Après les tomates bleues, voici le bleuet rose.

Eh oui! un bleuetier qui produit de jolis fruits rose vif, plus ou moins foncé. Des bleuets à la texture ferme, d'une saveur douce et agréable, affirment les chercheurs américains qui ont sélectionné la plante.

La baie répond au nom de «Pink Lemonade». Elle a été lancée l'an dernier aux États-Unis par la firme Briggs, de l'État de Washington. Elle fait son entrée en grande pompe au Québec cette année en s'étalant à la première page du catalogue Horticlub et sera offerte par plusieurs centres de jardin au printemps.

Soulignons tout de suite que les plants vendus seront de très petite taille, environ 30 cm, et ne donneront pas leur première récolte avant trois ans. À vrai dire, c'est à ce moment-là qu'on saura si «Pink Lemonade» n'est pas simplement un «gadget» horticole. À l'heure actuelle, on doit se fier aux scientifiques du département de l'Agriculture des États-Unis et, évidemment, à la société Briggs, du moins en ce qui concerne le goût du fruit. Il n'en reste pas moins que le commentaire le plus fréquent jusqu'ici au sujet du bleuet rose est sa grande beauté.

Le nouveau venu est un cultivar des bleuetiers à corymbes (Vaccinum corymbosum), ces plants qui produisent les gros bleuets offerts à l'épicerie et qui atteignent 1,5 m, parfois plus, et dont l'envergure est similaire. Dans des conditions optimales, leur production peut s'élever autour de 5 à 10 kg de fruits par plant. Il faut s'attendre toutefois à des résultats beaucoup plus modestes de «Pink Lemonade». D'ailleurs, même s'il est rustique en zone 4, le plant serait sensible aux gelées printanières tardives comme plusieurs autres bleuetiers à corymbes, d'ailleurs. C'est donc surtout sous un climat plus doux, dans la grande région métropolitaine, par exemple, en zone 5, qu'il faut s'attendre à une récolte digne de ce nom, laisse entendre la porte-parole de Briggs.

Comme les autres bleuetiers, «Pink Lemonade» préfère un sol légèrement acide, ce qu'on peut aisément obtenir au moment du creusage de la fosse de plantation. Il exige le plein soleil et produit des fleurs blanches qui donneront des fruits blancs virant au rose à pleine maturité. La récolte est de mi-saison, en juillet. Les feuilles lustrées et vert foncé deviennent orangées au cours de l'automne. La plante pousse rapidement et elle est autofertile, mais sa pollinisation sera nettement améliorée si on plante un autre bleuetier tout près, une variété bleue.

Attention: les oiseaux adorent les bleuets, surtout quand ils sont bien mûrs, prêts à être récoltés. Ce sont des cueilleurs extrêmement rapides, d'une efficacité exceptionnelle. Un filet protecteur est donc de mise si on veut vraiment en goûter.

70 ans plus tard

Le plus étrange, c'est qu'il existait jadis deux cultivars de bleuets roses qui ont même obtenu leur baptême officiel en 1932: «Redskin» et «Catawba». Faute d'intérêt, ils n'auraient jamais été cultivés commercialement et auraient disparu même s'ils pouvaient susciter la curiosité des amateurs de jardinage.

Voilà que, 70 ans plus tard, les bleuets roses ont commencé à susciter un certain engouement au sein de l'industrie horticole parce que deux cultivars étaient déjà en phase de sélection par le département de l'Agriculture des États-Unis, notamment au Centre de recherche Marruci sur les bleuets et les canneberges, au New Jersey. «Pink Lemonade», qui portait alors le nom de code ARS 96-138, a été créé en 1991 puis évalué de 1996 à 2004. Comme c'est souvent le cas chez nos voisins américains, les nouveaux plants ont ensuite été offerts aux pépiniéristes aux fins d'amélioration et ultimement de commercialisation. D'ailleurs, un autre cultivar aux fruits roses provenant du même lot de recherche, le «Pink Champagne», devrait faire son apparition bientôt.

Le temps des catalogues

Voici venu le temps de consulter les catalogues postaux, ne serait-ce que pour le plaisir d'anticiper un peu la belle saison et de découvrir les nouveautés. Horticlub, le plus important du Québec, nous offre des plantes originales de plus en plus nombreuses. Très beau, celui de Garden Import vaut les 5$ exigés, d'autant plus que vous pourrez en recevoir trois autres gratuitement en deux ans. La maison annonce 125 nouveautés dans sa livraison du printemps.

Si le catalogue papier reste de loin mon préféré, il en existe aussi de nombreuses versions électroniques qui permettent d'acheter directement. Si vous accédez au site de Manon Collard (www.jardinpotager.com), vous aurez accès à une liste d'au moins 80 maisons qui font de la vente par l'internet, dont une trentaine d'entreprises québécoises.

Bleuets blancs, bleuets noirs

La nature se fait souvent fantaisiste. Elle nous donne aussi parfois des bleuets blancs et des bleuets noirs.

Dans les plantations de Vaccinium augustifolium, petit bleuet semi-domestiqué cultivé au Saguenay-Lac-Saint-Jean, il arrive de temps à autre que certains plants ou encore de très petites colonies produisent des fruits d'un blanc pur. Ces albinos, qui ont la même taille et le même goût que leurs congénères, se retrouvent aussi à l'état sauvage. En 2005, un lecteur du Lac-des-Écorces, près de Mont-Laurier, m'en avait même fait parvenir quelques-uns. S'ils avaient perdu un peu de leur blancheur lors de la congélation, ils étaient néanmoins délicieux. À l'époque, une grande entreprise de la Nouvelle-Zélande offrait aussi des bleuets blancs gelés sur le marché de l'exportation.

Par ailleurs, un spécialiste des vaccinium (bleuets et canneberges) au MAPAQ, Jacques Painchaud, m'a déjà dit qu'il existe chez les airelles fausses myrtilles, espèce très répandue ici, des bleuets noirs. Ces fruits ne sont pas recouverts de cette poudre délicate et blanchâtre que l'on trouve chez les autres bleuets, ce qui leur donne un aspect plus sombre, presque noir. Toutefois, ils se détériorent rapidement après la cueillette.