Depuis quelques années, plusieurs Canadiens ont vu la valeur de leur domicile s'accroître d'un montant supérieur à leur salaire annuel.

Depuis quelques années, plusieurs Canadiens ont vu la valeur de leur domicile s'accroître d'un montant supérieur à leur salaire annuel.

Ainsi, une vieille maison semi-détachée dans un quartier en voie d'embourgeoisement de Toronto a récemment trouvé preneur à 421 500 $, même si son sous-sol n'est pas fini et qu'elle ne compte pas de stationnement. C'est 118 000 $ de plus que le prix qu'avaient payé les anciens propriétaires en 2002.

Évidemment, ce n'est rien en comparaison avec Malibu (Californie) où d'après le quotidien USA Today, une maison mobile est à vendre pour 2,7 millions $US. Et ce prix faramineux ne comprend même pas le terrain sur lequel elle est située.

Les économistes s'entendent pour dire qu'il n'y a pas de bulle immobilière au Canada pour le moment, même si les prix grimpent rapidement. À leur avis, il est donc peu probable que le marché s'effondre.

Baisse en 1981-82

Le planificateur financier Jim Rogers, de la firme Rogers Group Financial Advisors à Vancouver, rappelle néanmoins qu'en 1981-82, la valeur des maisons de la capitale britanno-colombienne a baissé de 30 % et qu'il a fallu attendre jusqu'en 1986 pour récupérer les pertes.

«Les gens considèrent leur maison comme leur investissement le plus sûr, souligne-t-il. La plupart d'entre eux n'emprunteraient jamais d'argent pour acheter des actions, par exemple, parce qu'ils craignent l'effet de levier. Pourtant, ils utilisent ce même mécanisme quand ils hypothèquent leur résidence principale.»

Selon lui, il faut s'attendre à ce que le marché immobilier s'essouffle. En fait, des données de Royal LePage indiquent que le ralentissement est peut-être déjà commencé. Le prix moyen d'une maison de deux étages n'a augmenté que de 6 % entre avril et juin, comparativement à 8,5 % pour le trimestre précédent. Il atteint désormais 318 390 $.

Et, d'après Statistique Canada, le taux de croissance annualisé du prix des maisons neuves a ralenti en mai pour s'établir à 4,6 %.

Benjamin Tal de Marchés mondiaux CIBC World ne s'attend pas à une dégringolade rapide, mais il se prépare à «un atterrissage en douceur et à un nivellement des prix qui aura des conséquences importantes sur une économie dont l'immobilier a été l'un des moteurs».

Parce qu'ils se sentent plus riches, les propriétaires de maison ont injecté quelque 50 milliards $ dans l'économie depuis trois ans, fait-il valoir.

Pendant ce temps, ils ont cessé d'épargner et dépensent même plus d'argent qu'ils n'en gagnent. Or la Banque du Canada nous prépare depuis des mois à une hausse des taux d'intérêt.

«Les banques vous donneraient la lune au sommet du cycle économique, mais elles ne vous prêteront pas quand l'économie sera au plus bas», insiste Brendan Caldwell, président de Caldwell Securities.

«Les gens les plus à risque sont ceux qui ont acheté une propriété dans un segment de marché qui a été inondé, comme celui des condos», pense M. Rogers. Les mises en chantier de ce type d'habitation sont pourtant toujours en pleine croissance.

À son avis, l'immobilier - incluant votre résidence principale, votre chalet et vos immeubles à revenu - ne devrait pas représenter plus du tiers de votre valeur nette. Un autre tiers prendra la forme d'actions et le reste de titres sera à revenus fixes.

Même ceux qui suivent la recette à la lettre ne devraient pas s'attendre à ce que leurs autres placements les protègent contre un crash immobilier. Ce qui nuit à l'immobilier nuit généralement aux actions et aux obligations aussi, explique le conseiller financier.

Brendan Caldwell le confirme. «Je crois qu'il n'y a pas de couverture adéquate», dit-il. Selon M. Tal, de la CIBC, en période de ralentissement, les titres défensifs, c'est-à-dire les obligations et les actions de banques ou de compagnies de service publique constituent encore le meilleur abri.

Pour éviter des maux de tête, ceux qui bénéficient actuellement de taux variables devraient songer à contracter une hypothèque à taux fixe d'un terme de trois à cinq ans. «Arrêtez d'essayer de trouver des aubaines. En essayant à tout prix de boire la dernière goutte du baril, on reçoit le couvercle sur le nez», énonce Jim Rogers.