Imaginez la scène. Un samedi après-midi, un agent immobilier vous appelle en disant qu'un de ses clients s'intéresse à votre maison. Elle n'est pas à vendre, personne ne l'a visitée, mais on vous offre 350 000 $. Surprenant? Nathalie Bélanger, de Val-Bélair, a vécu cette situation.

Imaginez la scène. Un samedi après-midi, un agent immobilier vous appelle en disant qu'un de ses clients s'intéresse à votre maison. Elle n'est pas à vendre, personne ne l'a visitée, mais on vous offre 350 000 $. Surprenant? Nathalie Bélanger, de Val-Bélair, a vécu cette situation.

«L'agent s'est présenté, puis il m'a dit qu'un militaire qui venait d'être transféré à la base de Valcartier se cherchait une maison dans mon quartier, raconte Nathalie. Comme il ne trouvait rien d'intéressant sur le marché, il a décidé de faire des offres sur les résidences qui répondaient à ses besoins.»

Des agences immobilières approchent régulièrement Nathalie et son conjoint pour offrir de mettre leur maison en vente. «Notre coin est très recherché par les familles. C'est tranquille, il y a une école primaire à deux rues de chez nous et la base militaire est tout près. Autour de février-mars, on a au moins un appel par semaine pour savoir si on souhaite vendre. Mais là, c'était la première fois qu'un montant d'argent était évoqué.»

Nathalie a réfléchi à deux reprises avant de donner sa réponse. «J'allais dire non, mais quand l'agent m'a dit que le budget du client était de 350 000 $, j'ai arrêté de parler.» Selon l'évaluation municipale de 2005, leur maison vaut 223 000 $. Elle a finalement décliné l'offre, tout en prenant les coordonnées de l'agent, «au cas où».

Piqués par la curiosité, Nathalie et son conjoint ont tout de même pris le temps de vérifier s'il s'agissait d'une affaire à saisir. Comme le montant offert était semblable à la valeur marchande des maisons du coin, ils ont maintenu leur décision. «On est bien chez nous, pourquoi déménager?»

La proposition du militaire n'était pas sans condition. «Il voulait quand même visiter la maison, explique Nathalie. Mais je ne comprends pas pourquoi il a choisi notre résidence. C'était en plein mois de mars et on la voyait à peine à cause des bancs de neige.»

Selon les recherches du Soleil, au moins trois autres propriétaires du quartier ont reçu une offre semblable pendant la même période. Isabelle Lamy est de ce nombre. Elle n'a pas hésité lorsque l'agent l'a contactée. «J'ai dit non, tout simplement.» Les deux autres personnes ont également refusé la proposition.

Pratique rare

Les secteurs Val-Bélair, Shannon, Saint-Gabriel-de-Valcartier, Stoneham et Tewkesbury sont très populaires, surtout auprès des militaires, observe Steeve Chamberland, agent immobilier chez Century21 Formule. «Généralement, le marché suffit pour combler les besoins des clients. Lorsqu'il n'y a rien d'intéressant, il arrive qu'on approche des gens dont la maison n'est pas à vendre, mais c'est rare.»

Depuis le début de l'année, Steeve Chamberland a eu deux clients qui ont fait des offres sur des résidences qui n'avaient pas de pancarte sur leur terrain. L'efficacité de la méthode est très aléatoire. «Parfois ça fonctionne, parfois ça ne fonctionne pas», résume l'agent.

À la Chambre immobilière de Québec, cette forme de sollicitation ne surprend pas. «Ce n'est rien d'inhabituel, affirme la directrice générale, Gina Gaudreault. Il arrive souvent que des gens tombent en amour avec une maison qui n'est pas à vendre. S'ils demandent à un agent immobilier d'aller faire une offre, il va le faire.»

Même son de cloche chez Dominique Racine, directrice des communications à l'Association des courtiers et agents immobiliers du Québec. «Le travail d'un agent est de trouver une maison qui répond aux besoins de son client. Si rien n'est en vente, l'agent va approcher des gens dont le domicile a les critères recherchés, même s'il n'est pas sur le marché.»

Selon Gina Gaudreault, cette méthode d'achat est plus fréquente chez les personnes qui ont des moyens élevés. «Les Européens, par exemple, arrivent ici avec une force monétaire importante à cause de l'euro. Pour eux, ce n'est pas un problème de rajouter un bon montant à la valeur marchande d'une maison pour convaincre un propriétaire de vendre.»

La sollicitation doit toutefois respecter certaines normes. «Il faut que ce soit fait dans les règles de l'art. Si une personne décline l'offre, l'agent immobilier ne doit pas s'acharner», explique Dominique Racine.