Les arguments de vente pour convaincre les acheteurs d'une première maison de faire le grand saut ne manquent pas. Ce n'est toutefois pas en fonction d'un slogan publicitaire qu'on décide de devenir propriétaire. L'exercice demande temps et réflexion. Aperçu des étapes à suivre avant de se lancer.

Faire un budget

Ce devrait être la base et pourtant, c'est l'étape que les futurs acheteurs escamotent le plus souvent. Avant même d'aller voir une institution bancaire, tous devraient faire l'analyse de leurs finances personnelles.

«La plus grande erreur, c'est de ne pas tenir compte de sa capacité réelle de remboursement, dit Sylvie De Bellefeuille, conseillère budgétaire chez Option Consommateurs. Les institutions financières ont tendance à vouloir prêter des sommes souvent assez élevée qui ne tiennent pas toujours compte de la réalité de la personne. Il ne faut pas se fier à elles pour savoir combien on peut emprunter.»

Le courtier immobilier agréé Claude Hetenyi abonde dans le même sens. «La majorité des acheteurs n'a pas fait l'exercice conscient de penser à l'argent qu'il veut mettre sur une maison. Certains ont été se faire préapprouver, mais c'est une capacité d'emprunt, ce n'est pas nécessairement là où on veut aller. Souvent, je fais l'exercice avec un client: voilà ce que tu peux te permettre, mais que veux-tu te permettre?», demande-t-il.

Conférencier, promoteur immobilier et auteur d'un guide sur l'achat d'une première propriété, Martin Provencher suggère aux acheteurs de ne pas trop s'emporter. «S'acheter une maison, c'est censé être une aventure plaisante. Il ne faut pas que ça se transforme en cauchemar. Souvent, les gens visent tout de suite la grosse maison à quatre lucarnes avec trois portes de garage. Après, ils n'ont plus d'argent pour se faire livrer une pizza. Où est le plaisir là-dedans?»

Les calculs budgétaires ne doivent pas s'arrêter aux remboursements hypothécaires, rappelle Sylvie De Bellefeuille. «Il faut prévoir l'installation, la fameuse «taxe de Bienvenue». Devra-t-on s'équiper d'une tondeuse ou payer des frais de condos? On se dit souvent que l'hypothèque, c'est moins cher qu'un loyer, mais il faut considérer tout ce qui vient avec», note Sylvie De Bellefeuille.

Déterminer ses besoins

La banlieue ou la ville?

Loft à aire ouverte ou copropriété avec trois chambres fermées?

Près des autoroutes ou des pistes cyclables?

Des questions, les futurs propriétaires doivent s'en poser beaucoup avant de téléphoner à un agent immobilier.

«C'est souvent plus ou moins bien fait, les besoins sont mal définis, confie l'agent Claude Hetenyi. Les gens savent ce qu'ils veulent, mais ne savent pas ce qu'ils ne veulent pas. Il faut déterminer ce qui est prioritaire pour un client et ce qui est de l'extra.»

Mais entrevoir l'avenir et les besoins d'habitation qui en découleront peut s'avérer ardu. Qui sait combien d'enfants il aura dans 10 ans, ou quand l'âge l'empêchera de monter les escaliers?

«Les gens ont un peu de misère à se projeter dans l'avenir, mais un horizon de cinq ans est respectable et réaliste, dit Martin Provencher. Il faut réaliser qu'il y a beaucoup de frais d'entrée et de sortie sur le marché. On va payer beaucoup si on vend parce qu'on a mal choisi le quartier, ou que, finalement, on voulait une chambre de plus. Mieux vaut prendre une soirée avec une coupe de vin et se poser des questions pour savoir ce dont on a besoin.»





Aller au-delà du coup de coeur 

S'il est une expression que le milieu de l'immobilier s'est appropriée au cours des dernières années, c'est bien celle du «coup de coeur». Mais les conseils de Martin Provencher vont à l'encontre de ce que l'expression englobe comme sentiments. Il suggère aux futurs acheteurs de faire des recherches et de visiter.

Il estime que l'empressement de certains acheteurs ne leur rend pas service. «Les gens décident de s'acheter une maison et il faudrait que ce soit réglé le lendemain soir, dit Martin Provencher. Si on n'est pas prêt à chercher, on réduit d'autant nos possibilités d'achat. On se retrouve à acheter la première maison qu'on a visitée, et non celle qu'on devrait acheter. Acheter demande des efforts.»

Le marché actuel permet aux acheteurs de prendre leur temps, estime Claude Hetenyi. «Les acheteurs ont le luxe de pouvoir réfléchir. Il y a six ans, ce n'était pas le cas. Mais aujourd'hui, si la maison ne répond pas à toutes les exigences du client, on peut continuer à regarder ailleurs et il y a des chances que la maison y soit encore dans un ou deux mois, ou qu'on en ait trouvé une qui est mieux entre-temps», dit-il.

 Clés en main ou à rénover? 

Si l'envie vous prend d'acheter une maison qui a besoin de rénovations, il y a de fortes chances que vous ayez moins de concurrents quand viendra le temps de déposer une offre d'achat.

«Les gens cherchent du "clés en main", dit sans détour le courtier immobilier Claude Hetenyi. Il faut qu'il y ait le moins de rénovations possible. Je dis parfois à la blague aux vendeurs que les gens ne savent pas dans quelle main mettre un marteau...»

Assurez-vous de bien vous connaître avant de vous lancer dans une entreprise de rénovation, conseille Martin Provencher.

«Rénover est une expérience extraordinaire, mais ça peut mettre un couple en péril. Si vous n'avez pas le goût, pas le temps, si vous avez des enfants en bas âge, ce n'est pas une bonne idée d'entreprendre des rénovations. Mais si vous pouvez vous le permettre, c'est fantastique. Si vous êtes prêts à acheter la maison dont personne ne veut parce que vous avez le goût de faire des rénovations, vous allez faire un bon deal.»