Souder du bois? Oui, c'est possible : les Européens ont effectué des recherches depuis 1995 avec le chêne et le hêtre. Et on fait de même à l'Université Laval au département des sciences du bois et de la forêt, avec le bois de l'érable à sucre et celui du bouleau jaune.

C'est possible grâce à la lignine, la colle naturelle du bois, explique Benoit Belleville, finissant au doctorat et dont le projet porte sur les techniques d'assemblage de pièces de bois avec des goujons, sans colle, grâce à une technique et à une machine en instance de brevet développées en partenariat entre l'Université Laval, le Centre de recherche industrielle du Québec (CRIQ), l'École du meuble de Victoriaville et FP Innovations de Sainte-Foy.

Depuis trois ans, M. Belleville développe la technique de soudure pour fabriquer des meubles selon une technique d'assemblage qui donne des résultats aussi efficaces et performants que les panneaux collés avec des produits pétrochimiques, et qui est plus écologique.

«Nous avons fait des tests comparatifs et des essais en chambre de conditionnement avec nos produits et des panneaux collés. Les propriétés sont semblables en flexion et en résistance. Pour l'instant, la technique servira à faire des meubles comme des tables, des bureaux ou des lits de bébé [comme celui sur la photo]. On pense aussi que l'on pourrait développer la technique pour des éléments structuraux ou des utilisations extérieures avec des produits résineux. Cependant, il faudrait revoir les paramètres puisque chaque essence de bois réagit différemment.»

technique écologique

Côté écologique, les meubles assemblés selon cette technique peuvent être recyclés sans danger ou être déchiquetés à la fin de leur vie utile pour se retrouver dans la biomasse. Sans clous ni produits chimiques, ils ne briseront pas les déchiqueteuses et n'auront pas d'effets nocifs dans l'environnement comme les panneaux de particules, les panneaux collés ou le MDF.

La technique de soudure dépend de quelques éléments. Les trous sont plus petits (huit millimètres) que les goujons (10 millimètres). La vitesse d'insertion et la vitesse de rotation du goujon dans le trou produisent de la chaleur qui fait en sorte que les fibres se soudent d'un morceau à l'autre. La température par friction monte pour produire cet effet de colle naturelle qui soude les pièces ensemble. Cependant, la chaleur doit être inférieure à 280 degrés pendant l'insertion par rotation, sinon les pièces carbonisent. C'est alors qu'entre en jeu la machine étudiée au CRIQ, qui doit donner une vitesse de rotation constante pendant l'insertion malgré la friction sans dépasser la température maximale.

Dans quelque temps, on pourrait retrouver sur le marché des meubles québécois produits selon ce procédé. La technique permettrait, selon M. Belleville, de concurrencer les produits fabriqués en Chine avec des méthodes traditionnelles tout en étant rapide et écologique.

ytherrien@lesoleil.com