Le soir du 21 décembre, Line Millier parcourra la ville avec son équipe de bénévoles pour distribuer des articles d'hiver et de la nourriture aux oubliés dans la rue. Parce que, dit-elle, c'est Noël pour tout le monde!

L'esprit des Fêtes, entend-on, c'est l'amour, la joie, le partage... Certains, comme Line Millier, prennent ces mots au pied de la lettre et ne se contentent pas de les clamer. «Ça fait partie de moi. J'ai toujours essayé de redonner. Depuis que mon garçon est né, c'est encore plus présent», dit cette chef de famille monoparentale, qui a voulu montrer à son fils le véritable sens du mot «partage».

Chaque Noël, depuis trois ans, cette mère Noël est en mission: distribuer des vêtements chauds aux sans-abri et partager avec eux l'esprit des Fêtes en offrant de la nourriture, des boissons, et parfois même un petit remontant, à ceux qui n'ont rien. «Dans les refuges, dit-elle, ils sont bien accueillis. Le problème, c'est ceux qui restent dans la rue. Et ils sont nombreux.»

Elle a eu envie de leur donner un répit et de leur dire que quelqu'un pensait à eux.

«Moi, j'ai pas de famille. Le temps des Fêtes est une période difficile pour moi. Je ne peux pas croire qu'il y a des gens qui vivent ça non seulement seuls, mais avec rien.»

Visiblement, elle n'est pas la seule à s'en émouvoir. Son Noël des sans-abri rassemble de plus en plus de gens qui contribuent à sa mission pour le simple plaisir de faire du bien.

La force du groupe

Il y a trois ans, Line a démarré ce projet en lançant un appel à tous sur Facebook. Ce dernier a vite trouvé écho dans son entourage. «J'ai couru le Grand Montréal pour récolter des manteaux», se rappelle-t-elle. Les dons ont aussi servi à acheter des cartes cadeaux, des mitaines et de la nourriture, déposés dans des sacs à bandoulière qui ont disparu en moins de deux.

«La deuxième année, je m'y suis prise d'avance, poursuit Line. On a reçu plus d'argent et moins de choses usagées. On a pu acheter ce dont on avait besoin.» L'année dernière, après la soirée de distribution, Line a rencontré une dame tout juste sortie de l'hôpital avec deux doigts en moins en raison d'engelures. «Je n'avais plus de mitaines à lui donner. Cette année, je me suis dit que je n'en manquerais pas.»

La récolte de dons est bien amorcée : les manteaux, mitaines, bottes, sacs de couchage, cartes cadeaux et autres objets achetés ou récoltés grâce aux dons s'empilent au fur et à mesure que l'événement approche. Cette grande fête des sans-abri ne mobilise plus uniquement les amis, mais aussi les amis des amis, quelques entreprises et une école.

https://www.facebook.com/events/243657912969786/

Donner a un effet boule de neige, constate Line. «C'est comme si ça prenait la validation d'une personne pour en amener une autre. C'est le pouvoir du groupe. Ce que je souhaite, c'est que chacun fasse une petite collecte dans son entourage. C'est comme ça qu'on devient efficace.»

Un appel à la solidarité

Lors de notre entretien, des bottes achetées grâce à un don de 1000 $ étaient empilées dans la voiture de Line jusqu'au plafond. «Ma maison, c'est l'enfer! Tout déborde. Une amie m'a donné le code de son garage pour que j'y entrepose des articles. Elle n'aurait pas dû», dit-elle en riant.

Les semaines et jours précédant sa grande distribution de cadeaux, Line, qui est aussi entrepreneure, parcourt la ville pour récolter les dons et faire l'achat d'accessoires et de vêtements: elle déniche trois sacs de couchage dans un magasin, cinq dans l'autre... Un défi. Surtout quand on le fait à temps perdu tout en gérant son entreprise et sa famille.

Mais le jeu en vaut la chandelle, selon mère Noël. «Le feeling que tu as quand tu retournes chez toi après... je me suis dit que jamais je ne me passerais de ça. J'ai l'impression de faire quelque chose d'utile, dit-elle. Je sais que la plupart des parents ont ce souci de montrer à leurs enfants combien ils sont chanceux. C'est mon cas. On ne peut pas juste se contenter de dire "c'est triste". Ce n'est pas assez. Si on veut que ça change, il faut bouger.»

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Line Millier et son fils Xavier