Plus léger, le béton nouveau se fait décoratif et parfois presque oeuvre d'art dans les mains d'une poignée d'artisans. Il investit les cuisines, les salles de bains, le mobilier. L'atelier Manix design s'en est même servi pour créer des abat-jour.

L'un d'eux est le luminaire Milk, conçu à partir d'une vieille pinte de lait reçue en héritage. «J'adore cet objet, parce qu'il a une signification, c'est une icône montréalaise», dit l'artisan Manix Laliberté.

Avec sa surface blanche, douce et lisse, puis sa forme fluide tout en rondeur, Milk résume bien l'approche de Manix design et de son fondateur. «Je veux montrer que le béton peut être très rude et très soyeux à la fois. C'est la combinaison des deux qui est intéressante.»

Par la force des choses, et en raison des propriétés du matériau, ce pionnier de l'art du béton au Québec a adopté le concept du wabi-sabi à son métier, une philosophie japonaise qui consiste notamment à apprécier l'imperfection et l'authenticité des choses. «Quand j'ai commencé il y a huit ans, j'avais des maux de tête à essayer d'atteindre la perfection. Au fil du temps, j'ai abandonné l'idée et j'ai appris à accepter les défauts.»

Ce qui ne l'a pas empêché de raffiner ses techniques. Il y a trois ans, il s'est rendu en Arizona et a suivi une formation auprès d'un artisan afin d'apprivoiser une version écologique, qu'il tend à privilégier dans tous ses projets. «Le béton nouveau n'a pas de roches et le ciment est coupé dans son pourcentage avec des matières recyclées, du zircon, du polymère ou de la fibre. Il est aussi environ 20% plus léger», explique-t-il.

Un coup de foudre inattendu

L'ancien designer multidisciplinaire - Manix Laliberté a auparavant travaillé dans le domaine du graphisme et de l'aménagement intérieur commercial - a eu le coup de foudre pour ce matériau un peu par hasard. Frustré par le résultat désastreux d'un comptoir de béton traditionnel réalisé par un entrepreneur, il s'est essayé à en confectionner lui-même. «J'ai été capable d'avoir un meilleur rendu. Par la suite, on m'a demandé d'en faire d'autres et c'est venu comme ça», raconte-t-il. L'atelier, qui n'a ni boutique ni site web, mais qu'on peut trouver sur Facebook, se spécialise dans la création sur mesure des produits en béton, qu'il s'agisse d'éviers, de manteaux de foyer ou encore de planchers.

«Avec le béton, il n'y a pas de place à l'erreur. Il y a tellement d'étapes avant d'arriver à un résultat, qu'on ne peut couper les coins ronds sans en payer le prix», ajoute l'artisan.

Depuis un an, Manix design conçoit aussi de plus petits objets comme des abat-jour, du mobilier et des accessoires. Les supports Air, par exemple, sont de minuscules socles aux formes très simples pouvant accueillir des épiphytes, des plantes de plus en plus prisées en décoration d'intérieur. Celles-ci se nourrissent de l'humidité ambiante et elles s'accrochent à toutes sortes de surfaces, qu'elles soient organiques ou pas.

La démarche visait à évoquer l'idée selon laquelle la vie peut pousser presque au travers du béton, un matériau qui est finalement très caméléon et qui fait appel autant à la chimie qu'au design. «Il faut savoir maîtriser plein de métiers en un, un peu comme en ébénisterie. C'est ce qui est stimulant.

Photo fournie par Mélanie Lessard

Luminaires Manix Design, 150$.