La publicité de Honda ne ment pas. Chaque véhicule est doté d'un cerveau... derrière le volant. Malheureusement, sur nos routes, pour reprendre la réplique de l'humoriste Martin Matte, ce n'est pas toujours le "gros modèle"... comme à la télé !

La publicité de Honda ne ment pas. Chaque véhicule est doté d'un cerveau... derrière le volant. Malheureusement, sur nos routes, pour reprendre la réplique de l'humoriste Martin Matte, ce n'est pas toujours le "gros modèle"... comme à la télé !

Les accidents tragiques des derniers jours sur les routes de l'Outaouais ont un dénominateur commun, le comportement humain. Cette hécatombe est d'autant plus grave qu'elle est la somme tragique d'une foule de petits gestes ou de décisions, parfois anodins, parfois criminels, aux conséquences incalculables. Les accidents de Gracefield, où une jeune ambulancière a perdu la vie après avoir été heurtée par un chauffard au volant d'un véhicule volé, celui du boulevard Maloney, qui a fait une innocente victime à la suite d'une course de rue, et celui de la route 307, après une manoeuvre irréfléchie, illustrent bien l'ampleur du problème.

Ce sont les trois facettes d'un même problème, celui des comportements au volant. Ils illustrent bien que, dans la plupart des cas, un accident n'en est pas vraiment un quand le facteur humain est en cause. Et cette "culture" se décline de multiples façons, en imprudence, en incompétence, en immaturité, en poussée de testostérone et en vitesse. Or, dans la plupart des cas, ce n'est pas tant la persuasion que le bâton qui donne des résultats.

Au cours des dernières décennies, on a dépensé des fortunes pour améliorer les routes, installer de nouvelles technologies dans les véhicules, légiférer pour modifier certains comportements, imposer des amendes plus salées, lancer des campagnes de publicité, etc. Toutes ces mesures ont eu des effets généralement positifs sur le bilan routier du Québec au cours des ans, dont une diminution de 15,7 % des décès et de 23,5 % des blessés en 2007. Par contre, en Outaouais, au cours des cinq dernières années, le bilan est resté substantiellement le même, sans aucune amélioration.

Dans l'ensemble, les campagnes pour le port de la ceinture et contre l'alcool au volant ont également eu des résultats notables. Et pourtant, les deux conducteurs impliqués dans l'accident de la 307, mardi matin, n'avaient pas bouclé leur ceinture, même si le port de la ceinture n'aurait pas sauvé la vie de la personne décédée. Et il faut espérer que l'interdiction du cellulaire au volant (84 contraventions ont été émises à Gatineau en juillet) donnera des résultats.

Mardi, la Société de l'assurance automobile du Québec et la Sûreté du Québec ont mis en place un nouveau système de repérage des numéros de plaque d'immatriculation pour identifier les automobilistes dont le permis n'est pas valide. Vérification faite à la SAAQ, près de 300 000 conducteurs (sur 5 millions) conduisent alors que leur permis fait l'objet de suspension de divers types comme des amendes impayées, des révocations, des causes médicales ou des offenses criminelles. C'est troublant.

Bientôt, après 70 pays, on verra (ré-) apparaître au Québec les cinémomètres ou radars photo dans certaines zones à fortes concentration d'accident et à certaines intersections. Il y en a des milliers en France. Mais, ici, les automobilistes dans les zones visées seront avertis de leur présence et, comme pour le cellulaire, on ne sanctionnera pas les fautifs dans les premiers mois de leur implantation.

Un porte-parole du ministère des Transports soulignait que ces radars photo sauveront les gens malgré eux et, à l'image de la France, devraient améliorer substantiellement le bilan routier. Alors, pourquoi ne pas les généraliser à la grandeur du territoire, sans trop en prévenir les automobilistes et sans période de grâce ?

C'est oublier que seule la volonté (ou le courage) politique peut changer les choses dans ce dossier. On veut changer les comportements, mais on ne veut pas indisposer cinq millions d'automobilistes qui, un jour ou l'autre, se retrouvent devant un bulletin de vote. Le cerveau derrière le volant, parfois imparfait et limité, est doté d'une phénoménale mémoire quand vient le temps de choisir ses élus ou de leur passer des messages. Pourtant ce n'est pas tant un changement de culture qu'une taloche dont ce "cerveau" a le plus besoin quand il prend le volant.

pbergeron@ledroit.com