M. Boisvert, soyez rassuré, je suis tout comme vous l'un de ceux qui croient en la réhabilitation des criminels. Par contre, je ne fantasme pas sur celle-ci. Elle doit être complémentaire à l'incarcération, car notre justice repose avant tout, dans le cas des crimes sévères, sur l'application de peines proportionnelles à la gravité du geste posé et sur la protection de la société.

M. Boisvert, soyez rassuré, je suis tout comme vous l'un de ceux qui croient en la réhabilitation des criminels. Par contre, je ne fantasme pas sur celle-ci. Elle doit être complémentaire à l'incarcération, car notre justice repose avant tout, dans le cas des crimes sévères, sur l'application de peines proportionnelles à la gravité du geste posé et sur la protection de la société.

Le Canada dépense annuellement 2,5 milliards de dollars dans ses programmes de réhabilitation et de réinsertion des criminels. Environ 40% des pensionnaires des prisons fédérales sont des récidivistes. Dans une récente évaluation des programmes de réinsertion sociale faite par le Service correctionnel canadien, il est écrit: «Nous doutons de l'efficacité des mesures dans la réinsertion.»

Au moment où la majorité des Canadiens critiquent ouvertement nos systèmes de justice et carcéraux, pouvons-nous, à tout le moins, nous interroger sur le fait de savoir si les Canadiens en ont pour leur argent? Pouvons-nous exiger plus de rigueur, plus d'imputabilité et de responsabilité de la part des administrateurs ou l'opinion publique doit-elle être choquée chaque fois qu'un meurtre prévisible est commis, comme celui de Jean-Paul Bussières par Daniel Blais, un récidiviste en liberté illégale, dans le village d'Armagh le 19 mai dernier?

Entre le camp des victimes et celui des criminels, ma pensée est claire et mon action politique évidente: j'ai choisi le camp des victimes. La Charte des droits et libertés défend très bien les criminels et l'État les soutient admirablement bien dans le processus judiciaire. Au Québec, une famille dont un proche est assassiné reçoit comme aide du gouvernement 3400$ pour enterrer la dépouille. Le même gouvernement dépensera environ 50 000$ pour défendre le criminel.

De plus, depuis mon implication publique dans la reconnaissance des droits des victimes d'actes criminels, jamais je n'ai attaqué les droits des criminels. J'ai toujours défendu le principe qu'il ne faut pas déshabiller Jacques pour habiller Jean. Par contre, j'ai toujours dénoncé les privilèges que le système reconnaissait de plus en plus aux criminels: compte en double du temps présentenciel, libérations de la dernière chance, libérations d'office, peines concurrentes.

Quant au projet de loi sur l'abolition des pensions de vieillesse pour les criminels, je comprends que c'est un programme universel. Mais, lorsque nous reconnaissons aux citoyens qui ont commis un crime le droit à une pension quand leurs besoins de base sont déjà comblés par l'État, nous créons un double standard par rapport aux honnêtes citoyens. Ne pas agir dans ce sens nous aurait semblé irrespectueux envers les contribuables. Quant aux proches des criminels visés, l'État maintient toujours sa responsabilité de les soutenir financièrement.

Dans les faits, la philosophie politique du Bloc en matière de justice et de sécurité publique repose essentiellement sur celle de son critique, Serge Ménard. M. Ménard, qui a été ministre de la Sécurité publique du Québec, a fait des prisons québécoises un véritable système de portes tournantes comme le démontre si bien Yves Thériault dans son livre Les portes tournantes. Le premier réflexe du Bloc n'est surtout pas de penser en premier lieu aux victimes, mais avant tout de défendre le statu quo, ce qui rend la vie plutôt facile aux criminels. M. Ménard, n'est-il pas le même ministre qui a aboli les programmes de réhabilitation dans les prisons du Québec? Comment peut-il aujourd'hui en défendre aveuglément les bienfaits?

Je n'ai aucun plan, si ce n'est de participer avec ce gouvernement à rééquilibrer notre système judiciaire. Pour l'avoir subi moi-même et après avoir vu tant de familles souffrir en tentant de comprendre sa logique, le seul plan que j'ai, c'est de parler en leur nom. Eh oui, la reconnaissance des droits des victimes passe par un meilleur soutien avec des indemnisations justes et équitables. Cette responsabilité relève avant tout des provinces. Les droits des criminels relèvent, quant à eux, du gouvernement fédéral et ils sont très bien encadrés.

Les victimes d'actes criminels ont enfin une voix au Parlement. Il faudrait peut-être s'en réjouir.

* Sénateur conservateur, l'auteur réplique à la chronique d'Yves Boisvert intitulée « Le plan Boisvenu », qui a été publiée le 8 juin.