Manon Trudel est brodeuse. Pas de celles qui manient le cerceau et l'aiguille à la lumière du jour, dans la pose immuable des dames du Moyen Âge. Manon Trudel manipule une machine industrielle à 15 bobines, pleine de boutons et de tiges métalliques qui répondent aux ordres d'un ordinateur.

Manon Trudel est brodeuse. Pas de celles qui manient le cerceau et l'aiguille à la lumière du jour, dans la pose immuable des dames du Moyen Âge. Manon Trudel manipule une machine industrielle à 15 bobines, pleine de boutons et de tiges métalliques qui répondent aux ordres d'un ordinateur.

 Ses coussins piqués de coeurs stylisés, ses sacs de pain traversés par des épis de blé et ses tabliers ornés de mots gourmands cachent sous leur apparente délicatesse, une somme effarante d'essais et d'erreurs. Une brodeuse industrielle ne s'apprivoise pas aussi facilement qu'un nouveau vélo. «Ça m'a pris deux mois», confie Manon Trudel.

Sans être humain, une machine est bête comme un pied. C'est sur papier que l'artisane de Limoilou conçoit ses dessins jusqu'à ce que leurs lignes soient parfaitement au point. Elle les scanne, puis elle «donne le parcours» à la brodeuse industrielle en les soumettant à un programme informatique.

 Manon Trudel a 42 ans. Elle s'active sur une machine à coudre depuis l'âge de huit ans. Elle a suivi une formation en dessin de mode au Collège LaSalle, à Montréal.

 Elle a été «patroniste», rue Chabanel, jadis haut lieu de la mode dans la métropole. Un beau jour, elle est revenue à Québec. «Je voyais mes amies artisanes qui gagnaient bien leur vie, raconte-t-elle. L'an passé, je me suis donc lancée.»

Se lancer, ça signifie investir beaucoup pour bien s'équiper. L'atelier qu'elle a aménagé dans son chez-soi de la 46e Rue Ouest, à Limoilou est celui d'une pro. Et le linge de maison qu'elle y fabrique est du même calibre.

 Tous ses articles sont en lin, une matière qu'elle a découverte en fabriquant des petits coussins de détente pour les yeux, bourrés de graines de lin. Elle s'est prise d'affection pour cette fibre végétale aux mille vertus : écologique, absorbante, légère, inusable, antibactérienne, lavable à la machine, vieille comme le monde.

 

Photo Laetitia Deconinck, Le Soleil

Coussin brodé