Les jardiniers québécois qui font de l'hybridation sont sans doute nombreux, notamment chez les amateurs d'hémérocalles, mais rares sont ceux qui parviennent à commercialiser leur création. À 85 ans bien comptés, Tony Hubert est probablement le plus connu de tous dans le milieu horticole. On lui doit plusieurs spirées dont la célèbre «Gold Mound», de même que les iris versata, un croisement entre l'iris versicolore et les iris japonais (I. ensata). Et parmi les autres, André Poliquin, président de la Société des orchidophiles de Montréal, a sélectionné le buis nain «Mont-Bruno»; Jean François Devoyault, des Jardins de Jean-Pierre à Sainte-Christine, a obtenu le weigela «Vampire» et sélectionné un cornouiller jaune.

Serge Fafard est probablement l'un des plus prolifiques du groupe. En plus de ses nombreuses hémérocalles, il a créé plusieurs hostas, dont les gigantesques «Louis Cyr» et «Le géant vert» qui atteignent plus de 2 m de diamètre, des pivoines, des ligulaires, des échinacées, des hépatiques et bien d'autres.

«C'est plus fort que moi. Je le confesse, c'est une folie, dit-il. J'aime hybrider les plantes, toujours dans le but d'obtenir du nouveau et, bien sûr, de découvrir la perle rare. Un travail qui exige beaucoup de patience.» Et les redevances? M. Fafard éclate de rire. «Je me souviens d'une plante commercialisée à la grandeur du territoire américain. Eh bien! j'ai obtenu encore plus de droits des plants vendus au Québec que dans l'ensemble des États-Unis. Les hybrideurs restent souvent à la merci des sociétés de distribution. Je connais aussi une dame au Québec qui était sur le point d'enregistrer une plante, unique il va sans dire. Mais avant même que les formalités ne soient achevées, la plante était vendue sur tout le continent l'année suivante. Un hasard incroyable, n'est-ce pas!» Un milieu où la concurrence est féroce et les enjeux souvent internationaux.

Chrysanthème ou leucanthème?

Dans nos premiers cours de botanique, on apprenait que la jolie marguerite des champs portait le nom de Chrysanthemum leucanthemum, un premier nom latin dont nous étions bien fiers. Mais les choses ont changé depuis. Comme toutes les autres, notre marguerite, une de nos premières immigrantes végétales à pousser en sol québécois, est dorénavant classée parmi les leucanthemum ou leucanthèmes, notamment en raison de détails anatomiques ou physiologiques. Contrairement au chrysanthème, par exemple, la belle effeuillée n'émet pas de parfum, sa hampe florale ne compte habituellement qu'une seule fleur et sa tige est dénuée de poils. Mais elle est toujours la seule à répondre à l'angoissante question: «M'aime-t-il ou ne m'aime-t-il pas?»