Le vendredi 13 août 2010, sept villégiateurs posent leurs vélos et bottes de randonnée sur un coteau en périphérie d'Eastman, dans le versant sud-ouest du mont Orford. Ils ont quitté Montréal-la-trépidante pour un week-end dans l'innovante maison Orfie, qui marie avec bonheur l'architecture contemporaine et la performance écologique. Cette habitation de campagne est la première, au Québec, à recevoir la certification LEED Platine du Conseil du bâtiment durable du Canada.

L'architecte Rob Miners, du Studio MMA atelier d'architecture, a réussi à créer un sentiment d'espace dans ce volume «écologiquement correct»: 1400 pieds carrés avec trois chambres à coucher. La construction est un bloc rectangulaire simple, doté d'un toit à deux versants, muni d'innombrables fenêtres qui laissent entrer la nature dans les espace de vie. Elle est posée sur une dalle de béton à chauffage radiant et munie d'un foyer de masse «pas trop massif», avec ses deux faces vitrées, sa cheminée séparée et son petit four à pizza. Quelques matériaux bruts, comme des poutres en pruche et une rampe d'acier, apportent un accent rustique.

Michel, qui occupe avec Annie la pièce multifonctions, sur la mezzanine, se dit «épaté par la créativité de l'architecture», malgré sa simplicité. La chambre du couple est fermée par un mur de vitre qui laisse entier le contact visuel avec le salon, un étage plus bas. Pour avoir leur intimité, les occupants n'ont qu'à tirer le rideau sur ce mur transparent. «Parfois, l'architecture contemporaine est difficile à interpréter, dit Michel, un habitué de Visites libres sur ArTV. Ici, c'est simple et généreux, cette lumière et cette nature. Et on n'a pas l'impression que c'est une maison pour riches seulement.»

Les compteurs en action

Revenu en nage d'une excursion de vélo sur l'Estriade, Michel file dans la douche. Au moyen des compteurs placés en évidence entre le salon et la cuisine, on déduit qu'il consomme 15,44 litres d'eau potable (de puits) et 0,02$ d'électricité (à raison d'un taux de 45 cents de l'heure pendant presque trois minutes). Il faudrait attendre l'hiver pour observer un appareil plus énergivore: la fournaise qui chauffe le mélange eau-glycol du plancher radiant.

Une fenêtre inattendue

Richard, «l'homme des bois» du groupe, fort en cueillette et en gastronomie, ramène à la cuisine des brins de thé des bois cueillis dans le Parc national du Mont-Orford. En coupant ses légumes sur le comptoir de quartz, il se réjouit de voir encore la forêt, côté nord, grâce à l'étroite et longue fenêtre qui court horizontalement dessous les armoires. «Si une grenouille ou un oiseau vient à passer, on ne le rate pas», dit-il.

Consommer moins

Vivre dans la maison Orfie nous rend sensible à l'utilisation de l'eau et de l'électricité. Annie a remarqué que les luminaires demeuraient allumés inutilement et Richard que l'échangeur d'air fonctionnait toujours malgré les fenêtres ouvertes. Nous étions portés à nettoyer les assiettes et les légumes en laissant moins couler l'eau, et à ne pas nous éterniser sous la douche.

Au moment de quitter la maison, nous cumulons une consommation d'eau de 949,05 litres (583,82 litres d'eau de puits plus 365,23 litres d'eau de pluie) et une consommation d'énergie estimée de 5,46$ ou 74 kilowattheures. (Nous n'avons pas le relevé final: le lave-linge fonctionnait encore au moment du départ). Ces chiffres sont mis en perspective dans l'encadré.

Être conscient: pourquoi?

À quoi ça sert de savoir que nous avons consommé moins de 6$ d'électricité (74 kilowattheures) et de 400 litres d'eau?

À titre de comparaison, un Montréalais consomme en moyenne 225 litres d'eau par jour (www.eausecours.org/espublications), alors que nos estivants d'Orfie ont consommé par personne 73 litres par jour.

Par ailleurs, la maison Orfie consomme 50% moins d'énergie qu'une même surface habitable conventionnelle, et mieux encore si on utilise le foyer de masse.

Mais vivre dans une maison LEED suffit-il à rendre notre empreinte écologique acceptable? «Nous manquons de connaissance pour répondre à cette question, dit Edith Lacroix, porte parole de la coalition Eau Secours! Nous ignorons, notamment, la capacité de recharge des nappes phréatiques. Nous savons seulement que certaines municipalités ont épuisé cette ressource. Les écologistes estiment qu'il n'y a pas une goutte d'eau de trop dans les écosystèmes et que la seule chose qu'on sait avec certitude est qu'il ne faut pas gaspiller.»

Les frais d'hébergement pour la réalisation de ce reportage ont été payés par Le Vertendre.