Au moment où vous lirez ces lignes, la rue des Ursulines aura été rendue à ses résidents. Nous avons été les otages, encore une fois, du Festival de Trois-Rivières durant 11 jours et 11 nuits. Et nous aurons aussi récupéré notre beau petit parc. C'est sensé être un parc public, mais impossible d'y entrer sans un passeport du Festival, durant ces 11 jours-là.

Nos maisons sont envahies par le son de cette musique que nous ne voulons pas entendre. Chez moi, je n'entends même pas sonner le téléphone, pas plus que je peux écouter la télé.

Et comment allons-nous reprendre notre beau petit parc? Le gazon dévasté par le grand plancher de bois qui a été mis là pour asseoir cette horrible tente blanche permettant aux hautes instances de venir prendre l'apéro. Dommage que le ridicule ne tue pas.

Avoir les moyens, j'engagerais 11 groupes différents et je les enverrais jouer et chanter ( le mot est fort pour qualifier certains chanteurs, la plupart d'ailleurs) durant 11 jours et 11 nuit devant votre résidence, monsieur le maire, et aussi devant chez toi, Stéphane Boileau.

Je prendrais, moi aussi, les moyens pour bloquer vos rues respectives. Je vous donnerais des laisser-passer pour que vous puissiez y entrer, mais je vous les ferais courir vous autres aussi vos laisser-passer.

Il n'y aurait pas beaucoup de personnes, dans vos rues respectives, qui seraient très heureuses d'entendre la musique que je les forcerais à entendre.

Et le bon peuple applaudit. On lui donne des jeux. On lui dit comment s'amuser. Le bon peuple est heureux. Aucun effort cérébral. On pense pour lui. Quand j'écoute la musique que j'aime, je n'ai pas besoin que tout le monde à côté de moi l'entende aussi.

Ce n'est pas seulement durant deux heures par jour que nous l'entendons cette musique que nous ne voulons pas entendre, c'est une partie de l'avant-midi pour la pratique, c'est aussi une partie de l'après-midi, encore de la pratique, et ensuite ça commence.

L'horreur commence. Ils se pensent bons. Ils y vont donc à fond de train.

Nous sommes en pleine saison touristique. On a défiguré la rue des Ursulines durant 11 jours et 11 nuits. On a défiguré notre beau petit parc.

On y a mis de hautes clôtures de métal toutes rouillées. Une horreur. Bienvenue les touristes ! «Regardez, les touristes, ici, c'est la rue des Ursulines. Oui, c'est le quartier historique. Ordinairement, c'est beau et c'est paisible, sauf durant le festival d'horreur de Trois-Rivières. Vous trouvez vous aussi que c'est moins attirant quand c'est défiguré comme ça ? On trouve ça, nous aussi. Mais il y a deux personnes qui prennent plaisir à venir défigurer ce si beau coin de Trois-Rivières, chaque année. Supposément que ça fait vendre de la bière sur la rue des Forges. Ah! vous pensiez que le nom de la rue des Forges était la rue des Terrasses ? Tiens, c'est une bonne idée. Le maire va sûrement y voir. Ça situerait plus vite l'endroit.

Bon séjour à Trois-Rivières, les touristes. Revenez vous promener sur la rue des Ursulines. Elle redeviendra normale. Le cirque s'en va. Du moins nous l'espérons.»

Hélène LeBoeuf

Trois-Rivières