On a à peine traversé le vestibule de la maison que déjà on est ailleurs. L'éclairage est tamisé comme, on imagine, dans les salons parisiens du XVIIIe siècle éclairés à la chandelle. La propriétaire, Aroucha Naeini, nous offre de prendre le thé dans un des trois salons. Lequel ? « Euh... »

Gentiment, elle nous guide vers le plus petit, celui qu'elle appelle la bibliothèque et qui abrite les livres de la famille. On n'a pas assez d'yeux pour tout voir. Heureusement, Mme Naeini nous quitte le temps d'aller chercher le thé et des gâteries iraniennes. On peut admirer à notre aise.

Bien avant de nous éblouir devant les intérieurs, les extérieurs de la grande maison de Notre-Dame-de-Grâce nous avaient intriguée.

La maison du couple Naeini est installée loin de la rue de Vendôme, de manière perpendiculaire alors que les maisons voisines, des cottages jumelés en briques du début du XXe siècle, sont agencées parallèlement à la rue, comme partout ailleurs. L'explication : la maison de ferme date des années 1860 et dominait la région avant que Notre-Dame-de-Grâce ne soit la ville qu'on connaît. Elle aurait déjà appartenu à des membres de la grande famille Décarie, des cultivateurs qui labouraient les terres dans la partie ouest de la ville.

Certains racontent que les ancêtres installaient les façades face au fleuve parce qu'ils redoutaient les attaques des Indiens qui venaient toujours de cette direction. Mais l'orientation plein sud répondait à des considérations plus pratiques : les fenêtres des façades, plus nombreuses que celles des murs des côtés, captaient mieux le soleil !

Cela explique la forme, typique, des maisons de ferme de l'époque. D'ailleurs, il ne reste que quelques vestiges du temps des célèbres cultivateurs de pommes et de melons sur le territoire, comme la célèbre maison rose de la rue Saint-Antoine à quelques pas de celle des Naeini.

Oasis

Pour se rendre à la propriété de la famille, il faut marcher sur un pavé fait de pierres dans un univers boisé qui la protège des bruits de la ville. Une grande véranda longe la façade. Autrefois, on imagine que ses résidants pouvaient voir à des kilomètres, au-delà du fleuve. Les boiseries extérieures, des ouvertures en arche, sont d'origine, tout comme celles du reste de la propriété. Elles ont été méticuleusement préservées au fil des ans et des propriétaires.

C'est en partie ce qui avait séduit Mme Naeini quand elle a visité la maison il y a une dizaine d'années.

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Cour avant: la propriété est très bien protégée de la ville avec ses conifères et ses arbustes.

La propriété en bref

Prix demandé : 1 699 000 $

Année de construction : 1869, approximativement

14 pièces comprenant 5 chambres, 3 salles de bain, 1 salle d'eau

Superficie utile : 4400 pi2, approximativement

Superficie du terrain : 10 060 pi2

Évaluation municipale : 1 950 000 $

Impôt foncier : 15 835 $

Taxes scolaires : 3312 $

Courtier : Joseph Montanaro, Sotheby's Canada. 514 937-3718

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Bibliothèque: la pièce que les anglophone appelaient parfois le drawing room. Ici, le foyer est au gaz.

La famille vient de Téhéran. Francophile, elle a choisi le Québec après avoir vécu à Paris et Toronto, et pour suivre leur fille aînée qui entamait des études à l'université.

« J'étais seule pour la visiter, mon mari était en voyage d'affaires. Cette maison m'interpellait. » Le terrain de plus de 10 000 pi2 aussi. « J'imaginais que les enfants pourraient y jouer et recevoir des amis. » La maison avait aussi accueilli le dalaï-lama à la fin des années 70. « J'ai une immense admiration pour cet homme. De savoir qu'il avait séjourné ici... Je n'ai pas hésité, j'ai fait une offre sur-le-champ ! »

La propriété avait été modernisée par les propriétaires précédents. D'abord, la partie avant a été construite au début du XXe siècle. C'est là que se trouvent les trois salons et la salle à manger (aux boiseries finement travaillées) ainsi que l'escalier semi-circulaire en bois tourné. L'arrière, qui comprend la cuisine, le coin-repas et un escalier étroit menant à l'étage, est d'origine. La famille Naeini a agrandi le côté de la maison pour ajouter une pièce adjacente à la cuisine. 

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Adjacente à la cuisine, la terrasse fleurie surplombe le terrain.

La cuisine a été rénovée il y a une douzaine d'années. Les Naeini ont fait creuser le sous-sol pour en faire un studio destiné à leur fille aînée. La salle de lessive y est aussi installée. Il y a quatre chambres à l'étage, dont celle nichée sous le toit mansardé. 

C'est une grande maison. Trop grande maintenant pour les parents qui voient leur progéniture s'envoler. Où iront-ils ? Ils ne le savent pas. Mais ce sera à Montréal, assurément.

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Cuisine: un îlot surdimensionné occupe le centre de la pièce qui a été rénovée il y a une dizaine d'années. La surface de travail est en granite.