Mathieu Ferron n’est pas archéologue, encore moins égyptologue, mais cela ne l’a pas empêché d’exhumer une curieuse momie en effectuant des travaux de rénovation dans sa demeure de Yamachiche.

Dormait en effet dans ses murs, depuis plus de 120 ans, un numéro de La Presse datant du jeudi 18 janvier 1900. Oubliée durant la totalité du XXe siècle, cette relique journalistique, collée au mur et sur des planches de bois, avait été apposée lors de rénovations beaucoup plus anciennes. M. Ferron l’a découverte alors qu’il était en train de refaire de fond en comble cette pièce non utilisée depuis des lustres pour y installer la chambre de son fils Jeremy.

PHOTO FOURNIE PAR ROSE-MARIE PAQUIN

Dans la future chambre de Jeremy, 10 ans, trônera cette une
 de La Presse de 1900, dans son emplacement original. 

« Ils avaient construit une sorte de garde-robe pour camoufler la cheminée et appliqué le papier journal pour isoler. C’était le moyen d’isolation à l’époque », raconte celui qui travaille comme livreur et installateur de portes et fenêtres.

PHOTO FOURNIE PAR ROSE-MARIE PAQUIN

Mathieu Ferron a recouvert l’édition d’une couche de vernis pour la protéger.

Plutôt que d’éradiquer cette mémoire lointaine, il a décidé de conserver la une du journal, laquelle fait corps avec le ciment, en l’encadrant avec des planches de bois. Elle sera ainsi partie intégrante de la décoration de la future chambre de son fils. « Comme c’était poussiéreux et friable, j’ai mis un vernis pour sceller et protéger le tout », explique M. Ferron. Quant aux autres pages collées sur des planches de bois, elles ont été cédées à un ami pour un projet encore à préciser.

Manchettes d’antan

PHOTO SYLVAIN MAYER, ARCHIVES LE NOUVELLISTE

L’Enfilade-de-Maisons-en-Brique-Rouge-de-Yamachiche, à laquelle appartient la demeure de Mathieu Ferron, est considérée comme un site historique.

Ce n’est pas la première fois que le résidant de Yamachiche réalise des trouvailles dans sa maison-musée. Il y a déjà déniché des journaux de 1902 glissés sous des planchers, toujours à des fins d’isolation, ainsi que d’antiques bouteilles d’alcool. Peu surprenant, puisque sa demeure fait partie de L’Enfilade-de-Maisons-en-Brique-Rouge-de-Yamachiche, un alignement de 12 bâtiments résidentiels construits au XIXsiècle, classé site patrimonial. Datant de 1838, la maison de M. Ferron avait été acquise par ses grands-parents dans les années 60 après qu’ils ont vendu leur ferme.

PHOTO FOURNIE PAR ROSE-MARIE PAQUIN

Bien que des bribes de papier manquent à l’appel, le journal est très lisible. En manchette principale, un des épisodes de la guerre des Boers. 

De son propre aveu, l’occupant des lieux n’est pas un lecteur assidu de journaux. « Je lis seulement ceux que je trouve dans les murs ! », dit-il en plaisantant. Autant dire que ces nouvelles ne sont plus très fraîches ! À la une de ce numéro datant de la 16e année d’activité de La Presse, on peut lire un article relatant des manœuvres dans le cadre de la seconde guerre des Boers, conflit impliquant les Britanniques en Afrique du Sud. On y apprend aussi que la compagnie ferroviaire du Grand-Tronc a fait l’acquisition d’une partie de la rue Albert, à Montréal : des travaux sont à prévoir. Également, les journalistes de l’époque nous informent que des douaniers et des pompiers seraient impliqués dans des affaires de disparition de marchandise. Conflit, cônes orange, magouilles : en 120 ans, les grosses manchettes des journaux ont-elles vraiment changé ?

PHOTO FOURNIE PAR ROSE-MARIE PAQUIN

Une planche de bois avec des pages du journal d’époque ont aussi été retrouvées. Elles ont été léguées à un ami de la famille.

En feuilletant le numéro original retrouvé dans les archives numériques de La Presse, nous avons aussi découvert des publicités pas piquées des vers : « Pour les athlètes et les sports, le vin St-Michel est indispensable », vante un encart.

ARCHIVES LA PRESSE

De drôles publicités se trouvent dans ce numéro de 1900 !

Reste à savoir si, dans 120 ans, quelqu’un retrouvera cet article dans une tablette électronique coulée dans un mur. On ne se le cachera pas, c’est beaucoup moins sûr…