Une cassure commence souvent près du point de convergence de deux murs de maçonnerie. Elle court en descente d'escalier vers les fondations et s'aggrave chemin faisant. Sur le mur opposé, une faille concommitante peut se former.

Une cassure commence souvent près du point de convergence de deux murs de maçonnerie. Elle court en descente d'escalier vers les fondations et s'aggrave chemin faisant. Sur le mur opposé, une faille concommitante peut se former.

D'ordinaire, la partie intérieure qu'elle encadre donne lieu à un décroché de quelques pouces vers le bas. Dans ce cas, l'affaissement s'est produit. Le reste de la maison, lui, est sous tension.

Les efforts pour remettre la maison en état sont d'importance.

«En fait, quand les portes de la maison ferment mal, que des lézardes paraissent dans le cadrage des portes et fenêtres, que le plancher n'est plus au niveau au point qu'un crayon ne tient plus en place et que, de surcroît, il y a une fêlure inquiétante dans les murs extérieurs jusqu'aux fondations, pareille situation induit un problème sévère. Dans ce cas, il faut se hâter de consulter», estime Lévis Ouellet, vice-président de la société Héneault & Gosselin (H & G), laquelle est spécialisée dans la stabilisation, le redressement et le transport de bâtiments.

Une fracture en V peut aussi se produire au milieu d'une façade, ainsi que le montre l'Association des consommateurs pour la qualité dans la construction (ACQC), dans le deuxième de ses opuscules sur les «maisons fissurées».

La cause

Comme une pomme de terre s'assèche puis ratatine, les sols glaiseux font de même. À la suite d'une sécheresse, éventuellement répétitive durant quelques années, l'argile aura perdu une bonne quantité d'eau dont elle était gorgée.

Sous les fondations, le sol se tasse, laissant un vide au-dessus de lui. Ensuite, le bâtiment en porte-à-faux est, par gravité, entraîné vers le bas.

«Un affaissement peut aussi être attribuable à des sources d'eau souterraines. Il y en a qui tourmentent le sol et déstabilisent les maisons», tient à préciser le président de Pieux de stabilisation du Québec, Jean Doyon.

D'un autre côté, lorsque le sol est déjà en panne d'eau, il n'est pas rare que de gros arbres assoiffés viennent achever la déshydratation.

Pour réparer le tout, une tranchée est creusée autour de la maison. Les fondations sont fortifiées. Puis des pieux sont engagés très profondément dans le sol. De gros, de très gros travaux...

Encore que les vibrations résultant de la circulation autoroutière, de travaux de dynamitage ou d'un tremblement de terre peuvent, pour leur part, faire frémir des maisons. De mauvais matériaux de remblayage ou d'autres qui seraient mal compactés peuvent aussi provoquer des désordres.

D'un autre côté, les sols urbains sont moins «abreuvés» qu'ailleurs. Car les eaux de pluie, ne pouvant s'insinuer dans l'asphalte, le pavé, sous les maisons, sont détournées vers les égouts pluviaux.

À Montréal, rappelle Conrad Gosselin, président de H & G, avant que le tunnel Louis-Hippolyte-Lafontaine soit fait, le parc des maisons environnantes reposait sur un sol normal. Par la suite, l'ouvrage de génie civil a provoqué l'abaissement des eaux souterraines. Puis survinrent des retraits de sol et des fractures d'immeubles.

Il faut cependant compter plusieurs années avant que tout cela n'arrive. Jusqu'à 20 ans parfois, précise M. Gosselin.

Limoilou

Dans le quartier Limoilou, Le Soleil a aperçu, au cours des dernières années, des maisons cassées. Une sur la 15e Rue, une autre sur la 8e Avenue qui a, du reste, subi des travaux de correction.

Pour une autre, côté ouest de la 4e Avenue, un ajour s'est formé à la rencontre de deux duplex. Le retrait ou le soulèvement du sol, présume-t-on, s'est produit à la jonction de leurs fondations.

Un peu plus loin, trois immeubles d'habitation ont été l'objet de dénivellation. Deux ont été réparés bien qu'ils seraient encore sujets à des problèmes. Pour l'un, reste à refaire les joints de mortier de la brique et remplacer un linteau de fenêtre. Le troisième reste à ragréer.

Enfin, boulevard Benoît-XV, deux pavillons multilogements d'un ensemble d'habitations se sont affaissés de 4 à 5 po. Ils ont été rectifiés tout dernièrement par Pieux de stabilisation du Québec. «Chacun a nécessité la mise en place de 70 pieux», précise M. Doyon.

Mode d'emploi

Pour réparer le tout, une tranchée est creusée autour de la maison. Les fondations sont fortifiées. Puis, des pieux sont engagés très profondément dans le sol. Jusqu'à 65 pieds, éventuellement.

Chaque pieu atteint un premier seuil de «refus» d'enfoncement. Mais le «refus» n'est complet que lorsque le sol s'oppose sans broncher à une pression double, durant cinq minutes au moins, de la charge que le pieu doit supporter.

Ensuite, la maison est redressée. Cela, au moyen de vérins hydrauliques superposés aux pieux. Puis les deux côtés des fissures se rejoignent. Enfin, des étriers immobilisent tout ça. Cette méthode a été échafaudée par Héneault & Gosselin au terme de nombreuses années de travaux avec le concours de chercheurs spécialisés en géotechnie de l'Université Laval.

Enfin, avant d'emplir la tranchée, on colmate les fissures. Dans la maison, on rectifie, entre autres, les planchers, la plomberie et les poutres qui ont gauchi.

Moins-value

Prix d'un tel travail pour une résidence ordinaire: 20 000 $ à 30 000 $. S'il n'est pas fait, les problèmes, qui donnent déjà une moins-value à la maison, peuvent empirer.

Si on réclame les services d'un évaluateur agréé pour déterminer la valeur marchande potentielle de sa propriété, son évaluation fera, en principe, abstraction de ce désordre structural.

«Dans son rapport, cependant, il aura obligation d'en faire mention, tout en recommandant une vérification par un ingénieur. Celui-ci établira le coût des travaux, lesquels devront être soustraits de la valeur marchande potentielle», déclare Christian Laflamme, évaluateur agréé au service de De Rico, Hurtubise & Associés de Sainte-Foy.

Michel Lamontage est agent immobilier agréé de Québec et président de la maison de courtage éponyme. Il est persuadé qu'une maison disloquée a un effet dissuasif sur les acheteurs.

«Un connaisseur pourrait s'accommoder d'une pareille maison, mais il entreprendra une négociation énergique pour obtenir une baisse de prix. Cela comparé à un autre qui ne s'y entend pas et qui se gardera probablement d'acheter car il sera enclin à appréhender le pire», estime M. Lamontagne.

Si la réparation a été faite, le vendeur devra fournir tous les documents afférents dont un relevé de niveau par un arpenteur géomètre. Ce dernier l'aura effectué à partir de boulons de contrôle installés avec une précision absolue après les travaux et dont le niveau aura été jugé parfait par un arpenteur. Le même peut-être.

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Pour en savoir plus:

Votre maison est fissurée, tomes 1 et 2. Brochures produites en collaboration par l'Association des consommateurs pour la qualité dans la construction.

Internet: consommateur.qc.ca/acqc