Elizabeth Leriche, François Bernard et Vincent Grégoire respirent l'air du temps. Les trois possèdent des antennes pour flairer les courants émergents en décoration. Deux fois par année, ils présentent leurs visions dans le cadre de L'Observatoire du Salon maison &objet, en banlieue de Paris. À quoi ressemblent leurs dernières prédictions? Les voici.

Elizabeth Leriche, François Bernard et Vincent Grégoire respirent l'air du temps. Les trois possèdent des antennes pour flairer les courants émergents en décoration. Deux fois par année, ils présentent leurs visions dans le cadre de L'Observatoire du Salon maison &objet, en banlieue de Paris. À quoi ressemblent leurs dernières prédictions? Les voici.

Joint à Paris, François Bernard précise d'entrée de jeu la nature de son métier. «Je ne suis pas un chasseur de tendances. Je détecte les influences créatives du monde de la décoration de demain», rectifie le directeur de l'agence de style de vie Croisements

Dans son stand au Salon maison&objet, la quasi-totalité des meubles exposés - de la bergère aux tables en passant par le canapé Chesterfield - avaient été peints en blanc. L'ensemble était incolore, presque irréel.

Pardon, mais les couleurs lumineuses ne sont-elles pas branchées pour l'été? «Oui, ça c'est la tendance du côté des commerces, mais selon moi, les objets haut de gamme vont dorénavant se définir par leur forme et non par leur couleur», affirme-t-il.

Autre explication: les coloris flashy étant cotés depuis plusieurs années, pas étonnant que le blanc apparaisse comme une nouveauté... Question de cycle.

Selon le spécialiste français, certains fabricants exploitent la couleur parce que la forme de leur produit n'est pas épatante. «Alors qu'avec le blanc, on peut difficilement camoufler un design banal. Ça correspond au vrai luxe», croit-il.

Autre courant à venir: le design du vide. En clair? De plus en plus d'objets affichent des trous ou des bordures découpées. Autrement dit, une des dernières manies des designers est d'évider les formes.

Dans le même esprit, il y a l'arrivée de la décoration virtuelle dans nos maisons. Ce courant englobe les motifs décoratifs autocollants (les stickers, comme on les appelle en France) qui disparaissent à volonté. Il y a aussi les images projetées (sur les murs, le plafond ou le plancher) qui risquent de gagner en popularité.

Design mutant

Elizabeth Leriche croit aux mutations esthétiques et à la matière protéiforme. Nouvelle religion? Non, nouveau courant en design. La visionnaire a rassemblé des objets, souvent des meubles traditionnels, qui semblent s'être mués en objets insolites. «J'ai montré des formes fondues, étirées, boursouflées. Des objets extraordinaires que j'avais du mal à comprendre», dit-elle.

Au Salon, elle a d'ailleurs pris place sur un drôle de banc. Intitulé Spaghetti, ce siège signé Pablo Reinoso est composé de lames de bois qui semblent grimper au mur, comme des lianes.

Elle a aussi présenté une pièce de Robert Stadler. Le designer a métamorphosé un canapé Chesterfield en étranges flaques capitonnées posées au sol et au murs.

Bizarre bazar

En réaction aux styles zen et bourgeois, un besoin d'extraordinaire et de merveilleux se fait sentir, note Vincent Grégoire, directeur de création au département Art de vivre, à l'agence NellyRodi. Intitulé Bizarre bazar, son stand avait des airs de fouillis baroque. De fait, plusieurs tendances s'y entrecroisaient. Parmi elles, les collages surréalistes et dépareillés. Il donne l'exemple de la chaise Napoléon IV dessinée par le couturier Christian Lacroix pour les magasins La Redoute, en France. Imaginez le choc des époques. Elle est composée d'un dossier rétro de style Napoléon III et d'un siège de bistrot avec piètement en acier chromé.

Les jeux de lumière (ombres chinoises) et les jeux de mots (messages poétiques sur des objets) sont aussi au nombre des nouvelles habitudes des designers.

Le chic érotique (dessins suggestifs) et le style guerrier (bols en petits soldats de plastique ou lampes en forme de pistolet) sont aussi dans l'air du temps.

Décidément, Vincent Grégoire n'est pas à court de bizarreries décoratives. Il a notamment exposé des objets disproportionnés, comme une toute petite tasse dans une soucoupe gigantesque.

 

Photo The New York Times

L'ère est au design mutant, selon Elizabeth Leriche. À preuve, le banc sur lequel elle est assise semble se transformer en lianes. Ce siège est signé Pablo Reinoso.