Camille Papineau Maurais a 17 ans. Sainte-Justine, c'est un peu comme sa maison. Sa deuxième maison. La preuve: ici, des visiteurs lui demandent régulièrement leur chemin. Il faut dire qu'elle connaît tous les recoins. Et qu'elle fait un peu partie des meubles.

Nous l'avons rencontrée hier, à quelques heures de l'illumination du Grand sapin, une campagne de financement de la Fondation CHU Sainte-Justine pour venir en aide aux familles comme la sienne, qui fréquentent l'hôpital un peu, beaucoup, intensément.

En marchant à travers le dédale des couloirs de l'immense hôpital, la jeune fille nous pointe un mur de fenêtres: «C'est ici que je préfère voir le coucher du soleil», dit-elle doucement. Le plus naturellement du monde, elle nous jase de ses amis d'étages, ou de son pneumologue, de sa nutritionniste et de ses infirmières, qu'elle connaît depuis toujours.

Disons que Camille n'a pas un quotidien ni des fréquentations typiques. Camille a la fibrose kystique. Depuis toujours. Et pour toujours.

La fibrose kystique est une maladie chronique des poumons pour laquelle il n'existe aucun traitement curatif. C'est d'ailleurs la maladie mortelle la plus répandue chez les enfants et les adolescents au Canada. On a du mal à le croire, en voyant cette souriante jeune fille, qui nous parle de sa grande amie Éloïse, rencontrée ici, de sa passion pour les chevaux et de son rêve de devenir un jour vétérinaire. «C'est mon plus grand rêve, dit-elle, après une petite quinte de toux, seul et unique indice de sa maladie. Je sais que la maladie ne va pas m'empêcher d'arriver à ça.»

Diagnostiquée à 6 mois («Tout ce que ma mère savait de la fibrose kystique, c'est que la nièce de Céline Dion en était décédée... Rien d'autre.»), Camille a passé toute sa vie à faire des allers et retours entre l'hôpital et sa maison. Le mois dernier, elle a dû venir ici cinq fois. «Pour des rendez-vous divers, dans des cliniques différentes», dit-elle, en toussant doucement encore. Cet automne, elle a été hospitalisée trois semaines, pour cause d'infection pulmonaire.

«Cette année, j'ai été hospitalisée trois fois. Mais ça dépend des années, des saisons, des bactéries [...]. Si tout va bien, j'ai juste rendez-vous aux deux ou trois mois.»

En plus des rendez-vous divers, Camille doit prendre une batterie de médicaments, matin et soir. «En tout, ça me prend deux heures et demie», évalue-t-elle, en nous énumérant sa trentaine d'ordonnances, antibiotiques, vitamines, traitements d'inhalation et autres exercices de physiothérapie quotidiens. «Je prends aussi de l'insuline, parce que j'ai développé un diabète avec la maladie...»

Mais tout cela n'empêche pas Camille d'aller au cégep, en sciences de la nature, et de rêver de devenir un jour vétérinaire, donc, même si la maladie et les nombreux rendez-vous lui compliquent drôlement la vie. «J'ai une relation d'amour-haine avec cet hôpital, dit-elle. Autant j'ai fait des belles rencontres et oui, c'est ma deuxième maison, mais ça m'a beaucoup bloquée aussi dans plein d'aspects de ma vie...»

Toutes ces hospitalisations lui ont en effet fait rater beaucoup de temps d'école. De cours. Et d'examens. «Tu peux pas sortir, t'as aucun contrôle, c'est pas vraiment quelque chose que tu veux vivre à 17 ans...»

La magie des Fêtes

La semaine dernière, justement, elle n'avait vraiment pas envie de venir ici. C'était une mauvaise journée. Et elle se sentait triste. Et puis voilà qu'en arrivant, dans l'entrée, elle a vu le père Noël. Et une fée. Et on lui a donné un chocolat chaud. «Juste ça, ça m'a changée de mood en trois secondes, sourit-elle. Cette ambiance, ça a fait qu'en quelques secondes, je me sentais vraiment mieux...»

Son petit frère de 6 ans, lui aussi un habitué de l'hôpital à cause d'un déficit immunitaire, a vécu une même heureuse surprise à l'Halloween il y a quelques années, en croisant par hasard des superhéros dans les couloirs. «Il parle encore de Superman!», sourit-elle de plus belle.

Bref ce Grand sapin, c'est un peu tout ça. Une petite «source d'espoir et de magie», conclut Camille. «Et pendant un moment, tu oublies que t'as pas envie d'être là...»

Dix ans d'espoir en lumière

Le Grand sapin de Sainte-Justine fête cette année ses 10 ans. Jusqu'au 14 décembre, il s'illuminera progressivement, à hauteur des dons reçus, pour ensuite rester totalement illuminé jusqu'en janvier. L'objectif cette année est de dépasser les 150 000 lumières, vendues chacune à 5 $. Au fil des ans, cette campagne de la Fondation CHU Sainte-Justine a permis de récolter plus de 4 millions de dollars, afin de soutenir l'hôpital pédiatrique dans sa mission, d'appuyer le service social et d'aider les familles vulnérables.

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Photo André Pichette, La Presse

L'objectif de la campagne du Grand sapin de Sainte-Justine est de dépasser les 150 000 lumières, vendues chacune à 5 $.