Ici, pas question d'un logement dans une zone commerciale, mais bien l'inverse. Le commerce a pignon sur rue dans un quartier tout ce qu'il y a de plus résidentiel. Comme la grande maison qu'ont habitée pendant près de cinq ans Virginie Lapointe et son conjoint Christian Morneau, au début 2000. Située à Boischâtel, sur l'avenue Royale, dans une zone pourtant aux apparences «100 % résidentielles», la demeure était un gîte du passant développé par le jeune couple.

Ici, pas question d'un logement dans une zone commerciale, mais bien l'inverse. Le commerce a pignon sur rue dans un quartier tout ce qu'il y a de plus résidentiel. Comme la grande maison qu'ont habitée pendant près de cinq ans Virginie Lapointe et son conjoint Christian Morneau, au début 2000. Située à Boischâtel, sur l'avenue Royale, dans une zone pourtant aux apparences «100 % résidentielles», la demeure était un gîte du passant développé par le jeune couple.

Il y a presque deux ans, en plus de devenir propriétaire de sa maison, la coiffeuse Annick Gignac a ouvert son propre salon sur le boulevard Laurier. Il occupe une bonne partie du rez-de-chaussée de sa demeure.

Grâce aux trois chambres aménagées, ils recevaient jusqu'à une dizaine de touristes chez eux, surtout l'été. «C'était déjà zoné commercial», se souvient Virginie à propos des démarches qu'ils avaient dû réaliser pour concrétiser leur projet. «La mère de Christian y avait déjà eu une boutique d'artisanat.»

Mis à part l'attention à porter au respect des normes pour obtenir le permis d'hébergement et la classification comme gîte, le tout s'est déroulé rondement. «C'est sûr que ça doit dépendre des municipalités, précise la femme de 28 ans. À Boischâtel, l'urbanisme était ouvert au projet.» La teneur récréotouristique de ce dernier plaisait. N'empêche, il n'était pas question de faire n'importe quoi pour autant.

Aujourd'hui, si le gîte n'est plus ouvert, ce n'est pas parce que le couple s'est buté à un dédale administratif ou qu'on lui a mis des bâtons dans les roues. «On était jeune!, lance Virginie sans amertume. Et pour faire ça, il faut que ce soit une vraie passion...»

Car si le bonheur d'avoir un gagne-pain à la maison était ce qu'ils recherchaient, le fait d'avoir toujours de la «visite» a fini par taxer les apprentis aubergistes, qui ont mis la clé dans la porte après presque cinq ans.

Avec la naissance de leur garçon il y a deux ans, le manque d'espace et de tranquillité se faisait sentir. «Veux veux pas, tu as toujours quelqu'un dans tes affaires. Christian, ça ne le dérangeait pas vraiment. Moi si! C'était bien exigeant et l'on n'était pas assez là», résume Virginie.

Reste que dépendamment de la sphère choisie, les activités en résidence conviennent à plusieurs. «Ça permet de favoriser la conciliation travail-famille», rappelle Richard Noël, architecte à la division d'urbanisme de la Ville de Québec. «Surtout qu'il y a de plus en plus de travailleurs automnes.»

Demeures en règle

Résultat des fusions municipales, la Ville est justement à harmoniser les divers règlements qui régissent ce type d'activités dans les anciennes municipalités. «Il n'y a pas de règles générales qui s'appliquent pour l'instant. Pour un couette et café, dans un arrondissement, il faut peut-être respecter un règlement, tandis que pour un autre ce sera six», illustre M. Noël. Actif dans le dossier, il s'attend à ce que la nouvelle politique soit présentée pour 2007.

Évidemment, les commerces en résidence déjà en fonction verront leurs droits acquis respectés. «En autant qu'ils étaient en règle au départ», avertit l'architecte.

En attendant, il faut s'en remettre à la division des permis de chaque arrondissement. Celle-ci verra à s'assurer que l'activité est possible dans la zone résidentielle visée et appliquera les restrictions en vigueur, à l'aide d'inspecteurs. Par exemple, dans le secteur La Cité, un permis faisant foi que tout est conforme sera délivré pour 50 $ (payable une seule fois).

Habituellement, un commerçant-résidant offrira plutôt un service qu'un produit. «C'est sûr qu'un artiste peintre pourra vendre ses toiles, une coiffeuse ses shampoings, de même qu'un traducteur ses documents», précise M. Noël. Il devra habiter le bâtiment, tandis que l'affichage et la superficie de l'aire publique devront être contrôlés.

«Ici, c'est semi-commercial», décrit la coiffeuse Annick Gignac, au sujet de la maison qu'elle a acquise, il y a environ deux ans. Alors qu'elle habite l'étage et le sous-sol, le rez-de-chaussée est occupé par son salon. Le fait qu'elle ait acheté la résidence, pratiquement telle quelle, d'un autre coiffeur a facilité son choix et ses démarches.

Elle a tout de même dû s'assurer que les installations étaient en règle. L'affichage pour son secteur sur le boulevard Laurier, à Sillery? «Pas plus de 0,4 mètre carrés, dit-elle avec précision.

Quant au salon de coiffure, sa superficie ne devait pas dépasser le tiers de l'espace habitable du domicile». «J'avais droit à un commerce, mais pas n'importe lequel», insiste-t-elle. Ainsi, ce qui était pratiquement devenu un handicap pour le vendeur était exactement ce qu'elle cherchait.

Aussi, il y a tous ces petits détails auxquels il faut s'attarder au quotidien, quand on fait des affaires chez-soi. La jeune entrepreneure pense notamment à l'entretien extérieur. «Il faut que ça soit toujours impeccable! Quand c'est juste ta maison, même si le gazon est un peu long, ce n'est pas bien grave. Mais là, ça ferait négligé.»

Sans compter que tout est toujours plus cher quand on a un commerce. De l'électricien au menuisier, en passant par le paysagiste, tous ceux qui offrent leurs services le font de façon «commerciale», rappelle Annick Gignac. Et ce, même si ça n'a pas de lien direct avec le salon. Mais pas de chance à prendre de toutes façons. «Car c'est sûr qu'on est un peu plus surveillé», affirme-t-elle avec résignation.

Marché difficile à cerner

Difficile de cerner le marché de la résidence commerciale. À la Chambre immobilière de Québec (CIQ), les statistiques de ventes présentées par les agents d'immeubles ne font pas cette distinction. Quant à savoir l'intérêt que génère de telles maisons à vocation double sur le plan de l'achat et de la vente, Marie-Hélène Ouellette, agente chez Remax 1er Choix, hésite à se prononcer.

«C'est difficile à dire», juge-t-elle. Car alors que certains secteurs ou installations peuvent être alléchants pour les acheteurs, d'autres auront l'effet contraire et seront difficiles à transiger. Du cas par cas, observe-t-elle. Puis il y a le prix qui peut gonfler à cause des équipements ou produits sur place, fait remarquer Mme Ouellette.

Comme pour Annick Gignac, qui avait une annexe à son contrat de vente. Elle rachetait les chaises et certains accessoires de l'ancien salon. «On m'a même proposé de racheter une partie de la clientèle. Mais j'ai refusé parce qu'il n'y avait rien qui me garantissait que les gens allaient continuer à venir ici. Puis, si le coiffeur avait finalement ouvert un salon de l'autre côté de la rue, j'aurais été coincée.»

La suite est connue. La transaction a fonctionné et les affaires vont bien. Preuve que même à la maison, il est bon de garder son flair et son sens des affaires.