Le fort mouvement d'accession à la propriété des dernières années n'a pas soulagé la pénurie de logements. Du moins, pas assez pour rendre la tâche plus facile aux locataires à faible et moyen revenus.

Le fort mouvement d'accession à la propriété des dernières années n'a pas soulagé la pénurie de logements. Du moins, pas assez pour rendre la tâche plus facile aux locataires à faible et moyen revenus.

À l'approche du 1er juillet, certains Montréalais risquent même de se buter à des portes closes. C'est le cas de Valérie Joubert, une mère seule d'une fille de sept ans. Depuis plus d'un mois, elle recherche un appartement dans le quartier Mercier, mais en vain. «C'est rendu carrément dramatique! Pourtant, je suis prête à débourser 700 $ par mois pour un 4 1/2», dit-elle.

À chaque tentative, le même scénario se répète. Soit la boîte vocale du propriétaire déborde, soit le logement est déjà loué ou encore il est trop cher. «J'ai même vu des 4 1/2 en demi-sous-sol à 925 $ dans Mercier!», s'exclame-t-elle. On n'est pourtant pas sur le Plateau!

Benoît Beauchamp, un Montréalais d'une trentaine d'années, se considère chanceux. Il vient de se trouver un 3 1/2 dans un sous-sol à 500 $... à Laval-des-Rapides! Malgré une recherche intensive d'un mois, il n'a rien trouvé d'abordable à Montréal. «Il existe deux types de logements sur le marché: les piqueries qui se louent à des prix de fou considérant leur état lamentable, et les appartements offerts à plus de 800 $ par mois», constate le futur Lavallois.

Moins de logements bas de gamme

Les statistiques démontrent pourtant une diminution de la pression sur le marché locatif. Selon la Société canadienne d'hypothèques et de logement (SCHL), le taux d'inoccupation dans l'agglomération de Montréal atteint maintenant 1,5 %, comparativement à 1 % en 2003. Il revient donc à son niveau de 2000 et devrait même augmenter à 2 % cette année.

Mais cette hausse cache une autre réalité, fait remarquer André Trépanier, du Regroupement des comités logements et associations de locataires du Québec (RCLALQ). «Le taux d'inoccupation augmente surtout dans le haut de gamme (loyer de 900 $ et plus) et dans le milieu de gamme (600 à 899 $). Dans le bas de gamme, le taux n'est que de 0,9 %», dit-il. Difficile, voire impossible, de se loger convenablement pour 500 $ à Montréal. «À moins d'accepter d'habiter au bord d'une autoroute», enchaîne M. Trépanier.

De plus, la quantité de logements bas de gamme est en diminution constante depuis cinq ans. Selon la SCHL, cette catégorie représentait 83 % du marché en 1999. La proportion a chuté en 2004 à 63 %. Et puisque les propriétaires ont tendance à augmenter substantiellement les loyers de leurs appartements lorsqu'ils les remettent sur le marché, la quantité des bas de gamme s'amenuise comme une peau de chagrin.

«Le hic, c'est que les bons appartements pas chers n'apparaissent pas sur le marché. Leurs locataires ou propriétaires les cèdent directement à des proches», pense M. Beauchamp. «Il faut utiliser au maximum notre réseau de connaissances pour dénicher la perle rare», ajoute Mme Joubert.

MM. Trépanier et Beauchamp déplorent aussi que malgré la hausse substantielle des loyers, le parc immobilier ne s'améliore pas. «Lors de ma recherche, j'ai visité les mêmes logements qu'il y a quatre ans. Ils sont aujourd'hui considérablement plus chers, mais demeurent dans un état pitoyable!», dénonce M. Beauchamp.

Proprios plus sélectifs

De l'autre côté de la lorgnette, les propriétaires affichent un ton beaucoup plus optimiste. La crise du logement commence à se résorber, disent-ils. «On constate que les logements restent plus longtemps sur le marché que par le passé. On assiste même à un retour des pancartes À louer», soutient Luc Courtemanche, président de la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec (CORPIQ).

En ce qui concerne le coût des loyers, on soutient que les prix reflètent maintenant le coût réel d'un logement. M. Courtemanche admet cependant qu'il existe encore trop de logements insalubres. «Certains propriétaires manquent de professionnalisme. Mais les taudis hors de prix ne trouveront pas preneur», affirme-t-il.

Selon ce dernier, tout le monde devrait trouver chaussure à son pied cet été, à moins de posséder un mauvais dossier de crédit. Car les propriétaires ne s'en cachent pas, ils sont désormais beaucoup plus sélectifs. «On n'a plus le choix. On compte plus de 40 000 cas de non-paiement de loyer par année et Québec ne fait rien pour régler ce problème», conclut M. Courtemanche.