Qu'il s'agisse de création industrielle à grande échelle, d'aménagement d'espace ou d'objets de la vie courante, les designers français sont très sollicités à l'international, forts de leur capacité à penser l'art de vivre au quotidien, avec une préoccupation écologique évidente.

On peut réellement parler «d'explosion du design français», dit à l'AFP Alain Lardet, président de «Designer Days» (du 9 au 14 juin), manifestation annuelle rassemblant les tendances et les professionnels les plus en vue du design international, qui débute mercredi à Paris.

«Cela se traduit en qualité et en succès planétaire avec des produits dessinés pour des sociétés internationales. C'est le résultat d'une maturité acquise au cours des 10, 15 dernières années, devant les Italiens qui ont tenu le haut du pavé pendant 30 ans, après la guerre», analyse-t-il.

«Le design français a toujours été résolument ancré dans un langage international. Après la génération Philippe Starck, une nouvelle génération émerge avec une préoccupation écologique chevillée au corps», poursuit M. Lardet, citant Patrick Jouin, comme «l'un des plus brillants».

Du prototype automobile au mobilier pour l'éditeur italien Cassina, en passant par des objets simples comme le «Tarti'Nutella», ce quadra a aussi conçu des espaces devenus célèbres comme le restaurant du chef Alain Ducasse, Mix in New York.

«Les Français sont bien formés et particulièrement bons en aménagement des espaces de vie, avec une dimension poétique certaine, répondant pourtant à un cahier des charges strict», ajoute-t-il. «Une philosophie de l'art de vivre qui va au delà de l'objet», relève Cécile Krygier, styliste au Bon Marché Rive Gauche.

«Habitat, énergies renouvelables, aménagement des espaces publics: tous anticipent les mutations», ajoute Laurent Dutheil, directeur général du Lieu du Design, créé en 2009 rue du Faubourg Saint-Antoine à Paris avec pour mission de promouvoir le secteur.

Il cite, parmi d'autres, Mathieu Lehanneur et ses objets qui améliorent la qualité environnementale, Gilles Belley et ses écoconceptions sur l'énergie, le traitement des déchets, Jean-Louis Fréchin et sa réflexion sur le numérique.

«Les Français décollent vraiment depuis cinq, six ans à l'étranger», confirme Matali Crasset, représentante de cette génération, formée à L'Ecole nationale supérieure de création industrielle (ENSCI). «Ils sont reconnus pour leur formation, leur créativité et leur savoir-faire. On leur confie des prototypes, des projets. Ils font des objets qui ont du sens», ajoute-t-elle.

«Alors que les Néerlandais et leur école, Eindhoven, sont plus dans l'image ou l'objet unique, les Scandinaves dans l'objet fonctionnel, la France est forte dans les scènes de vie», explique-t-elle.

Le succès français surfe sur la forte croissance du secteur en général avec «une prise de conscience, tardive mais réelle en France», selon M. Lardet: le design peut favoriser des solutions dans un contexte économique défavorable.

Dans toutes les entreprises, les designers ont intégré les équipes de développement. Ils ne font pas que produire des formes, «ils sont les médiateurs entre production et consommation».

«Longtemps cantonné à un code esthétique élitiste, le design est à nouveau perçu dans sa fonction première: un élément de transformation de l'outil industriel et des nouveaux usages» au service de la vie courante et un facteur de «création de richesses et d'emplois», ajoute Laurent Dutheil.