Une maison canadienne de deux étages, à Vaudreuil-Dorion, a changé de vocation l’automne dernier. Avec ses lucarnes, son toit à deux versants et son revêtement de crépi, elle aurait pu être construite il y a plus d’un siècle et avoir vu grandir plusieurs générations. Elle n’a pourtant été bâtie que dans les années 70. Elle a accueilli les membres d’une seule famille, pendant une quarantaine d’années. Or, elle poursuit d’une certaine façon l’œuvre de celui dont elle porte le nom, Réjean Boyer.

Le nom de l’ancien maire de Vaudreuil-Dorion, en fonction de 1985 à 1989 puis de 1998 à 2005, résonne fort dans la municipalité, où il était très engagé. L’ancien politicien, qui avait aussi enseigné, avait la réussite des enfants à cœur, expliquent ses deux filles Élise et Sophie Boyer.

« Notre père a consacré sa vie à la communauté, précise l’aînée, Élise. Le bien-être des enfants était très important pour lui. La réduction des inégalités sociales était une de ses causes. »

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Que de fois Sophie et Élise Boyer ont monté et descendu cet escalier ! Celui-ci est demeuré inchangé et donne beaucoup de chaleur à la maison.

Lorsque les deux sœurs ont mis la maison familiale en vente après la mort soudaine de leur père, en octobre 2017, elles ont été contactées pour que la demeure où elles ont grandi devienne une Maison de la famille. Interpellées, elles ont cherché à trouver un compromis pour faire en sorte que le projet se réalise.

« Nous avons fait une contre-offre philanthropique et nous avons choisi d’être donatrices, explique Élise Boyer. Le don a servi à la mise de fonds. Nous ne pouvions pas faire autrement. »

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Plusieurs éléments sont demeurés intacts. Comme la cuisine, qui arbore toujours les mêmes armoires.

La Maison de la famille a été inaugurée le 11 septembre 2019. Élise et Sophie Boyer sont retournées récemment dans la demeure, à la demande de La Presse. Elles étaient heureuses de voir comment l’habitation avait évolué. L’heure n’était pas à la nostalgie.

« J’aime les transformations, a souligné Sophie Boyer. L’ancienne chambre de nos parents est devenue une pièce d’aide aux devoirs. Cela plaît à notre mère, qui était bibliothécaire, que la chambre ait une nouvelle vocation liée au développement des enfants et au renforcement de leurs capacités. »

Chaleur de l’accueil

Plusieurs éléments sont demeurés intacts. Comme la cuisine, qui arbore toujours les mêmes armoires, et le magnifique foyer de pierres des champs, dans l’ancien salon. Même la table autour de laquelle Réjean Boyer a convaincu Guy Pilon, l’actuel maire de Vaudreuil-Dorion, de prendre la relève, en 2005, se trouve encore au cœur de la salle à manger. La famille a laissé d’autres souvenirs, comme un buffet, un tableau et une ancienne base de fer à repasser.

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Même la table autour de laquelle Réjean Boyer a convaincu Guy Pilon, l’actuel maire de Vaudreuil-Dorion, de prendre la relève, en 2005, se trouve encore au cœur de la salle à manger. La famille a laissé d’autres souvenirs, comme le buffet, qui accompagne la table et les chaises.

Il faut que les familles se sentent bien et soient accueillies dans un endroit chaleureux. Il ne faut pas que cela ait l’air institutionnel.

Élise Boyer

« Cette maison était un lieu de rassemblement quand nous étions jeunes, a précisé Sophie Boyer. Les professeurs de l’école secondaire de la Cité-des-Jeunes se retrouvaient ici le vendredi soir. Notre père organisait des partys de famille et d’amis. Ados, nos amis venaient chez nous parce qu’on avait une grande cour. »

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Un imposant foyer de pierres des champs occupe toujours l’ancien salon. Un tableau et une ancienne base de fer à repasser, laissés par la famille, contribuent aussi à rendre la pièce chaleureuse.

« C’est comme si l’organisme a redonné de la vie à la maison, qui avait vieilli et attendait des jours plus heureux », a renchéri sa sœur.

Les poutres dans l’ancien salon leur rappellent les origines de l’habitation, construite par leur père et leur grand-père, René Boyer, en 1976 et 1977, en s’inspirant d’un modèle de maison canadienne. Les poutres proviennent d’arbres que leur grand-père paternel, cultivateur à Vaudreuil, a coupés sur sa terre. Leur grand-père maternel, Gaston Laperrière, qui était électricien, a aussi été mis à contribution.

« Notre mère a fait la tournée des antiquaires pour trouver des meubles et de la quincaillerie d’époque, a précisé Élise. C’étaient les années 70, elle avait un rouet ! »

Les astres alignés

  • Sans la sensibilité et la générosité de Sophie Boyer (à gauche) et Élise Boyer (à droite), Diane Lyonnais (au centre) ne croit pas qu’une entente aurait pu être conclue. Les trois femmes sont assises autour de la table où elles ont négocié la vente de la maison.

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    Sans la sensibilité et la générosité de Sophie Boyer (à gauche) et Élise Boyer (à droite), Diane Lyonnais (au centre) ne croit pas qu’une entente aurait pu être conclue. Les trois femmes sont assises autour de la table où elles ont négocié la vente de la maison.

  • Sophie et Élise Boyer sont heureuses de voir que la maison où elles ont grandi reprend vie et contribuera à améliorer l’avenir de plusieurs enfants.

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    Sophie et Élise Boyer sont heureuses de voir que la maison où elles ont grandi reprend vie et contribuera à améliorer l’avenir de plusieurs enfants.

  • L’ancienne chambre de Sophie Boyer accueille des tout-petits.

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    L’ancienne chambre de Sophie Boyer accueille des tout-petits.

  • Sophie Boyer ouvre en riant la porte de l’ancienne armoire à chips. Sa sœur Élise dévoile quant à elle où se trouvait l’ancienne armoire à bonbons, juste à côté !

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    Sophie Boyer ouvre en riant la porte de l’ancienne armoire à chips. Sa sœur Élise dévoile quant à elle où se trouvait l’ancienne armoire à bonbons, juste à côté !

  • Le sous-sol est lumineux. Une halte-garderie y a été aménagée. Des ateliers de stimulation du langage y sont aussi organisés.

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    Le sous-sol est lumineux. Une halte-garderie y a été aménagée. Des ateliers de stimulation du langage y sont aussi organisés.

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Diane Lyonnais, présidente du conseil d’administration de la Maison de la famille Vaudreuil-Soulanges, croyait que cela valait la peine d’investir pour avoir un lieu de rencontre stable dans la localité. « Il faut avoir des rêves, a-t-elle précisé. Pour les 30 ans de notre organisme, en 2018, nous étions à la recherche d’une maison. J’avais connu Réjean Boyer quand j’étais au Centre de santé et de services sociaux de Vaudreuil-Soulanges. Il était dévoué à la cause des enfants. Quand j’ai appris que sa maison était en vente, cela a fait clic dans ma tête. Ce serait tellement symbolique que la Maison de la famille s’installe dedans ! »

Accompagnée de deux collègues, elle a fait une première visite incognito. Puis elle a demandé que les propriétaires soient présentes lors de la deuxième visite. Sophie, pharmacienne, et Élise, directrice générale de la Fondation Olo depuis 2010, ont accepté. Les chemins d’Élise Boyer et de Diane Lyonnais ne s’étaient jamais croisés, même si cette dernière a implanté le programme Olo (un œuf, un litre de lait et un jus d’orange par jour) au CLSC de Salaberry-de-Valleyfield en 1982, à l’intention des femmes enceintes. Elle a aussi été membre du conseil d’administration de la Fondation Olo, juste avant qu’Élise Boyer s’y joigne.

PHOTO FOURNIE PAR ÉLISE BOYER

En 1977, la maison canadienne établie le long de la rue Louise-Josephte, à Vaudreuil-Dorion, était flambant neuve, malgré son apparence ancienne. Réjean Boyer l’a construite avec l’aide de son père, René Boyer, et de son beau-père, Gaston Laperrière.

« Sans leur sensibilité et leur générosité, nous n’aurions pas pu en venir à une entente », a fait remarquer Mme Lyonnais.

La route a été longue et ardue avant que le rêve devienne réalité. Un changement de zonage était nécessaire et certaines craintes dans le voisinage ont dû être apaisées. Une vaste campagne de financement a été lancée en partenariat avec la municipalité de Vaudreuil-Dorion, présidée par son maire, Guy Pilon. Des travaux de rénovation ont aussi été effectués pour respecter de nouvelles normes. Plusieurs généreux donateurs se sont alors manifestés pour donner de leur temps ou une contribution matérielle.

  • Élise Boyer est née peu après la construction de la maison, en 1977. Au début, les armoires de bois de la cuisine avaient un fini naturel. Elles ont depuis été peintes en blanc. 

    PHOTO FOURNIE PAR ÉLISE BOYER

    Élise Boyer est née peu après la construction de la maison, en 1977. Au début, les armoires de bois de la cuisine avaient un fini naturel. Elles ont depuis été peintes en blanc. 

  • Du palier de l’escalier, Élise et Sophie Boyer avaient une vue directe sur la cuisine. Elles s’y installaient lorsqu’elles ne voulaient pas dormir. De leur poste, dans le temps des Fêtes, elles pouvaient voir leur mère emballer des cadeaux…

    PHOTO FOURNIE PAR ÉLISE BOYER

    Du palier de l’escalier, Élise et Sophie Boyer avaient une vue directe sur la cuisine. Elles s’y installaient lorsqu’elles ne voulaient pas dormir. De leur poste, dans le temps des Fêtes, elles pouvaient voir leur mère emballer des cadeaux…

  • Réjean Boyer a longtemps porté une moustache. On le voit ici avec ses deux filles, encore petites.

    PHOTO FOURNIE PAR ÉLISE BOYER

    Réjean Boyer a longtemps porté une moustache. On le voit ici avec ses deux filles, encore petites.

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« Notre père a participé à la sauvegarde de la Maison Félix-Leclerc, à Vaudreuil, et il a été au conseil d’administration de la Maison Trestler, à Vaudreuil-Dorion, a souligné Élise Boyer. Ce n’est pas du même ordre, mais nous sommes heureuses qu’il y ait une Maison Boyer à Vaudreuil-Dorion. C’est une belle façon de souligner l’engagement de notre père dans sa communauté. »