Entre 1890 et 1914, la Ville de Westmount a connu un boom immobilier sans précédent. Des spéculateurs fonciers ont acheté des terres et les ont subdivisées pour y construire des maisons qu'ils ont revendues aussitôt. Flairant la bonne affaire, le pharmacien Henry Jackson a fait construire un ensemble de sept maisons en rangée dans la rue Argyle, en 1896. Cependant, comme de nombreux investisseurs, il a failli y perdre sa chemise.

   Entre 1890 et 1914, la Ville de Westmount a connu un boom immobilier sans précédent. Des spéculateurs fonciers ont acheté des terres et les ont subdivisées pour y construire des maisons qu'ils ont revendues aussitôt. Flairant la bonne affaire, le pharmacien Henry Jackson a fait construire un ensemble de sept maisons en rangée dans la rue Argyle, en 1896. Cependant, comme de nombreux investisseurs, il a failli y perdre sa chemise.

 À l'époque, la Ville de Westmount, qui s'appelait un an auparavant Côte-Saint-Antoine, ne comptait qu'une vingtaine de rues et des trottoirs de bois. Pour les gens de la ville, ce secteur était considéré comme trop rural pour songer à y déménager! Ainsi, M. Jackson n'a pas réussi à vendre ni à louer ses maisons. Il a donc été obligé d'emménager dans l'une d'entre elles pour éviter la faillite.

 Un siècle plus tard, les sept maisons de M. Jackson, construites dans le berceau historique de Westmount, à deux pas de l'hôtel de ville, sont de dignes représentantes de l'ère des spéculateurs. Pour cette raison, elles ont été classées «architecturalement significatives» par la firme d'architectes Beaupré et Michaud, lors d'une étude réalisée en 1988 pour la Ville de Westmount. L'une de ses charmantes maisons de pierres vient d'ailleurs d'apparaître sur le marché. À quoi ressemble-t-elle? Une visite des lieux s'impose.

   Tour du propriétaire

 D'une superficie de 1965 pieds carrés, cette élégante maison victorienne a été restaurée par une designer de formation, qui en est l'actuelle propriétaire avec son conjoint. Le style de l'époque a été conservé et a même été rehaussé par son aménagement contemporain.

 Le revêtement de la façade est en pierre bosselée avec un mélange de pierre taillée. Dans la cour avant, on trouve un espace de stationnement, une rareté dans le cas des vieilles maisons en rangée, ce qui risque de séduire les propriétaires de voiture craignant l'hiver à venir.

 À l'intérieur, de nombreux éléments du décor attirent notre attention. D'abord, en sortant du vestibule, on fait face à l'imposant escalier menant à l'étage, une pièce monumentale d'ébénisterie qui adopterait, selon la propriétaire des lieux, les principes de l'architecte et designer de meubles Charles Eastlake (1836-1906), dont la vision a fortement influencé l'aménagement intérieur en Angleterre, puis en Amérique du Nord, à la fin du XIXe siècle.

 «Dans son livre Hints on Household Taste publié en 1868, Charles Eastlake préconise un style de décoration plus épuré tout en prônant un design qui allie beauté et fonctionnalité. Il croit entre autres que le mobilier devrait être facilement lavable», explique Francyne Morin, qui a été formée en design à Londres.

 L'influence de M. Eastlake apparaît également sur le foyer à double face, qui sépare le salon de la salle à manger. Les motifs géométriques que l'on retrouve sur le côté décoratif - la face donnant sur la salle à manger - seraient typiquement «eastlakiens», affirme Mme Morin.

 Au rez-de-chaussée, la maison dispose d'un spacieux salon éclairé par deux grandes fenêtres donnant sur le côté sud, d'une salle à manger avec une porte à crémone donnant sur un joli balcon, qui surplombe la belle cour tout en longueur, et d'une cuisine située à l'arrière de la propriété. Évidemment, celle-ci n'est plus authentique. De nouvelles armoires, de type «shaker», modernisent les lieux. Ailleurs, vitraux et moulures en plâtre rappellent l'âge de la maison.

 Un vaste puits de lumière en verre polychrome inonde de lumière naturelle la cage d'escalier. À l'étage, on retrouve deux chambres à coucher, ainsi qu'un espace bureau-salon qui pourrait servir de troisième chambre. Adjacente à la chambre à coucher principale, la salle de bains, avec bain et douche séparés, a été complètement rénovée en 2005.

 Chose étonnante, le sous-sol possède un plafond de 10 pieds de hauteur, une caractéristique rare dans les vieilles maisons. «C'est d'ailleurs ça qui nous a convaincus de l'acheter il y a trois ans», explique Mme Morin, qui rêve maintenant d'une maison à la campagne. Avec ses piliers en pin, son plancher en béton recouvert d'époxy et ses murs de pierre et de brique, ce sous-sol a même du cachet. L'endroit sert présentement de studio de musique.

 On ignore qui est l'architecte de cette maison. Probablement que son constructeur, Henry Jackson, a utilisé des plans de catalogue, une pratique déjà courante à l'époque.

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 Prix demandé: 829 000$

 Évaluation municipale: 652 500$

 Nombre de pièces: 7

 Salle de bains: 1

 Salle d'eau: 2

 

Photo: Robert Mailloux, La Presse

Cette maison de la rue Argyle fait partie d'un ensemble de sept maisons en rangée construit en 1896 par le spéculateur Henry Jackson.