La Fédération des médecins spécialistes, comme l'éléphant caché derrière un arbre, tente de nous faire avaler son appétit salarial en jouant à l'économiste du dimanche dans une campagne web/télé où le simplisme côtoie la désinformation.

La Fédération des médecins spécialistes, comme l'éléphant caché derrière un arbre, tente de nous faire avaler son appétit salarial en jouant à l'économiste du dimanche dans une campagne web/télé où le simplisme côtoie la désinformation.

En effet, nos médecins-économistes soutiennent sans sourciller que le système dispose (disposerait, disposera, c'est selon) de sommes importantes qu'il lui suffit d'aller cueillir comme des fleurs dans un pré. Ainsi, il suffirait au gouvernement de taxer la malbouffe à hauteur de 15% pour engranger 350 millions de dollars et les bouteilles d'eau à 20 cents pour un autre 200 millions. Ainsi 500 millions de plus dans les coffres de l'État en criant lapin. Enfin, pas tout à fait 500 millions parce qu'une part (mais on évite de dire laquelle!) iront au paiement des salaires des spécialistes, si j'ai bien compris.

Mais nos spécialistes ne se contentent pas de fouiller dans nos poches, ils proposent, sans broncher, une taxe de 1 cent le kWh aux grandes entreprises manufacturières sans se préoccuper le moins du monde de l'impact désastreux que cela aurait sur l'activité économique dans son ensemble et sur les emplois en particulier, ni du fait que l'impact sera particulièrement senti en région.

Même idée brillante pour les entreprises grandes utilisatrices d'eau; une redevance et, hop, 78 millions de plus à offrir aux spécialistes. Même raisonnement simpliste pour la construction des routes et la loi sur les mines.

Lorsque vient le temps d'attaquer les médicaments génériques (secteur que je connais particulièrement bien), on ajoute la désinformation à la panoplie d'instruments simplistes. Ainsi, on pourrait économiser 300 millions en réduisant le prix des génériques au niveau de l'Ontario et de l'Alberta. Mais il y a là un os: une loi québécoise, vieille d'au moins 10 ans et à laquelle tous les fabricants de génériques se conforment, prévoit que le Québec doit bénéficier automatiquement du prix le plus bas au Canada. Le Québec est actuellement l'endroit au Canada où les prix des génériques sont les moins élevés. Pourtant, si on cherche à économiser sur les médicaments, il suffirait aux spécialistes de prescrire des génériques (lorsqu'il y en a, bien entendu) au lieu des très coûteux médicaments d'origine, et ce, sans recours à aucune loi, sans pénaliser qui que ce soit. On réaliserait instantanément une économie récurrente de près de 450 millions par année. Le Québec atteindrait ainsi un niveau d'utilisation des génériques égal à celui du reste du Canada (26% au lieu du 17,7% actuel). Ils pourraient d'ailleurs commencer dès cet été en prescrivant la version générique du Lipitor que le gouvernement continuera, lui, à rembourser au prix le plus fort: un coût direct de 10 millions par mois pour les 22 prochains mois. De cette manière, les spécialistes pourraient montrer patte blanche et s'attirer cette sympathie dont ils auront grand besoin dans les semaines à venir.

Cette campagne (dont le coût demeure un secret bien gardé) en dit finalement plus long sur le désarroi des spécialistes que sur les secteurs économiques qu'elle prétend semoncer. Elle rejaillit négativement sur l'image de ces professionnels de la santé et rappelle sournoisement l'importance des sommes qui leur sont versées par le gouvernement.

Mon grand-père disait «Quand on crache en l'air...»