«J'habite sur l'une des plus belles rues de Québec», dit Atshukué Boudreault, 27 ans. Ce qui la rend si magnifique? Les grands arbres qui la bordent sur toute sa longueur, des trottoirs larges, des bâtiments bien conservés, qui rappellent parfois La Nouvelle-Orléans.

«J'habite sur l'une des plus belles rues de Québec», dit Atshukué Boudreault, 27 ans. Ce qui la rend si magnifique? Les grands arbres qui la bordent sur toute sa longueur, des trottoirs larges, des bâtiments bien conservés, qui rappellent parfois La Nouvelle-Orléans.

Cette résidence est l'un des joyaux du quartier. Construite en 1924, elle a conservé ses merveilleuses galeries.

Mme Boudreault a déménagé sur la rue Parent alors qu'elle avait 10 ans. Après avoir passé quelques années à l'extérieur de Québec, la voici de retour, avec sa fille de cinq ans, dans un logement de la maison où elle a grandi.

«Ma rue est tranquille. Il y a beaucoup de personnes âgées. Et la centrale de police est tout près, alors la police passe souvent dans le coin. (...) C'est un quartier familial, où il y a peu d'action», explique l'étudiante à la maîtrise en santé communautaire.

Mais l'action n'est pas loin! Salles de spectacles, restaurants, dépanneurs, caisse populaire, circulation... On peut presque toucher les rues Saint-Vallier et Saint-Joseph!

Selon Mme Boudreault, «l'avantage numéro un» de la rue Parent est sa proximité à une école primaire. Sa fille va maintenant à l'école Sacré-Coeur, celle-là même qu'elle a fréquentée.

Le Soleil a rencontré François Boily alors qu'il effectuait des rénovations sur sa demeure par un beau dimanche ensoleillé. Il habite l'avenue Parent avec sa conjointe depuis cinq ans. La proximité des services et la beauté de la rue les ont attirés.

D'un simple point de vue financier, il a fait une bonne affaire. Lors de l'achat, sa maison était abordable. «Là, c'est moins vrai. Elle a doublé de valeur», explique-t-il, en affirmant qu'un évaluateur agréé l'a confirmé.

M. Boily admet par ailleurs ne pas profiter suffisamment du parc Victoria. «C'est un beau parc, c'est les plaines d'Abraham de la Basse-Ville. Je trouve par contre que ça manque d'entretien. Vendredi (veille de la Saint-Jean), ils ont coupé le gazon en niaiseux. C'était vraiment pas propre pour la fin de semaine.»

Selon lui, le parc est sous-exploité. «Ce que je déplore, c'est qu'il ne se passe absolument rien l'hiver. (...) Le Carnaval de Québec pourrait y faire quelque chose de fantastique. Le Festival d'été pourrait aussi sortir du Vieux-Québec pour présenter quelques spectacles ici», estime le technicien en métallurgie.

Un peu d'histoire

L'avenue Simon-Napoléon-Parent s'est déployée grâce au parc Victoria.

En septembre 1889, quatre mois après un terrible incendie, le village Saint-Sauveur, situé entre les rues Langelier et Marie-de-l'Incarnation, est annexé à Québec. Ainsi, ce quartier ravagé va connaître une période prospère, grâce aux maires François Langelier et Simon-Napoléon Parent. À l'époque, Charles Baillargé, ingénieur de la Ville de Québec, parle de «la transformation la plus magique, sans exagération, dont aucune ville ait jamais été témoin».

Saint-Sauveur entre ainsi dans l'ère moderne. Réseau de distribution d'eau, téléphone, éclairage électrique, trottoirs, poste de pompiers et de police. En trois ans, tout cela s'ajoute au décor du quartier.

L'un des principaux projets est alors la confection d'un parc public près des Halles Saint-Pierre, où est maintenant situé le centre Durocher. L'idée est abandonnée, puis ravivée par le maire Parent: un espace vert sera conçu, mais sur un terrain encerclé par la rivière Saint-Charles, tout près de l'Hôpital général. Le parc Victoria est inauguré en 1897.

Atshukué Boudreault et sa fille Maëlle apprécient la beauté de leur avenue.

La Ville a acquis, à la fin du XIXe siècle, un terrain de 18,3 mètres de largeur qui s'étend de la rivière Saint-Charles à la rue Bédard, dans un axe qui détonne avec le reste des rues du secteur. Un pont est alors construit pour relier ce terrain au parc. L'avenue Parent apparaît sur les cartes.

Jadis, la rivière Saint-Charles avait une courbe de plus, un petit méandre qui caressait le parc Victoria sur toute sa longueur. Ce virage a été asséché en 1957 pour bâtir le boulevard Laurentien.

«L'assèchement de la rivière a été une erreur», croit Daniel Tremblay, 81 ans, un natif du quartier qui habite la même maison depuis 1951. «On pouvait pêcher l'éperlan, se rappelle-t-il. Et là où il y a la centrale de police, c'était notre patinoire l'hiver et on faisait du patin à roulettes l'été.» Malgré tout, M. Tremblay craint que les travaux d'embellissement de la rivière ramènent avec eux les inondations et les éboulis de terre, fréquents à l'époque, dit-il.

Distinction

Dès le départ, l'avenue Parent est consacrée au prestige. De chics résidences y poussent, en contradiction avec la vocation ouvrière de Saint-Sauveur.

D'autres rues ont été bâties dans le même axe que l'avenue. Les rues Des Recollets, De Rigauville, Chevrière et Parent sont contenues dans un triangle qui se voulait le lotissement «de prestige» du quartier. Mais seule l'avenue Parent garde aujourd'hui la teinture éclatante des grandes promenades. Mais ça n'en fait pas une rue snob pour autant. Bien au contraire.

Depuis 1991, Nicole a habité les quatre coins du quartier Saint-Sauveur. Elle est maintenant propriétaire d'un quadruplex sur la rue Chevrière, la petite voisine de l'avenue Parent. «Je trouve que ce quartier est familial et populaire. Ce sont des gens qui habitent ici depuis des années. Pour moi, c'est important», dit-elle.

Les gens du quartier sont en effet fidèles à leur coin. Au cours des cinq dernières années, sur les rues déjà nommées, une seule maison a été vendue, selon la Chambre immobilière de Québec.