Qu'y a-t-il d'anormal chez un étudiant qui préfère enfoncer quelques clous et sabler des planchers plutôt que de sortir le vendredi soir? D'économiser ses maigres revenus pour se payer des outils et des matériaux? Jean-Philippe Julien n'avait que 21 ans lorsqu'il a décidé, avec sa copine Catherine Bourgault-Poulin alors âgée de 23 ans, de se lancer dans la rénovation d'un des appartements du triplex qu'ils venaient d'acheter.

Qu'y a-t-il d'anormal chez un étudiant qui préfère enfoncer quelques clous et sabler des planchers plutôt que de sortir le vendredi soir? D'économiser ses maigres revenus pour se payer des outils et des matériaux? Jean-Philippe Julien n'avait que 21 ans lorsqu'il a décidé, avec sa copine Catherine Bourgault-Poulin alors âgée de 23 ans, de se lancer dans la rénovation d'un des appartements du triplex qu'ils venaient d'acheter.

«On avait envie de vivre dans un endroit à notre goût et l'appartement qu'on avait choisi d'habiter ne convenait pas à nos besoins. Alors, on a regardé notre budget, on s'est dit qu'on était jeunes et qu'on pouvait le faire», explique le bachelier en marketing.

Il reconnaît tout de même qu'il y avait une certaine part de naïveté dans leur projet. «J'ai commencé par appeler mon père pour lui demander de l'aide, une seule petite fin de semaine, question de refaire la cage d'escalier...» Neuf mois plus tard, le jeune couple accouchait... d'un appartement refait au grand complet!

«On a finalement tout jeté par terre, refait la salle de bains, la chambre, la cuisine et même l'entrée. On s'est laissé prendre au jeu. C'était le moment ou jamais d'en faire notre appartement de rêve, raconte Catherine. On a finalement tout fait nous-mêmes par souci d'économie. Heureusement qu'on a pu habiter chez nos parents pendant les travaux.»

Si Jean-Philippe se débrouillait plutôt bien, grâce à son père qui l'avait initié assez tôt aux rudiments du «bricolage», il en allait tout autrement pour Catherine qui, ayant étudié en sciences politiques, ne se disait pas du tout manuelle. «Je n'avais jamais vu un panneau de gypse! Je ne savais même pas de quoi était fait un mur avoue-t-elle. Et même si Jean-Philippe avait déjà aidé son père pour certains travaux, il n'avait pas énormément d'expérience.»

Boulot-dodo-réno

Cet été-là, en juillet 2002, Julie Lebeau et Patrick Murray ont eux aussi rénové leur appartement du quartier Rosemont. Ils avaient cru flairer la bonne affaire en optant pour l'achat d'un triplex. Quitte à devoir le rénover. Mais cette fois le temps était compté.

«Étant donné qu'on a dû déménager temporairement chez mes parents, on voulait boucler ça rapidement pour retourner le plus vite possible dans nos affaires, explique l'éducatrice spécialisée. Ça nous a finalement pris deux mois. Le plus difficile était de devoir parfois rénover les soirs et les fins de semaine en plus de nos emplois de jour. Patrick, qui est électricien, travaillait même de nuit.»

Pour Peggy Trousseau et David Marche, jeune couple d'ingénieurs avec enfants, la conciliation travail/rénovation a pris un tout autre sens. «C'est sûr que ça exige de l'organisation avec des enfants et nos horaires de travail. Mais contrairement à d'autres, on n'a pas de contrainte de temps. On fait tout petit à petit», raconte cette maman de deux bambins.

Le couple, qui a fait l'acquisition d'un duplex il y a deux ans, ne se sent pas pressé outre mesure. «On a rénové la cuisine pendant tout un été en continuant d'habiter la maison. On se faisait à manger au sous-sol avec les enfants. On avait un petit réchaud, mais on a surtout mangé des salades et des plats froids. Les enfants aiment ça!», explique-t-elle.

Trois histoires différentes, mais un même constat chez ces couples de rénovateurs en herbe: entreprendre un tel chantier sans l'aide de la famille et des amis est difficilement concevable. «La famille, c'est elle qui nous a le plus aidés... Elle est pour au moins 50 % de la réussite!» estime Julie Lebeau.

«Mon père s'est beaucoup investi dans notre projet. Il se débrouillait bien en électricité, une étape assez complexe. Le fait d'avoir réalisé certains travaux en sa compagnie m'a beaucoup rapproché de lui», souligne pour sa part Jean-Philippe maintenant âgé de 23 ans. Il reconnaît également que son père a joué un autre rôle très important: celui du banquier. «Même si Catherine et moi avions des économies, mes parents ont coopéré financièrement pour nous avancer ce qu'il nous manquait.»

Jean-Philippe a aussi pu compter sur l'aide précieuse de plusieurs amis, que ce soit pour plâtrer les murs ou donner un coup de pinceau. Des tâches qui ne sont pas «si compliquées que ça», fait remarquer Catherine Bourgault-Poulin.

«On expliquait bien ce qu'il fallait faire et nos amis s'exécutaient. Ce n'est pas sorcier, tout le monde peut y arriver. Il s'agit d'être bien équipé en matériaux et d'avoir les bons outils», ajoute-t-elle.

Elle recommande toutefois de toujours s'en remettre au plus connaisseur en la matière. Ce qui n'est pas sans causer certaines tensions dans un couple lorsque le plus habile, c'est l'autre. «Ça peut poser un problème quand l'un s'y connaît mieux que l'autre. Jean-Philippe savait qu'il pouvait compter sur moi.»

Pour Julie Lebeau, la confiance mutuelle est indispensable. «Je n'avais aucune expérience. J'avais du mal à visualiser et à concevoir le travail dans son ensemble. J'aurais sans doute sauté des étapes dans la logistique. Je devais donc faire confiance aveuglément à Patrick et je m'impatientais parfois», explique-t-elle.

Les filles au marteau

«Je faisais ce que je pouvais. J'ai dû tout apprendre, non seulement à travailler manuellement, mais surtout à le faire avec des gars, qui ne répondent pas toujours aux questions quand ils sont absorbés dans leur travail. En général, ils n'aiment pas vraiment parler, lance Julie en jetant un regard amusé à son chum. Mais j'ai surtout participé au magasinage et à la décoration.»

Sûre d'elle, Catherine se croit capable de répéter l'expérience, même avec une personne moins expérimentée. «Je peux maintenant construire un mur au complet. Je me débrouille en plomberie et en électricité, mais je suis plus à l'aise pour des petites affaires. C'est quand même nous qui avons tout décidé et tout fait, jusqu'à la touche finale en décoration.»

Peggy Trousseau dit aider son copain autant que possible. «Tout ce que je peux faire, je le fais. Mais toute seule, je ne sais pas si j'aurais eu le courage. Il faut vraiment être motivée», avoue la jeune femme. Pourtant, elle ajoute qu'elle n'hésiterait pas une seconde si c'était à recommencer. «Malgré tout, je me suis rendu compte que c'est incroyable ce qu'on peut faire soi-même.»

Le jeu en vaut-il la chandelle? «Si c'était à refaire, on y réfléchirait bien, répond Patrick Murray. Surtout en ce qui a trait au budget. Pour une personne qui n'a pas beaucoup d'économies, il vaut peut-être mieux demander conseil, quitte à faire évaluer les coûts par deux ou trois experts différents. Dans certains cas, ça peut faire toute la différence», conclut-il.