alors un risque de passer du droit au devoir de mourir? Face aux possibles dérapages, ne s'avérerait-il pas plus opportun d'adopter la voie de la Colombie-Britannique où les procureurs ne poursuivent que si les causes interpellent l'intérêt public? Une possible décriminalisation devrait également être étudiée.

La question de mourir dans la dignité m'apparaît piégée puisque l'enjeu fondamental ne consiste-t-il pas plutôt à vivre dans la dignité (entendue au sens d'une relative autonomie interrelationnelle) pour tout être humain? Cela intègre nécessairement la fin de vie. Selon cette optique, il devient urgent de rendre davantage accessible les soins palliatifs et de confort pour les personnes souffrantes (pourquoi réserver les soins de confort uniquement à fin de vie?).

Le débat actuel s'avère fondamental, comme l'exprime le théologien Hubert Doucet: «Que voulons-nous comme société: des services de santé répondant à toute demande individuelle ou des services de santé favorisant des soins humains, dans nos divers moments de fragilité et tout au long du parcours de vie?» Collectivement, le choix nous revient.