Une rénovation qui déraille? Dans bien des cas, l'entrepreneur est alors pointé du doigt. Mais est-il l'unique responsable des difficultés et bévues d'un chantier? Après avoir obtenu le témoignage de plusieurs propriétaires, nous avons contacté un regroupement d'entrepreneurs afin d'obtenir son point de vue.

André Gagné sait ce qui, souvent, suscite des conflits dans le domaine de la construction. C'est son métier: donner son expertise en cas de litige impliquant des entrepreneurs de la construction.

«Je ne fais que ça», résume le directeur, expertises techniques et service technique, de l'Association des professionnels de la construction et de l'habitation du Québec (APCHQ). «Il y a de très bons entrepreneurs dans le milieu de la construction et de la rénovation. Et, effectivement, il y en a d'autres qui sont malhonnêtes et incompétents. Mais en général, ces derniers ne sont pas des entrepreneurs qui sont dûment licenciés, qui font des affaires depuis des années et qui ont des références crédibles. Même les plus expérimentés peuvent commettre des erreurs [d'estimation, par exemple]. Mais il y a toujours deux côtés à une médaille. On rencontre aussi des clients qui gagneraient à être mieux préparés...»

Voici, en exemples, quelques-unes des erreurs typiques de consommateurs, relatées par M. Gagné.

«J'ai quelques idées»

«Il n'est pas rare qu'un entrepreneur se rende chez un client potentiel mal préparé pour une soumission. Il rencontre le propriétaire qui a un projet de rénovation, disons refaire sa cuisine, mais il n'a pas de plan ni de budget précis. Encore moins de modèles d'armoires et de finis présélectionnés. Seulement quelques idées...»

«Quand est-ce que vous pouvez commencer?»

«Imaginons que nous sommes au mois de novembre. L'entrepreneur soumissionnaire indique au propriétaire qu'il pourrait, par exemple, commencer les travaux en février. Le temps passe, et l'entrepreneur, qui doit gagner sa vie , rencontre d'autres clients qui, eux, sont préparés. Fin janvier, le premier rappelle pour confirmer qu'il le choisit pour sa rénovation. Il demande alors s'il est toujours prêt à entreprendre les travaux en février. Mais, entre-temps, l'entrepreneur a déjà accepté d'autres contrats...»

«Est-ce que tout est prêt?»

«Finalement, le propriétaire et l'entrepreneur s'entendent pour entamer les travaux de rénovation en mars. L'entrepreneur avertit son client que tout devra être prêt à son arrivée, à 7h le matin. Ainsi, dans la cuisine [à refaire], les vieilles armoires et le revêtement de sol devront avoir été enlevés. Surprise! Lorsque l'entrepreneur et ses travailleurs arrivent comme prévu à 7h, personne n'est encore levé, et rien n'a été fait. Un avant-midi de travail perdu...»

«Qui nettoie?»

«Bien des gens ne mesurent pas l'impact d'une rénovation. Un entrepreneur a beau mettre des toiles partout, il y aura, malgré tout, de la poussière dans la maison. Qui nettoiera? Ce genre de détail doit être inscrit au contrat. Même chose pour les toilettes. Les travailleurs peuvent-ils les utiliser? Est-ce qu'ils peuvent manger dans la cuisine? Ou laisser certains outils dans le sous-sol? Tout devrait être écrit dans l'entente.»

«J'ai changé d'idée»

«Il y a aussi des propriétaires qui changent d'idée pendant les travaux. Vous convenez, par exemple, de modifier une salle de bains en une semaine. Soudainement, le client découvre un magnifique robinet, le mardi, en magasin. Il le commande pour le lendemain. L'entrepreneur poursuit son travail, mais le robinet est en rupture de stock. Le client demande alors d'en placer un en attendant. N'empêche, un plombier devra l'installer et revenir une seconde fois pour installer le nouveau modèle. Résultat: des frais supplémentaires!»

De la pluie, des imprévus... 

«Il est essentiel de prévoir, au contrat, des journées d'interruption des travaux et que le client accepte ces délais. Comment, par exemple, travailler si une livraison est retardée ou s'il pleut à boire debout pendant la réfection d'une toiture? Souvent, un entrepreneur est congédié en raison d'un supplément de coût à la suite de la découverte d'une mauvaise surprise. D'où l'importance d'indiquer clairement au contrat le mode de paiement des imprévus et de prévoir un montant d'environ 15% de la valeur de la soumission pour ces dépenses.»

«On s'en était parlé au téléphone» 

«Parmi les sources de malentendus, il y a les ententes conclues de vive voix. Si vous êtes à l'extérieur de la maison et que l'entrepreneur vous appelle, il importe qu'à votre retour, toute modification au contrat soit mise par écrit et qu'un addenda soit signé par les deux parties.»

«Pas d'argent pour l'instant» 

«Lors de la signature du contrat, vous convenez des échéances et des modalités de paiement avec votre entrepreneur. Encore faut-il que cette entente soit respectée. Si le travail est fait, il faut que l'argent "entre". L'entrepreneur a aussi des contraintes, des travailleurs à payer... Faute de paiement, il risque de suspendre les travaux.»