La métamorphose de Benny Farm, à Notre-Dame-de-Grâce, se voulait ambitieuse. La première phase mariait le recyclage de vieux bâtiments, construits en 1947, avec la construction de nouveaux immeubles, en mettant l'accent sur la construction durable, l'efficacité énergétique et la gestion efficace de l'eau. L'infrastructure verte qui relie certains immeubles a valu des prix prestigieux aux instigateurs du projet. Or la réalité est loin d'être rose pour les locataires de la coopérative Z.O.O. et de la résidence pour personnes âgées Chez Soi, qui ont dû composer avec des sérieux problèmes.

La métamorphose de Benny Farm, à Notre-Dame-de-Grâce, se voulait ambitieuse. La première phase mariait le recyclage de vieux bâtiments, construits en 1947, avec la construction de nouveaux immeubles, en mettant l'accent sur la construction durable, l'efficacité énergétique et la gestion efficace de l'eau. L'infrastructure verte qui relie certains immeubles a valu des prix prestigieux aux instigateurs du projet. Or la réalité est loin d'être rose pour les locataires de la coopérative Z.O.O. et de la résidence pour personnes âgées Chez Soi, qui ont dû composer avec des sérieux problèmes.

 En mai 2006, Pauline Renaut était tout heureuse d'emménager dans la coopérative d'habitation Z.O.O. avec son mari et leurs trois enfants. Elle ne se doutait pas du dur hiver qui les attendait.

 Le chauffage radiant, mal installé, n'a pas bien fonctionné. Ils ont dû mettre des chaufferettes d'appoint tout l'hiver, car il faisait 15 degrés dans le logement. Ils ont manqué d'eau chaude pendant deux semaines et demie, devant trouver refuge chez des amis. Leur fillette de deux ans, Myriam, a par ailleurs toussé d'octobre à mai. «Il y a beaucoup de poussière dans l'air», déplore Mme Renaut.

 Des problèmes de chauffage ont affecté tous les membres de la coopérative, qu'ils habitent dans les logements neufs, comme Mme Renaut, ou les logements rénovés. Le complexe, de plus, est aux prises avec des problèmes d'infiltration d'eau, de moisissure dans les sous-sols et de ventilation. Comble du malheur, un père de famille habitant au-dessus d'un des sous-sols envahi par la moisissure est mort en mai d'une maladie pulmonaire. Des tests ont été effectués, mais aucun lien de cause à effet n'a été établi.

 La coopérative est en conflit avec l'entrepreneur qui a rénové les anciens immeubles et construit les nouveaux, Edilbec Construction. Elle lui a interdit l'accès aux édifices et lui doit encore de l'argent. Les deux parties consultent des avocats.

 La situation a dégénéré à un point tel que la Ville de Montréal a décidé de s'en mêler. Un plan d'action est actuellement élaboré pour que tous soient au chaud cet automne, à l'abri des moisissures et de la poussière. La Ville de Montréal, qui a subventionné la construction de la coopérative Z.O.O. dans le cadre de l'opération Solidarité 5000 logements, a engagé un chargé de projet, au grand soulagement de Mme Renaut, qui est membre du conseil d'administration. «Nous étions six ou sept femmes à tenir la coopérative sur nos épaules, confie-t-elle. Le nouvel administrateur a l'air méthodique.»

 La Ville de Montréal a établi trois priorités, indique Patricia Lowe, porte-parole de la municipalité. Elle s'attaquera tout d'abord à la moisissure dans un des sous-sols et aux fuites d'eau créant de l'humidité dans les sous-sols des cinq bâtiments rénovés. Installé incorrectement, le système de ventilation, pourtant neuf, sera remplacé ou réparé. Les problèmes de chauffage seront aussi réglés.

 «Les deux premiers problèmes n'ont pas été causés par l'infrastructure verte, précise Mme Lowe. Dans le cas du chauffage, l'harmonisation du système traditionnel et du système vert a exacerbé les problèmes existants.»

 Edilbec Construction soutient avoir accompli son travail. «Quand on fait du neuf avec du vieux, cela ne fonctionne pas tout le temps», soutient Dominic Salvo, vice-président de l'entreprise.

 Faux, estime l'architecte Mark Poddubiuk, du bureau d'architectes L'Oeuf - Pearl Poddubiuk et associés, qui est impliqué dans le dossier depuis une quinzaine d'années. «Tout est fonctionnel de l'autre côté de la rue, dans la coopérative d'habitation Benny Farm, établie dans des bâtiments rénovés.» Il remet plutôt en question la pratique, en matière de logement social, de confier la construction des immeubles au plus bas soumissionnaire.

 Le sous-financement de l'organisme à but non lucratif Énergie Verte Benny Farm, chargé d'implanter progressivement l'infrastructure verte sur le site, a compliqué les choses. «Les problèmes rencontrés lors de la mise en marche de la géothermie et des panneaux solaires n'auraient pas été trop graves normalement, souligne Patricia Lowe. Ils sont toutefois devenus des problèmes majeurs en essayant de travailler avec un budget serré.»

 Bob Butler, qui habite dans la résidence Chez soi et est membre du conseil d'administration d'Énergie Verte Benny Farm, n'est nullement découragé. «Nous appliquons une technologie assez avancée à l'habitation sociale, ce qui ne s'est jamais fait, dit-il. Une fois les problèmes techniques et financiers réglés, tout va fonctionner.»

 Pour concrétiser son projet. Énergie Verte Benny Farm a obtenu l'an dernier une subvention de plus de 3 millionsde dollars du Fonds municipal vert, de la Fédération canadienne des municipalités. L'organisme a soumis à la fédération une demande pour obtenir un financement supplémentaire. Il devrait recevoir une réponse avant la fin du mois.

 L'architecte Daniel Pearl, qui voit à la bonification des systèmes de chauffage et de gestion de l'eau avec l'infrastructure verte dans les complexes Z.O.O. et Chez Soi, est blessé que certains pensent que l'OEUF a gagné des prix et ne fait rien pour régler la situation. «Nous faisons tout ce que nous pouvons, insiste-t-il. Mais plusieurs choses dépassent notre mandat.»

 Deux complexes intimement liés

 La coopérative Z.O.O. regroupe 46 appartements répartis dans cinq bâtiments rénovés et deux immeubles neufs rattachés les uns aux autres le long du boulevard Cavendish, au nord de la rue Sherbrooke. Elle accueille de jeunes familles. Elle est confrontée à tant de problèmes, que la Ville de Montréal a décidé de lui venir en aide.

 Non loin, la résidence pour personnes âgées Chez Soi Notre-Dame-de-Grâce comprend 91 logements neufs. La situation, moins dramatique, est en train de se régler. La chaudière défectueuse, responsable des problèmes de chauffage l'hiver dernier, est sur le point d'être remplacée. Les panneaux solaires, qui avaient commencé à chauffer l'eau et ont surchauffé, seront réparés cet automne. Les résidants n'ont toutefois jamais manqué d'eau chaude.