Vos armoires bicentenaires ont un urgent besoin de renouveau? La décoration de votre chambre vous cause des migraines? Il est parfois préférable de recourir aux services d'un designer plutôt que de multiplier les faux pas. Conseils pour dénicher le spécialiste qui vous convient vraiment.

Michelle Halle est une fervente adepte de design. Depuis toujours, elle carbure aux émissions de décoration, dévore tous les magazines qui lui tombent sous la main et visite les salons de l'habitation par simple plaisir. Preuve de son flair infaillible, ses amis sollicitent même son aide pour aménager leur demeure.

Pourtant, quand vient le temps de donner un coup de jeune à sa propre résidence, Michelle Halle collabore depuis toujours avec des designers. «Il y a 25 ans, je souhaitais décorer notre maison de fond en comble, explique la propriétaire d'une charmante maison unifamiliale située dans la couronne nord de Montréal. Comme je suis de nature impulsive, le fait de travailler avec un designer m'a permis de me centrer, de respecter un certain fil conducteur.»

Les services de designer gagnent en popularité, que ce soit pour une étude de couleurs, un aménagement complexe ou une métamorphose spectaculaire. Cette tendance est assurément liée à la prolifération des émissions de téléréalité et des magazines sur le sujet. «Les consommateurs sont généralement mieux informés que par le passé, même si certains aspects de notre profession demeurent mal compris, indique Marie-Claude Parenteau-Leboeuf, designer d'intérieur et membre de l'Association professionnelle des designers d'intérieur du Québec (APDIQ). Le blocage le plus fréquent reste la question budgétaire.»

Bénéficier des conseils d'un expert est certes rassurant pour les nouveaux propriétaires, les bricoleurs du dimanche et les néophytes de la décoration, mais cela présente aussi des avantages pour d'autres types de clients. «Je n'aime pas beaucoup magasiner pour des articles de décoration, admet Michelle Halle. Je fréquente rarement les quincailleries et les magasins de meubles. Faire équipe avec un designer me permet de débusquer rapidement les articles qui répondent à mes besoins, au lieu de courir les boutiques pendant de longues heures.»

Leur connaissance du marché, des meilleurs fournisseurs, des nouveaux matériaux et des tendances du moment les aident à mieux planifier les travaux. La designer Marie-Claude Parenteau-Leboeuf y va toutefois d'une mise en garde: «Si votre designer arrive avec des solutions aux antipodes de vos besoins, il faut déterminer la raison de ce malentendu, dit-elle. Quitte à arrêter tout de suite le projet.»

Combien ça coûte?

Certains designers demandent un tarif horaire de 60$ à 80$, mais le coût peut grimper à 100$ et même 150$ l'heure pour les spécialistes chevronnés.

D'autres professionnels préfèrent être payés à la consultation ou optent pour un pourcentage variant de 8% à 15% du total des travaux.

Des professionnels ajoutent enfin à leurs honoraires de base un pourcentage sur les achats réalisés pour composer le décor. Par exemple, si le designer sélectionne un canapé de 1000$ chez un de ses fournisseurs privilégiés afin de peaufiner la salle familiale, il pourrait toucher une commission de 5% sur le prix de vente. «C'est un secret de Polichinelle chez les designers, et ce n'est pas tout le monde qui travaille ainsi, indique le designer Érik Maillé. Personnellement, je préfère encore demander des honoraires un peu plus élevés, mais que mes clients bénéficient des meilleurs prix possibles sur les matériaux et accessoires. L'important, c'est que le mode de rémunération soit transparent.»

Et les dépassements de coûts? «Il est pratiquement impossible de ne pas dépasser le budget, surtout quand on parle de la rénovation d'une vieille maison et que les murs nous réservent bien des surprises, explique Érik Maillé. Par ailleurs, le designer peut bien proposer un évier à 500$ qui entre dans le budget, mais si le client a un coup de coeur pour celui qui coûte le double du prix, le budget explose assez rapidement. Il faut aussi garder en tête que le coût de la main-d'oeuvre représente au moins 60% de la facture totale.»

Selon la designer Marie-Claude Parenteau-Leboeuf, les émissions de décoration brouillent parfois les pistes. «On oublie que les téléréalités bénéficient de nombreuses commandites, dit-elle. Si on présente des salles de bains rénovées pour 2500$, dans les faits, on peut plutôt parler de 10 000$!»

Le premier quidam venu peut s'improviser designer, puisque ce titre n'est régi par aucun ordre professionnel. Il est toutefois possible de consulter le bottin de l'Association professionnelle des designers d'intérieur du Québec, dont les membres ont suivi une formation dans une école reconnue et comptent au moins trois ans d'activité professionnelle dans le domaine.

Ces designers souscrivent également une assurance responsabilité civile professionnelle qui couvre les erreurs et accidents.

«Pour caricaturer, si je donne un coup de main à un de mes clients pour transporter son nouveau Picasso et que j'échappe le marteau dedans, je suis protégé par mes assurances», illustre Érik Maillé.

La liste regroupe plusieurs centaines de membres. Marie-Claude Parenteau-Leboeuf propose de se concentrer d'abord sur les professionnels de sa région et de rayer tous ceux qui ne font que des projets commerciaux. «Travailler avec un designer de notre secteur est fort pertinent, car il connaît déjà les règlements et permis municipaux qui s'appliquent.»

Fondée par la designer Jessica Rivière-Gomez, la firme Index Design propose un répertoire illustré de 300 studios et designers indépendants. «C'est une sélection éditoriale, précise Marie-Julie Dalpé, responsable du service à la clientèle. Nous avons choisi les designers et les firmes qui se distinguent par leur talent et leur éthique de travail.»

À la recherche du designer parfait

Contemporain, campagnard, «shabby chic»... Trouver le designer parfait n'est pas toujours facile.

«Il est ardu de trouver le designer qui correspond à notre personnalité et à nos goûts, admet Michelle Halle, qui a fait plusieurs essais et erreurs avant de dénicher la perle rare. Quand on est en couple, la mission est encore plus périlleuse, car le professionnel doit convenir aux deux partenaires.»

Alors, comment choisir? 

- Parlez-en à vos amis: le bouche à oreille est une stratégie gagnante.

- Vérifiez les références du spécialiste: «Ce qui est bon pour nos proches ne l'est pas nécessairement pour nous, précise Michelle Halle, habituée des rénos. C'est une question de tempérament, de vision, de connivence...»

- Feuilletez les magazines et parcourez les sites internet pour contacter les designers dont les réalisations vous plaisent.

Il faut toutefois garder en tête qu'un vrai spécialiste s'adapte au style et aux besoins de son client.

Qui fait quoi?

Architecte

Il est possible de recourir aux services d'un architecte, peu importe le mandat, explique Sylvie Beaucage, directrice des communications de l'Association des architectes en pratique privée du Québec. «On pense souvent que les architectes se limitent aux projets d'envergure, dit-elle. Ce n'est pas le cas. Les architectes font de tout. Certains se feront un plaisir de décorer notre salon ou de réaliser une simple étude de couleur. Un architecte peut facilement faire tout ce que font les autres spécialistes du design, alors que l'inverse n'est pas automatiquement vrai. Plus encore, l'architecte est un professionnel couvert par des assurances et doit respecter un certain code de déontologie. Il peut faire toutes les demandes de permis auprès de la municipalité, ce qui n'est pas le cas du décorateur ou du designer. En engageant un architecte, le propriétaire est donc blindé.»

Designer

«Un designer optimise l'aménagement de la maison en tenant compte des différents besoins et exigences, résume le designer Érik Maillé. Il peut abattre des murs, réaménager l'espace selon le mode de vie, dessiner des plans pour l'éclairage, la plomberie, les murs... Il partage ensuite sa vision avec l'entrepreneur qui exécutera les travaux. Par contre, si le projet implique de toucher aux murs porteurs, le designer doit travailler avec un architecte ou un ingénieur. Au-delà du rôle du décorateur, qui veillera principalement au choix du papier peint, des couleurs, des motifs et des textiles, le designer se positionne un peu comme le chef d'orchestre des projets d'aménagement.»

Décorateur

«Il n'existe pas de législation officielle pour obtenir le titre de décorateur», indique Sophie Bergeron, porte-parole et directrice couleurs et design chez Benjamin Moore. Il existe plusieurs types de cours pour devenir décorateur d'intérieur, des formations qui varient de quelques semaines à quelques années. «Ces spécialistes sont la ressource idéale quand on a besoin d'information ou de conseils pour peaufiner notre décor, explique Mme Bergeron. Les couleurs pour la peinture, les choix de tissus pour les coussins décoratifs, les motifs de papier peint, l'agencement de la literie, les recouvrements de fenêtres ou les stores...» Et comment les décorateurs se distinguent-ils des designers? «La ligne est mince entre les deux, reconnaît Mme Bergeron. Certains designers décident même par choix de se concentrer sur l'aspect décoration. La différence la plus importante est qu'un designer peut faire des plans précis, que ce soit pour la plomberie, l'électricité, les armoires de cuisine... Ce n'est pas le cas du décorateur.»