Faut-il acheter avant de mettre en vente ? Faut-il dire oui au courtier qui vous propose (pas très subtilement) de passer outre à l’inspection ? Quelle est la limite budgétaire à ne pas dépasser dans un contexte de surenchère ? Guide du parfait acheteur et du très bon vendeur.

Se donner du temps

« Le problème, dans ce marché qui demeure très actif, ce n’est pas de vendre, expose le courtier immobilier Mike Cyr. Le véritable enjeu, c’est de trouver une propriété qui nous convient, dans les délais souhaités, à un prix acceptable. »

Pas étonnant qu’il recommande à ses clients vendeurs de prendre les devants, et surtout, de ne pas attendre d’avoir vendu pour se lancer à la recherche de leur prochaine propriété.

« Ça se résume à cela, convient-il. Il faut commencer ses démarches [d’acquisition] dès maintenant si on veut espérer avoir un toit où se loger pour le 1er juillet prochain ! »

Se faire accompagner

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

Les acheteurs ont intérêt à se faire accompagner par un courtier à qui ils peuvent faire confiance.

Et qu’en est-il des acheteurs, tout particulièrement ceux qui veulent accéder à la propriété ? Quelle stratégie doivent-ils adopter pour ne pas se retrouver le bec à l’eau à la fin du printemps ?

« Ils ont tout intérêt à se faire accompagner par un courtier à qui ils peuvent faire confiance, expose Mike Cyr, actif dans le marché des Cantons-de-l’Est. Un des moyens consiste à signer un contrat de courtage acheteur. »

Il précise que cette façon de procéder, contrairement à certaines prétentions, n’entraîne aucuns frais pour les clients acheteurs. « Le but, c’est d’avoir un courtier qui travaille dans votre intérêt », soulève-t-il.

La clé : la rapidité !

Ce n’est un secret pour personne : les propriétés continuent de se vendre en surenchère, parfois même plus de 100 000 $ au-dessus du prix affiché. Dans un tel contexte, la clé d’une transaction réussie demeure la rapidité d’action. Et ça va bien au-delà de la préautorisation hypothécaire…

« C’est d’ailleurs beaucoup plus facile d’y arriver lorsque nos clients suivent nos conseils, fait valoir Annie Descôteaux, courtière immobilière chez Royal LePage. Mais il arrive que certains se montrent hésitants, pour toutes sortes de raisons. »

Elle convient que c’est un peu plus difficile pour les premiers acheteurs, qui vont exprimer de nombreuses craintes en cours de démarches. « Ils mettent plein de conditions, comme remplacer le chauffe-eau, au moment de déposer l’offre d’achat [et ça peut faire avorter la transaction] », résume-t-elle.

Ces acheteurs, observe-t-elle, sont souvent locataires. Ils doivent décider s’ils vont renouveler leur bail, ou mettre leur logement en sous-location, ce qui ajoute au stress de la négociation.

Le gros bout du bâton

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Les vendeurs veulent nécessairement obtenir un certain prix pour leur maison exceptionnelle, mais essaient aussi parfois de revoir le taux de la commission à la baisse.

Annie Descôteaux, qui est active dans le marché de Lanaudière, constate, sans surprise, que les vendeurs ont encore « le gros bout du bâton ». Et ils ont « beaucoup d’attentes », reconnaît la courtière.

Il y a le prix qu’ils veulent obtenir pour leur « maison exceptionnelle ». Il y a aussi le taux de la commission — à plus ou moins 5 % — qu’ils souhaitent revoir à la baisse.

« C’est correct. Je ferais sans doute la même chose si j’étais à leur place », admet-elle.

À un taux de 5 %, précisons que la commission à verser lors de la vente d’une propriété de 600 000 $ atteindra 30 000 $.

Tout en convenant que son travail consiste à vendre des propriétés, Mme Descôteaux tient à préciser qu’elle se sent « responsable » envers ses clients quand elle « prend un mandat ». « [Avec la surchauffe immobilière], je veux m’assurer qu’ils pourront trouver une autre propriété après avoir vendu la leur. »

La capacité de payer

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Une maison, c’est aussi des coûts d’entretien qui s’ajoutent.

Avec des prix qui explosent — prix médian de 541 000 $ pour les unifamiliales et de 381 000 $ pour les condos (source : APCIQ, janvier 2022) —, nul besoin de préciser qu’il est important de mesurer sa capacité de payer pour accéder à la propriété, ou encore pour déménager dans une plus grande maison.

« Il faut respecter le budget qu’on s’est fixé, ne pas aller au-delà, souligne Sandra Allard, qui dirige la firme de courtage hypothécaire Planiprêt. Chaque cas est unique. Chaque histoire est différente. »

Cela suppose également que les acheteurs « ne doivent pas uniquement négocier un taux [d’intérêt] hypothécaire », relève-t-elle.

« Mais je constate que les emprunteurs ne disposent pas de toutes les informations pour prendre une décision éclairée, dit-elle. À titre d’exemple, il peut y avoir des contraintes liées au fait de choisir un taux fixe [sur trois ou cinq ans]. Dans ma pratique, un client sur deux renégocie son hypothèque avant terme, soit pour cause de séparation, soit parce que des travaux majeurs s’imposent. »

Un château… ou une histoire d’horreur ?

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L’acheteur doit exiger l’inspection de la propriété convoitée même si la situation est parfois pressante.

Quoi qu’il en soit, il ne faut jamais perdre de vue que l’achat d’une propriété vient avec des coûts, qui peuvent hypothéquer les finances des propriétaires occupants, rappelle Sandra Allard. D’où l’importance de ne pas se fier uniquement aux critères des institutions prêteuses qui calculent le ratio d’endettement, chacune à leur manière.

La maladie, la perte d’un emploi, l’automobile qui vient de rendre l’âme…

Payer l’hypothèque, c’est une chose. Respecter toutes ses obligations, et même celles qu’on n’avait pas prévues, c’en est une autre.

« Un château peut devenir une histoire d’horreur, sur le plan financier », prévient la spécialiste du financement.

On aura compris, dans cette mise en garde, que ce serait une bien mauvaise idée de ne pas exiger l’inspection de la propriété convoitée, de crainte qu’elle nous glisse entre les doigts. Même dans un marché aussi effervescent où les vendeurs n’hésitent plus à faire inscrire dans la fiche descriptive : « Sans garantie légale, aux risques et périls de l’acheteur », dit Sandra Allard.