Des gazouillis! C'est le premier son qui émerge quand nous ouvrons la portière de l'auto, dans le stationnement d'Habitat 67. Ça nous rappelle que le célèbre complexe résidentiel a poussé près des îles et du fleuve.

Il faut y pénétrer pour ressentir la présence du béton, forte et aérienne à la fois, matière ayant fait des 354 cubes une icône de Montréal.

Ce sont en fait des prismes rectangulaires de 85 tonnes. Ils s'imbriquent en nombre variable pour former des résidences. On compte sept unités d'un seul cube, 88 unités de deux cubes, 43 de trois cubes et huit constituées de quatre cubes, indique le courtier immobilier Robert Lefebvre. «Deux résidents de longue date ont cinq cubes, précise-t-il, lui-même propriétaire depuis 1991. À un moment donné, il y a même eu un résident qui avait huit cubes.»

Simone Geadah et son mari ont mis la main sur un appartement de trois cubes alors que leurs deux enfants s'apprêtaient à quitter le nid, en 2004. «C'était vraiment un projet de couple», confie Mme Geadah. Un rêve aussi.

Ils avaient visité une quinzaine d'unités. «Habitat nous semblait inaccessible», évoque-t-elle. Leur chance s'est présentée quand plusieurs des tout premiers acheteurs ont revendu leur morceau de patrimoine, il y a près d'une dizaine d'années. Le no 513 se trouvait près de l'ascenseur, l'équivalent d'un quatrième étage puisqu'il faut ensuite descendre un escalier. Cela leur avait plu.

Rénovation contemporaine

Le couple habite trois cubes faisant chacun 39 pieds sur 16. Murs, plafonds et planchers sont en béton précontraint, «ce qui fait qu'on n'a pas de colonne au centre», note Mme Geadah. Avantages: des perspectives dégagées, et un sentiment d'espace.

Les propriétaires ont l'impression de vivre sur un bateau, le fleuve d'un côté, le Vieux-Port de l'autre. D'ailleurs, ils ont une navette à leur disposition du matin au soir pour aller et revenir du centre-ville. La porte d'entrée s'ouvre dans un premier cube, où s'étale le vaste séjour.

Centrale, la cuisine, entièrement rénovée, conserve l'épure moderne photographiée en 1967. Pour réaliser cette pièce, Mme Geadah a soumis des croquis à un ébéniste qui a concrétisé sa vision. Des années de lecture sur le design et la construction lui ont inspiré moult détails, tels des rangements pour outils intégrés aux coups de pied et deux caissons roulant sous le comptoir-lunch.

Les armoires sont en stratifié, d'autres sont vitrées et éclairées de l'intérieur. La céramique au sol est formée de languettes en trois couleurs, disposées de façon aléatoire, comme pour rappeler la parqueterie de bois qui couvrait initialement tous les planchers des cubes d'Habitat 67.

Près de l'entrée de la maison, un autre pan d'armoires imite le bambou. À l'intérieur se cache un placard, et ce nouvel élément de mobilier intégré se prolonge jusque dans la salle à manger.

L'exposition est, sud et ouest ensoleille leur intérieur à longueur de journée. C'était important pour Mme Geadah, qui installerait son bureau dans le deuxième cube, encastré dans le premier. Pour le concevoir, elle s'est inspirée des blocs en surplomb, visibles depuis leur terrasse. Une niche construite en mezzanine s'avance comme la proue d'un bateau au-dessus du salon; un panneau de marbre y fait office de table de travail. Simple et chic.

Ce poste d'observation sur l'aire ouverte du rez-de-chaussée forme un promontoire fonctionnel puisque le mur du fond est tapissé d'étagères et d'armoires sur mesure.

De l'autre côté du mur, nous découvrons une salle de bains rénovée récemment avec des teintes claires et un séjour offrant des vues sur la ville.

Terrasse et verrière

Le troisième cube abrite une deuxième salle de bains de facture contemporaine (et non monocoque comme l'originale) avec une douche carrelée de porcelaine noire et du mobilier plaqué de bois. Cette salle avec ouverture côté flanque la chambre principale.

Une porte oscillobattante dans la chambre donne sur l'allée extérieure longeant un solarium. Car le vaste jardin privé - l'une des caractéristiques d'Habitat - a fait largement place ici à une verrière.

Une société en commandite gère Habitat 67. La facture mensuelle des frais de gestion et d'entretien totalise 2595$ pour cette propriété à vendre (voir encadré). Ne reste que le téléphone et le câble à payer, à toutes fins utiles.

Québec a classé Habitat 67 monument historique en 2009, plus précisément «l'enveloppe extérieure du Complexe et l'intérieur des 4 cubes appartenant à l'architecte-concepteur, M. Moshe Safdie», précise l'annonce.

M. Safdie a toujours un pied-à-terre, ou plutôt un pied dans les hauteurs de cette gigantesque sculpture qui l'a rendu mondialement célèbre.

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La propriété en bref

Prix demandé: 1 150 000$

Année de construction: 1967

Nombre de pièces: 7 dont 3 chambres + 2 salles de bains

Comprend réfrigérateur, four à convection, cuisinière à induction, hotte télescopique, cafetière espresso encastrée, lave-vaisselle, cuvette-steamer, cellier, laveuse, sécheuse, mobilier intégré, luminaires, stores, espace de rangement au sous-sol et stationnement intérieur

Évaluation municipale (2012): n.d.

Facture mensuelle totale : 2595$ soit 865$ par cube*

À proximité de deux tennis en terre battue et de l'île Notre-Dame

Courtier: Robert Sephen Lefebvre, Groupe Sutton sur l'île, 514-715-7010

* Incluant frais d'exploitation, impôt foncier, taxe scolaire, frais de chauffage et d'électricité, assurances de l'immeuble, service de navette, de climatisation, de câble, entretien préventif et paysager, stationnement intérieur et investissement capital (pour conservation et restauration du bâtiment).