La maison de briques beiges surmontée d’une jolie corniche se dresse dans une rue tranquille du Plateau. À l’intérieur, on trouve le même cachet que la façade laisse supposer : moulures travaillées, boiseries, portes anciennes, détails délicats au plafond… Mais à ce caractère historique se juxtapose une intervention bien moderne, réalisée par des architectes, afin de rendre l’organisation de ce même espace plus actuel.
Lorsque Philippe d’Etcheverry et son conjoint Gabriel ont acquis la maison, il y a quelques années, il n’était pas question de faire table rase pour tout reconstruire à neuf. Et ce, même si le cottage, construit au début des années 1900, avait manifestement besoin d’amour.
« Notre objectif, c’était vraiment de conserver les éléments historiques de la maison, explique Philippe d’Etcheverry, alors qu’il nous accueille dans son chez-lui lumineux. Donc on a essayé de préserver tout ce qu’on pouvait. »
Le couple aimait aussi la disposition des pièces, même s’il y avait beaucoup de cloisons, souligne Guillaume Marcoux, architecte à la firme Microclimat. « Dans l’esprit original de la commande, les clients aimaient vraiment le cachet, avec l’escalier au centre, ainsi que la façon dont s’organisaient les pièces. Mais ils cherchaient quand même à ajuster la maison aux besoins contemporains, puisqu’ils s’y sentaient un peu à l’étroit. »
Maison étroite
Effectivement, la maison est étroite : construite sur un lot un peu moins large que la norme montréalaise, elle possède de plus un petit passage extérieur de côté, ce qui réduit sa largeur à aussi peu que 20 pi, et même 18 pi à l’intérieur des murs.
L’avantage, c’est qu’on n’y manque jamais de lumière, parce que le lot n’est pas profond non plus. Mais pour remédier à ce manque d’espace, les architectes ont ajouté une pièce à l’arrière. « C’est un petit salon d’hiver, qu’on appelle aussi la pièce jardin. Elle fait le trait d’union entre la propriété et la cour arrière », explique Guillaume Marcoux.
À l’image du reste de la maison, cet ajout possède également des dimensions réduites afin de ne pas trop empiéter sur la cour, déjà petite. « On voulait quand même garder un jardin, puisqu’on aime beaucoup jardiner », précise Philippe d’Etcheverry.
Ce qu’elle perd en largeur, la pièce le récupère toutefois en hauteur. Puisqu’elle est située au niveau jardin, elle se trouve quelques pieds plus bas que le reste du rez-de-chaussée. Ce qui permet également de garantir un peu plus d’intimité aux occupants, en plus d’éviter quelques vues gênantes, dont celle sur la station-service qui se trouve sur la rue commerçante derrière.
Il y avait une volonté de s’ouvrir, mais il fallait quand même stratégiquement trouver des façons d’avoir des vues en diagonale plutôt que des vues directes.
Guillaume Marcoux
« Quand on est debout dans l’agrandissement, on a l’impression d’être dans le jardin », ajoute Philippe d’Etcheverry.
Contrairement à la maison d’origine, où les ouvertures dans les murs de briques sont plus petites, la lumière entre à flots par les baies vitrées dans ce nouvel espace. « Cette pièce-là, elle n’a pas le caractère d’une pièce ancienne », remarque l’architecte Guillaume Marcoux, en référence notamment à ses ouvertures. « Avec la hauteur de la porte patio, qui va chercher l’effet plancher plafond, c’est un regard à la cour qui est complètement différent que les ouvertures anciennes permettaient à travers la brique. »
Les architectes ont d’ailleurs voulu que cet aspect plus moderne arrive progressivement dans la maison. C’est pourquoi l’ajout est situé derrière, et non dès l’entrée. Le comptoir-lunch, au bout de la cuisine, joue aussi le rôle de filtre entre ancien et nouveau. « Il fait une forme de transition entre la partie de la cuisine et le jardin d’hiver », note Guillaume Marcoux. Sa position stratégique en fait également un endroit agréable où s’asseoir. « C’est le petit îlot du matin et, de cette position-là, on a une vue à travers les grandes ouvertures de la pièce jardin vers l’extérieur », poursuit l’architecte.
À l’étage
Au milieu du rez-de-chaussée trône l’imposant escalier, qui a gardé tout son cachet d’époque avec ses barrotins peints en blanc. Il mène à l’étage, là où se trouvaient autrefois quatre chambres, une à chaque coin.
Même si la configuration d’origine a été à peu près conservée, quelques changements y ont été apportés pour une meilleure utilisation de l’espace. D’abord, l’une des quatre chambres a été transformée pour y aménager une plus grande salle de bains, à l’arrière. Là où se trouvait la salle de bains d’origine, au sommet du grand escalier, on a niché un petit espace bureau avec une bibliothèque intégrée, pour tirer le meilleur parti du puits de lumière. Les trois autres pièces sont composées de deux chambres, à l’avant, puis d’un bureau fermé, qui donne sur la cour.
Philippe et Gabriel ne regrettent absolument pas d’avoir tout fait pour préserver le patrimoine de la maison, en l’adaptant néanmoins aux besoins du jour. « Si tu achètes une maison comme ça, que tu mets tout à terre et que tu fais un immense loft, ça perd un peu de son âme, constate Philippe d’Etcheverry. C’était plus que de la déco, c’était vraiment de redonner une autre vie à cette maison-là. »