Les gens qui habitent depuis deux ans dans cette ancienne église presbytérienne construite en 1899, n'ont pas voulu être nommés. Il suffit pourtant d'écrire qu'elle est située dans les hauteurs du Vieux-Lévis pour que les résidants du coin aient une bonne idée de l'identité des propriétaires. Ce couple tout simple a créé un décor sobre, mais étonnant, qu'il a mis au service de l'architecture triomphante de sa résidence.

Les gens qui habitent depuis deux ans dans cette ancienne église presbytérienne construite en 1899, n'ont pas voulu être nommés. Il suffit pourtant d'écrire qu'elle est située dans les hauteurs du Vieux-Lévis pour que les résidants du coin aient une bonne idée de l'identité des propriétaires. Ce couple tout simple a créé un décor sobre, mais étonnant, qu'il a mis au service de l'architecture triomphante de sa résidence.

Chez eux, rien n'est tapageur. Le marbre, le béton, l'ardoise et le bois servent de faire-valoir à leurs objets design et à leurs meubles fabriqués sur mesure. Mais ces derniers s'effacent devant la majesté des pièces. Il faut donc prendre tout son temps pour relever le raffinement qui a présidé à leur achat et à leur agencement dans ce lieu singulier.

L'église paraît immense de l'extérieur, mais elle n'a au fond que quatre pièces, monumentales, plus deux salles de bains, ainsi qu'un petit bureau aménagé au pied du clocher et une salle de repos à son sommet, pas tout à fait organisée, mais se suffisant du fleuve, du Château Frontenac et de la ville de Lévis, en formidable panorama.

Le rez-de-chaussée abrite le salon et ses nombreuses subdivisions: le bar, la salle d'exercices, le coin télévision et un podium dominé par trois vitraux longilignes, sous lesquels se dressaient jadis les fonts baptismaux. Aujourd'hui, ils ont été remplacés par une table antique massive qui sert de support à un crucifix et à un jeu d'échecs.

À droite de ce podium, un cubicule cache une belle salle d'eau au plancher et aux murs recouverts d'ardoise. Au-dessus, une chambre en mezzanine fait sa belle sous les hautes boiseries du plafond.

Les singes de la ligne Paul Frank égaient les trois tabourets du bar. «Je les avais bien avant que l'émission Loft Story ne les popularise avec le pyjama de Marie-Laurence», précise notre hôtesse. La télé et la chaîne stéréo reposent sur une étagère inspirée d'un modèle italien, fabriquée par les ébénistes de l'entreprise québécoise Le Saint. Un fauteuil de Charles Eames a trouvé sa place à côté.

Une partie de la nef a été fermée pour camoufler la chambre et la salle de bains du couple. Le lit «carriage» est surmonté d'une tringle sur laquelle sont alignées des petites croix pendues à des cordes. Des tables de chevet de marque Baronet, un plancher de céramique, des rideaux bien droits devant les fenêtres gothiques: cette pièce aux doux tons de crème n'en demande pas davantage. La douche tout en béton a un aspect rugueux. Le comptoir et ses deux lavabos moulés, en béton également, présentent en revanche une surface lisse qui s'harmonise aux étagères de verre.

Telle une chaire

La «pièce maîtresse» de cette résidence est la cuisine, dessinée par Roxana Retamal, des Cuisines Rochon. Construite en mezzanine, elle s'élève au-dessus du salon telle une chaire, et permet à ses occupants de l'embrasser tout entier du regard. Dans cette église, c'est l'homme qui officie aux fourneaux. Son îlot, il l'a voulu démesuré et fonctionnel. Il est si grand, en fait, que l'épouse est incapable d'atteindre son centre surélevé. Derrière leurs panneaux noirs, la plupart des espaces de rangement sont concentrés sous le comptoir de marbre gris, si beau, mais si salissant, déplore le couple.

Le boudoir, en retrait, est meublé de deux fauteuils achetés chez Baltazar et d'une longue étagère basse fabriquée par un artisan de la rive sud. Au-dessus de la table, pas un, pas deux, mais trois lustres, et pas des petits! «Une idée empruntée dans un magazine», confie la dame.

Malgré tous les éléments personnels et distinctifs disséminés dans cette maison, il est difficile d'oublier sa vocation première de lieu de culte. Les proprios n'ont pas tablé sur cette particularité, mais ils n'ont pas cherché non plus à la gommer.

Ainsi, le vestibule a conservé sa nature de «vraie entrée d'église», avec sa solennelle montée de marches, son solide plancher d'ardoise et un ange grandeur nature qui monte nonchalamment la garde, le dos tourné aux visiteurs. Et la surprenante collection de crucifix s'affiche tout naturellement sur le mur menant au salon.