Pour les premiers acheteurs, une hypothèque représente habituellement le montant le plus important qu'ils auront jamais emprunté à ce jour. Facile d'être dérouté par tous ces zéros! Mieux vaut alors être bien préparé. Voici 10 questions que les courtiers en hypothèque, les prêteurs et les planificateurs financiers doivent bien souvent débroussailler pour les novices du marché immobilier.

1. Combien puis-je emprunter?

Nathalie Duchesne, spécialiste en financement hypothécaire chez le courtier Multi-Prêts, indique que les futurs emprunteurs arrivent souvent bien préparés dans son bureau, avec un budget détaillant les coûts de l'épicerie jusqu'au prix des visites chez le coiffeur. Ils ont aussi déjà vérifié leur capacité d'emprunt grâce à différents outils sur Internet, selon leurs salaires. Ils veulent savoir s'ils sont sur la bonne piste.

Mme Duchesne les aide à simplifier le tout, en leur rappelant les coûts qu'ils auraient pu oublier, comme les assurances ou les droits de mutation (la «taxe de bienvenue»). «Les calculateurs que l'on trouve sur Internet, c'est mathématique, ça ne tient pas compte du train de vie», remarque de son côté Colette Blais, conseillère en développement hypothécaire chez Desjardins.

Mme Duchesne invite donc ses nouveaux clients à se livrer à un simple exercice financier. Il suffit d'épargner la différence entre le montant de son loyer mensuel et celui des paiements de l'emprunt convoité pendant quelques mois. Si l'expérience échoue, il est alors encore temps de revoir ses priorités.

2. Quelle est la mise de fonds initiale nécessaire pour acquérir une propriété?

La mise de fonds minimale est de 5 % du prix d'achat de la propriété. Pour une maison de 225 000 $, il faudra donc débourser 11 250 $. Une mise de fonds plus importante permettra d'ailleurs d'économiser en frais d'intérêt. Si l'apport de capital est inférieur à 20 % du prix du logement, les prêteurs exigent normalement une assurance prêt hypothécaire pour se protéger en cas de défaut de paiement. On peut notamment se procurer cette assurance auprès de la Société canadienne d'hypothèques et de logement (SCHL). La prime de l'assurance varie selon le pourcentage de la mise de fonds; plus celle-ci est élevée, plus la prime sera réduite. Cette dernière peut être payée d'un coup ou ajoutée au montant du prêt et incluse dans les mensualités. Sur une période d'amortissement de 25 ans, elle variera entre 0,5 % et 3 % du montant emprunté.

3. Quelles autres dépenses dois-je prévoir avant l'achat d'une propriété?

Plusieurs! Il faut tenir compte des frais d'évaluation de la propriété, des honoraires du notaire, des frais de déménagement (location d'un camion, changements d'adresse, branchement du téléphone...), de la prime d'assurance prêt hypothécaire, des autres frais d'assurances, des droits de mutation immobilière (la «taxe de bienvenue»), des taxes de la Ville... «On en a souvent pour 5000 $ à 6000 $ avant l'achat!» indique Nathalie Duchesne de chez Multi-Prêts. Peut-être aussi que votre nouvelle propriété sera localisée plus loin de votre travail; il faudra donc prévoir plus de liquidités disponibles pour l'essence. Et on doit penser aux frais d'installation, «des coussins, des rideaux... Ce n'est pas vrai qu'on ne changera rien!» souligne Mme Duchesne.

4. Comment utiliser mon REER pour acheter ma première maison?

L'argent pour acheter sa première propriété peut provenir de son épargne, d'un cadeau d'un membre de la famille et même de son Régime enregistré d'épargne-retraite (REER). Avec le Régime d'accession à la propriété (RAP), on peut retirer jusqu'à 25 000 $ de son Régime enregistré d'épargne-retraite (REER) sans payer d'impôts, explique le conseiller financier Michel Quoibion. Si on ne cotise pas à un REER, on peut profiter de ses droits de cotisation accumulés en effectuant un emprunt dans une institution financière, pour le rembourser en le «RAPant» au moins 90 jours plus tard. «Ça permet de profiter du retour d'impôts pour une mise de fonds pour une maison», indique Mme Blais.

Cette somme peut aussi être utilisée pour liquider des dettes dont on veut idéalement se débarrasser avant de devenir proprio, soutient Mme Duchesne. Le total du montant retiré du REER doit être remboursé en 15 ans sous forme de versements annuels. Mais attention : si on prend congé de cotisation une année, le montant dû sera alors imposable. «Si on n'est pas capable de rembourser à chaque année, utiliser le RAP n'est alors pas avantageux. Ce n'est pas une décision qu'on prend les yeux fermés», avertit M. Quoibion.

5. Quelle période d'amortissement et terme d'hypothèque choisir?

Au Canada, la période maximale d'amortissement des nouveaux prêts hypothécaires garantis par la SCHL est passée de 35 à 30 ans le 18 mars dernier. Vingt-cinq ans est la durée standard dans le secteur bancaire. Un amortissement plus long signifie évidemment des versements moins élevés. Mais opter pour une période plus courte permet souvent d'économiser des milliers de dollars en intérêts. Le terme est la durée pendant laquelle le contrat hypothécaire demeure en vigueur. Il s'agit souvent de cinq ans. L'hypothèque doit ensuite être renouvelée ou renégociée. En général, pour une même période d'amortissement, plus le terme est court, plus les taux d'intérêt et les versements sont réduits.

6. Dois-je opter pour un prêt à taux d'intérêt fixe ou variable?

Le tout dépend de votre degré de tolérance au risque, en raison de la fluctuation des taux d'intérêt et de votre capacité de payer. Avec une hypothèque à taux fixe, le montant des paiements ne bouge pas. Le taux d'intérêt est déterminé lors de la demande de prêt et établi pour le terme complet. Un taux variable signifie qu'il varie en fonction de l'évolution des taux du marché, tout comme les montants des paiements. Souvent, les taux d'intérêt des hypothèques à taux variable sont moins élevés que ceux à taux fixe à la signature du contrat; ces premiers peuvent paraître plus intéressants à court terme.

Mais l'évolution des taux est difficilement prévisible. Selon un sondage de la maison Harris/Décima mené fin avril pour le compte de la Banque CIBC, seuls 27 % des Canadiens de 25 à 34 ans - qui sont plus susceptibles d'être de nouveaux acheteurs - choisiraient un prêt hypothécaire à taux variable.

Les institutions offrent aussi des produits diversifiés : des prêts morcelés de sorte que les parties sont remboursables à des taux et des termes différents. Pour les premiers acheteurs, ça doit rester simple, soulève Mme Duchesne, car «il y a beaucoup d'insécurité à l'achat». Si la conseillère remarque un intérêt pour le suivi des taux d'intérêt chez les futurs proprios, elle proposera un petit pourcentage du prêt à taux variable, pour les introduire à cette possibilité.

7. À quelle fréquence doit-on effectuer les paiements?

Les options de paiement courantes varient d'une institution financière à l'autre. On peut faire des paiements au mois, deux fois pas mois, aux deux semaines ou chaque semaine. Il est également possible d'opter pour le paiement accéléré à la semaine et aux deux semaines pour économiser sur les frais d'intérêt. Puisqu'une année s'étire sur 52 semaines mais que ces options sont basées sur le montant des mensualités, on rembourse l'hypothèque plus vite en versant alors l'équivalent d'un paiement mensuel de plus par an.

8. Dois-je faire affaire avec un courtier en hypothèques ou directement avec les prêteurs?

L'idéal est d'en consulter plusieurs, de chaque côté, recommande l'Agence de la consommation en matière financière du Canada. Les conditions et les taux d'intérêt pour des produits semblables peuvent varier d'une institution financière à l'autre. Les courtiers, eux, servent d'intermédiaires entre les institutions et les clients; ils peuvent donc présenter une large gamme de produits et de conditions à la fois, mais l'offre peut toujours différer.

9. Ai-je besoin d'autres assurances?

L'assurance vie et l'assurance invalidité hypothécaires ne sont pas obligatoires, mais peuvent être utiles. Si on ne pense pas pouvoir faire seul les paiements hypothécaires en cas du décès de son conjoint, une assurance vie serait à envisager. Même chose avec l'assurance invalidité si votre conjoint ou vous n'êtes subitement plus en mesure de travailler. L'institution prêteuse n'est pas la seule à offrir des assurances vie : le premier acheteur étant jeune, il aurait avantage à faire affaire avec un courtier d'assurances, affirme Mme Duchesne.

Si le prêt change d'institution financière, le proprio avec une assurance vie hypothécaire doit souscrire un nouveau contrat. Il conserve toutefois son assurance vie individuelle existante si c'est l'option qu'il avait choisie. «Prenez des assurances à part, ça va coûter des peanuts!» lance la conseillère.

10. À quoi sert une pré-approbation hypothécaire?

Ce processus permet de déterminer, avant même de magasiner une propriété, à quel taux d'intérêt un prêteur hypothécaire accepte de vous octroyer un certain montant d'argent. La pré-approbation est de plus en plus encouragée chez Desjardins, indique Colette Blais. «C'est pratique pour les nouveaux emprunteurs. Ça permet de valider le crédit, de donner des paramètres avec lesquels ils peuvent être à l'aise, avant d'aller voir sur le marché, et non le contraire.»

lrichard@lesoleil.com

Photo: Photothèque Le Soleil

Ça vaut la peine de sortir sa calculette avant de prendre une décision.