En vacances ou en week-end, prendre le temps de vivre autrement. Fuir un moment la ville. S'évader à la campagne, se ressourcer, changer d'air. Quitter le monde urbain pour le chalet ou la maisonnette rurale. Adopter quelque temps une vie rustique somme toute confortable. À destination, moment rêvé, humer les odeurs champêtres, saisir les caresses de la brise saline et perdre son regard dans la vastitude maritime. Cap-Blanc, Ruisseau-Jureux, Anse-au-Sac, Cap-aux-Corbeaux, Petite-Martine. Charlevoix... à savourer aussi en villégiature!

En vacances ou en week-end, prendre le temps de vivre autrement. Fuir un moment la ville. S'évader à la campagne, se ressourcer, changer d'air. Quitter le monde urbain pour le chalet ou la maisonnette rurale. Adopter quelque temps une vie rustique somme toute confortable. À destination, moment rêvé, humer les odeurs champêtres, saisir les caresses de la brise saline et perdre son regard dans la vastitude maritime. Cap-Blanc, Ruisseau-Jureux, Anse-au-Sac, Cap-aux-Corbeaux, Petite-Martine. Charlevoix... à savourer aussi en villégiature!

Autre pub éthérée pondue par l'une de ces pullulantes agences polisseuses d'image? Pas du tout. C'était vraiment ça la villégiature charlevoisienne d'avant. La véritable, la réputée, l'historique, la légitime. Gabrielle Roy, Félix-Antoine Savard, Clarence Gagnon, Pierre Perreault et plusieurs autres l'ont vécue, illustrée, écrite, déclamée. Bienheureux sont-ils aujourd'hui d'être épargnés du désolant spectacle de la mainmise grandissante sur leur pays bien-aimé de ces très envahissants et gluants développeurs immobiliers qui, en ce moment même, travaillent d'arrache-pied à charcuter le territoire pour le marchander ensuite à priX d'or, morceau par morceau bien juteux sur le lucratif marché de la résidence secondaire dite «de villégiature». Villégiature «full equip», il va sans dire.

Charlevoix bucolique, oubliez ça, c'est périmé. Les cottages de Pointe-au-Pic, et bien d'autres choses ici, ont été rangés au rayon de la nostalgie et du folklore. Décidément, on n'a plus la villégiature qu'on avait. La suite du monde de Pierre Perreault ne sera-t-elle qu'un rendez-vous manqué? «Car nous sommes d'une race qui ne sait pas mourir!»: ça reste à voir avec les concitoyens, Menaud. Savais-tu, mon cher maître-draveur nationaliste, qu'à Chamonix, on a dû mettre sur pied un programme de réintroduction... du Chamoniard?! Au Temps d'une paix succède maintenant le «Temps du bar ouvert» pour les investisseurs, petits, moyens et grands, à l'affût de la bonne affaire. Aux citoyens de suivre, marche ou crève.

Après Whistler et Tremblant, c'est à notre tour d'être le nouvel Eldorado immobilier. En effet, juste au-dessus de nos têtes citoyennes se trouve suspendu, avec tout ce qui vient inévitablement avec, le plus gros objet récréotouristique en devenir du Québec: le mégaprojet de Groupe Le Massif. Un «anti-resort» vert forêt, rassembleur, authentique, respectueux, etc... disent-ils. Aussi, largement financé par nous tous, camarades contribuables.

Le catalogue international de Sotheby's, la plus ancienne société d'enchères au monde, proposait encore récemment l'acquisition dans mon voisinage, d'un terrain avec vue sur la station de ski. Le Massif de Charlevoix à des fins de développement de villégiature de prestige au coût de 8,5 millions de dollars. Pas très loin non plus, à Cap-aux-Corbeaux, la firme en laisserait partir un à 5 millions pour les budgets un peu serrés. À qui la chance? Puis, il y a ce fameux terrain aux Éboulements offert en vente à 2,75 millions. J'y ai travaillé à l'époque pour le compte du gouvernement du Québec qui a investi de nos deniers afin d'y aménager une magnifique forêt modèle... aujourd'hui entre les mains de développeurs immobiliers!

Aux sceptiques: quand vous nous rendrez visite, prenez donc le temps d'aller explorer le bordel immobilier de la Petite-Martine à Petite-Rivière-Saint-François, là où il n'y aura jamais plus rien de petit. Vous y constaterez, en parcourant les dizaines de kilomètres de nouvelles routes (attention de ne pas vous perdre) de l'ensemble des développements «résidentiels de villégiature», exactement l'opposé de ce qu'on nous avait juré qu'il n'arriverait jamais ici.

Et ce n'est qu'un début, faites leur confiance. Le choc immobilier est particulièrement brutal à cet endroit. Le village achève de se vider tristement de sa substance sous les yeux de tous. Gabrielle Roy doit giguer dans sa tombe.

Le piano ne passe tout simplement pas dans la porte. Notre modeste MRC de 13 500 habitants croule sous l'avalanche de projets immobiliers de toutes sortes pendant que les moins fortunés trouvent refuge à l'intérieur des terres, là où les propriétés sont encore abordables. Baie-Saint-Paul n'offre que peu d'opportunités aux jeunes familles de s'établir alors que les promoteurs privés visent la clientèle cossue.

Tout va bien dans le meilleur des mondes selon la plupart de nos dirigeants politiques et socio-économiques aux idées de grandeur. Dans un contexte monolithique et unidirectionnel où tout le monde se connaît, les remises en question s'avèrent périlleuses. Les critiques sont souvent perçues comme séditieuses et antidéveloppement, comme s'il y avait une sorte d'omerta.

Quant au privilège du statut mondial de Réserve de la biosphère qu'accorde l'UNESCO à Charlevoix, on doit malheureusement constater qu'il sert beaucoup plus à mousser les ventes des promoteurs et commerçants qu'à protéger l'intégrité du territoire et la qualité de vie ici. Développement durable ou pas endurable? Voilà la question.

«La chétive pécore s'enfla si bien qu'elle creva.» – Jean de la Fontaine