Les femmes sont (enfin) plus visibles dans le domaine du design d'objets. À l'échelle internationale, l'Espagnole Patricia Urquiola dessine frénétiquement des meubles pour les fabricants les plus cotés de la planète. Hyper populaire, cette designer brille dans un milieu majoritairement masculin.

Les femmes sont (enfin) plus visibles dans le domaine du design d'objets. À l'échelle internationale, l'Espagnole Patricia Urquiola dessine frénétiquement des meubles pour les fabricants les plus cotés de la planète. Hyper populaire, cette designer brille dans un milieu majoritairement masculin.

 À Montréal, l'exposition Madame Chose rassemble des objets exclusivement conçus par des créatrices actuelles. Présenté à la boutique-galerie Commissaires, un endroit couru par les mordus de design pointu, l'événement se termine à la fin du mois de novembre.

Les styles sont variés. Les objets inspirés. Certaines pièces sont à la fois chic et érotiques comme les vibrateurs en version or 24 carats ou en inox créés par Jimmyjane pour l'éditeur californien Citizen: Citizen.

Autre curiosité pour adultes seulement: les personnages noirs intitulés La bête sexuelle et ceux en blanc nommés La femme vicieuse d'une série de poupées baptisée Great Bitch de la Montréalaise d'origine hongroise Melinda Pap.

L'esprit derrière ces figurines est acide. «C'est une révolte envers les personnes négatives rencontrées au quotidien», explique l'artiste connue pour ses installations, ses estampes et ses poupées contemporaines.

On découvre également dans le petit espace des Commissaires un hamac en coyote (une pièce originale des deux Berlinoises de Bless) et un photophore poétique appelé Igloo de nuit. Un luminaire risque de vous faire sourire. Dessiné par le duo de Parisiennes de la griffe Tsé &Tsé, il semble avoir été détourné d'un hôpital, car il est composé d'une ampoule rouge sang placée dans un sachet aux allures de soluté.

Parmi les oeuvres les plus fascinantes, il y a les créations de la Néerlandaise Hella Jongerius. Designer réputée, elle a conçu de la vaisselle blanche garnie de défauts volontaires issus de microchangements en usine.

«Hella Jongerius utilise des techniques de pointe, mais elle aime que le résultat affiche un aspect artisanal. C'est sa façon de montrer la beauté dans l'imperfection», explique Pierre Laramée, cofondateur de Commissaires.

La bouteille Long neck de la conceptrice est formée d'une partie en verre et d'une autre en porcelaine. Les deux sections sont retenues ensemble à l'aide d'un ruban adhésif sur lequel est inscrit le mot: fragile. Le prix? 1790$.

D'autres objets exposés sont toutefois beaucoup plus abordables. Il y a les couverts de plastique signés Pandora qui s'inspirent de ceux du 19e siècle, en Italie. Il faut compter 22,50$ pour un ensemble de quatre ustensiles. La jeune designer québécoise Caroline Blais a, pour sa part, fabriqué des carnets de note à la couverture faite de circulaires recyclées. Prix d'amie: 5,50$ l'unité. Des bagues en plexi en forme de gros solitaire sont vendues à 10$.

Design made in Québec

D'autres créatrices québécoises font partie de l'expo Madame Chose. Outre Melinda Pap, il y a France Goneau, une designer-céramiste de Montréal. Elle propose quelques-unes de ses assiettes numérotées faites de porcelaine émaillée. Ressemblant à d'immenses nénuphars, elles affichent une teinte magnifiquement vert-de-grisée.

L'artiste montréalaise de réputation internationale Dominique Blain a, de son côté, réalisé des foulards pour l'événement. De loin, on pourrait croire qu'ils sont couverts d'un imprimé fleuri. De près, on découvre plusieurs symboles associés à différentes religions. «Ils vivent en harmonie sur le même carré de soie», pointe l'artiste, un brin ironique.

Design au féminin

L'ouvrage Dish a été une source d'inspiration pour la mise sur pied de Madame Chose. Cet ouvrage édité à New York présente plusieurs objets avant-gardistes conçus par une quarantaine de femmes designers dans le monde.

«On voit de plus en plus d'objets design créés par des femmes», renchérit Pierre Laramée. Son associée, Josée Lepage, a déjà codirigé la marque d'accessoires Zweimineral, à Montréal. Selon elle, le design d'une femme peut être différent de celui d'un homme. Pourquoi? «Parce que notre sensibilité influence notre création», répond-elle.

Les créatrices actuelles utilisent encore souvent des matériaux traditionnellement associés au monde des femmes, comme le textile et la céramique, observe Pierre Laramée.

France Goneau s'inscrit dans cette tendance. La designer considère son travail davantage comme de la création plutôt que de la conception d'objets manufacturés. Son carrelage, ses assiettes et ses murales sont réalisés à la main. «Il y a un aspect décoratif à mon travail. Je me sens plus près du design d'intérieur où évoluent bien des femmes», dit-elle.

Hazel Clark, une des collaboratrices du livre Dish, constate que plusieurs femmes designers tendent encore à privilégier le design relié à la maison. Mais une chose est sûre, leur sens de l'innovation est de plus en plus apprécié, voire admiré.

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Commissaires

5226, boul. Saint-Laurent

Montréal

(514) 274-4888