Avez-vous déjà vu ça, vous, quelqu'un tué par la pollution? C'est ainsi que se concluait un commentaire sur un blogue, arguant qu'on en avait assez des «écochondriaques». En cette Journée de l'air pur, cette question ne pourrait être plus pertinente.

Avez-vous déjà vu ça, vous, quelqu'un tué par la pollution? C'est ainsi que se concluait un commentaire sur un blogue, arguant qu'on en avait assez des «écochondriaques». En cette Journée de l'air pur, cette question ne pourrait être plus pertinente.

La preuve directe des effets délétères de la pollution sur la santé humaine est souvent difficile à faire sauf dans des cas d'intoxication aiguë. Il y en a plusieurs exemples dont le plus tristement célèbre est le «Great Smog of London» de décembre 1952, qui a entraîné 3000 décès en une semaine. Au total, 12 000 décès ont été attribués au smog au cours de l'année qui a suivi.

Ces intoxications, comme plusieurs autres du même genre, ont eu l'effet d'inciter des chercheurs à examiner l'effet de la pollution de l'air sur la santé, à plus faible dose, mais sur une période de temps plus longue.

L'action de brûler des combustibles fossiles charge l'air ambiant de particules fines dont l'effet sur la santé cardiovasculaire commence à être bien compris. Dans le monde, des expériences ont été faites par différentes équipes de recherche. Les données se recoupent. Respirer des exhalations de tuyau d'échappement augmente la coagulation du sang et le stress oxydatif des artères. Il en résulte de la constriction des artères, une baisse de la circulation dans les vaisseaux du muscle du coeur, une hausse de la pression artérielle, d'arythmies et de thromboses.

Par ces effets, plusieurs études démontrent que la pollution induit de l'athérosclérose, un durcissement et blocage des artères qui peuvent éventuellement mener à une insuffisance de sang aux tissus et organes.

Les études menées en 2007 par une scientifique allemande démontrent que les gens vivant à moins de 50 mètres d'une route achalandée ont 63% plus de calcifications coronariennes que ceux vivant à plus de 200 mètres.

Cette étude et d'autres répondent à une question que je me posais depuis des années lorsque je pratique des cathétérismes cardiaques. Pourquoi certains patients ont-ils tant de calcifications dans leurs artères et d'autres pas, malgré des facteurs de risque en apparence semblables? La réponse réside dans le fait que nos corps réagissent aux conditions environnementales.

En effet, des études menées en Chine, à Taiwan, au Portugal, en Finlande et dans neuf grandes villes américaines démontrent qu'une hausse du taux de particules fines dans l'air ambiant entraîne une hausse de mortalité par accident vasculaire cérébral. De plus, à la suite d'épisodes de pollution atmosphérique à Boston, on a remarqué une hausse de 48% des infarctus aigus dans les deux heures et de 69% dans les 24 heures suivant ce pic.

Ceci m'expliquait aussi pourquoi nos urgences deviennent bondées lors des épisodes de smog. Depuis cette publication, lorsque je suis de garde à l'urgence, je regarde les prévisions météorologiques pour le smog. Je peux souvent prédire si ma journée sera occupée, selon les données de qualité de l'air.

À l'inverse, l'effet bénéfique des normes antipollution peut aussi être mesuré: une diminution de 10 µg/m3 de particules fines résulte en une amélioration de 0,6 an de vie. Ainsi, des mesures pour améliorer la qualité de l'air auraient un effet semblable aux mesures anti-tabac mises en place dans les espaces publics et qui ont entraîné des baisses d'hospitalisations pour infarctus aigus.

Il n'appartient pas au cardiologue de déterminer le meilleur moyen de réduire la pollution de l'air. Mais il apparaît clair que les sources d'énergie alternatives doivent être rapidement développées et que le vert n'est pas qu'un nouveau «branding», c'est aussi une question de santé.