Il se dégage de l'Île-Perrot un sentiment d'insularité. Surtout dans la partie sud de l'île, quand la brise du sud souffle sur le boulevard Perrot. C'est par là que nous découvrons en 2012 une belle maison en pierre d'un autre siècle.

Elle est à vendre à un million et quelques. Pourtant, quiconque n'aurait pas payé cher pour ce lieu abandonné il y a à peine sept ans.

La maison était placardée, rapportent les propriétaires. Personne n'avait habité là depuis 20 ans, sauf des squatteurs. L'endroit ne payait pas de mine. Cela n'a pas découragé Suzanne Desmeules, au contraire.

«Je voyais une maison familiale dans un site idyllique», évoque la mère de quatre grands enfants.

Son mari acquiesce. «Elle était visionnaire», renchérit Norbert Desmeules, un ingénieur. La stabilisation et la réparation de fondations, les pieux et le redressement de maisons, c'est son domaine. Cela tombait bien; la construction originale, dont l'âge est estimé à 200 ans, et l'une de ses extensions (il y en a deux) avaient besoin d'interventions à leur base.

Projet familial

M. Desmeules avait un client à Notre-Dame-de-l'Île-Perrot et il avait demandé à son épouse de l'y accompagner, sachant qu'elle rêvait d'un endroit campagnard. Le couple avait quitté «tout un domaine» au pied des Monts Valin, dans le Saguenay, pour se rapprocher de deux de leurs enfants impliqués dans l'entreprise familiale (de fondations) à Montréal.

Alain, leur fils aîné, et Étienne les ont appuyés dans le projet de transformation de cette habitation, qu'ils ont donc découverte par hasard - en passant devant ce jour-là, après cinq années de repérage dans l'ouest de Montréal et au bord du Richelieu.

Une extension qui daterait des années 1940 abrite un logement conçu et habité quelque temps par l'un des enfants Desmeules et sa petite famille. Un appartement intergénérationnel, si l'on veut. Une grande salle au plancher d'ardoise (radiant) avec un foyer en pierres possède un coin-cuisine et un escalier escamotable. On peut relever l'escalier pour dégager le rez-de-chaussée. «Nous avons reçu ici à plusieurs reprises», indique Mme Desmeules, 64 ans.

À l'étage, une chambre et une baignoire se partagent l'espace sous le toit mansardé, avec une salle d'eau et des rangements.

L'autre extension de la maison est spectaculaire. Quatre murs en pierre s'élèvent sur un plancher en pierres d'ardoise, chauffant lui aussi. Une cheminée en pierres naturelles et un plafond cathédrale donnent beaucoup de caractère à cette salle familiale.

Les teintes «historiques» de Farrow&Ball ont servi à peindre toutes les pièces de la maison. On note aussi la présence de portes françaises et de fenêtres à crémones, restaurées.

«Maison Augustin-Leduc»

La pièce préférée de Madame offre des vues sur la cour arrière gazonnée et paysagée: c'est la vaste cuisine ouverte sur la salle à manger, toutes deux aménagées dans la partie la plus ancienne de l'habitation. Deux des quatre foyers de la maisonnée se trouvent là (l'un est converti au propane). Il y a aussi un boudoir avec un meuble dissimulant la télé et une salle d'eau.

«Cela a été un plaisir [de rénover cette maison], dit Mme Desmeules, assise à la table de bois éclairée d'un rayon de soleil. On venait avec nos enfants, on installait la table à pique-nique ici, on allumait le foyer, on prenait un verre de vin et on se consultait pour l'objectif du moment.»

Idyllique, vous dites?

De l'autre côté de la rue, les néo-manoirs ont poussé comme des champignons. Heureusement, aucun de ces voisins anachroniques n'est visible à l'arrière de cette propriété s'étendant sur plus 48 000 pieds carrés. L'aspect bucolique des lieux a été préservé.

Une partie d'un sous-bois est même demeurée en place, formant un paysage reposant au fond de la cour.

«De mémoire d'homme, la famille qui habitait ici, c'était celle de Augustin Leduc, mort au tournant du XXe siècle», raconte Benoit Aumais, un féru d'histoires et d'archives locales présent lors de notre visite. Un descendant des Leduc aurait repris la maison. «Puis, dans les années 30 ou 40, entre en scène Roger Lalonde, marchand de tapis de l'avenue du Parc», poursuit M. Aumais. Ce célibataire riche et chasseur utilisait la maison comme retraite campagnarde. Il aurait introduit dans son domaine une colonie de renards argentés pour son propre plaisir. «On en voit encore dans le sous-bois derrière», affirme M. Desmeules.

Après avoir remis de la vie dans ces lieux longtemps abandonnés, la famille Desmeules convoite maintenant une maison plus petite, explique M. Desmeules en montant l'escalier du sous-sol qu'il a excavé pour l'approfondir et y installer un système de géothermie: les enfants ont réussi à les convaincre, sa femme et lui, de mettre l'endroit en vente cette année.

LA PROPRIÉTÉ EN BREF

Prix demandé: 1 289 000$.

Année de construction: inconnue.

Nombre de pièces: 8, dont 3 chambres + 2 salle de bains + 1 salle d'eau.

Comprend tous les lustres, deux fours encastrés, plaque chauffante, réfrigérateur, lave-vaisselle, micro-ondes, hotte

Évaluation municipale (2012): 585 500$.

Impôt foncier (2012): 4935$.

Taxe scolaire (2012): 1456$.

À proximité du vieux noyau villageois de Notre-Dame-de-l'Île-Perrot

Courtier: Carlo Paolucci, Sotheby's International Realty Québec, 514-802-4004.